Inflation : la hausse des prix ralentira, mais restera élevée

L’optimisme affiché par les institutions internationales fin 2022 a été démenti par les données du premier mois de l’année 2023. Le FMI comme la Banque mondiale prévoient désormais une inflation plus forte que prévu dans toutes les zones du monde.

Inflation : la hausse des prix ralentira, mais restera élevée

Le 9 février 2023 à 18h49

Modifié 10 février 2023 à 5h30

L’optimisme affiché par les institutions internationales fin 2022 a été démenti par les données du premier mois de l’année 2023. Le FMI comme la Banque mondiale prévoient désormais une inflation plus forte que prévu dans toutes les zones du monde.

La détente des prix énergétiques fin 2022 avait poussé les experts des institutions internationales à prévoir un net ralentissement de l’inflation en 2022. Cet optimisme a pris fin en ce début d’année. Le Fonds monétaire international (FMI), qui prévoyait en octobre dernier une inflation mondiale de 4,4% contre 8,8% en 2022, vient de réviser à la hausse sa prévision et table désormais sur un taux d’inflation de 6,6% en 2023.

La hausse des prix se poursuivra même en 2024 avec un rythme de 4,3%, selon les mêmes projections publiées fin janvier dans le rapport sur les perspectives économiques mondiales, au titre très révélateur : "Inflation au sommet et croissance en berne".

Cette tendance, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), l’a également confirmée lors de sa dernière sortie, le 19 janvier, lors d’un débat organisé à Davos.

"L’inflation, quelle que soit la manière dont on la considère, est beaucoup trop élevée (…) Nous maintiendrons le cap jusqu’à ce que nous soyons passés en territoire restrictif pendant suffisamment longtemps pour pouvoir ramener l’inflation à 2 % en temps voulu", a-t-elle déclaré.

En France par exemple, où l’on s’attendait particulièrement à une détente de l’inflation en raison de la hausse des taux, de la faible croissance et de la baisse des cours des produits énergétiques, les chiffres du mois de janvier ont montré une accélération de celle-ci par rapport à décembre 2022, pour un taux de 6%, le même niveau que l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) prévoit désormais pour février.

Un phénomène que résume bien cette phrase de l’économiste et directeur des études du FMI Pierre-Olivier Gourinchas : "Nous sommes loin d’avoir gagné la lutte contre l’inflation."

Une inflation moindre... mais toujours inédite !

En somme, l’inflation dans le monde sera moindre que celle enregistrée en 2022, mais se maintiendra encore à un niveau très élevé, inédit en ce XXIe siècle, comme le note l’INSEE dans sa dernière note de conjoncture, qui parle d’un plateau autour de 6% qui risque de se stabiliser dans les prochains mois.

Et ce malgré la baisse prononcée des cours du pétrole, du gaz, de l’électricité et autres produits énergétiques qui étaient le principal moteur de l’inflation en 2022. Car, désormais, ce sont les prix des produits alimentaires qui montent.

L’alimentation va devenir le premier contributeur à l’inflation en 2023, prévoit l’INSEE, en raison de la hausse des salaires et du prix des services.

C’est exactement ce que l’on vit actuellement au Maroc : une détente des prix à la pompe, suivant en cela celle des cours du baril et des produits raffinés, mais une explosion des prix des produits agricoles et alimentaires. Des données qui plombent le portefeuille des Marocains et qui devraient à coup sûr pousser le gouvernement à revoir ses calculs, lui qui tablait sur un retour presque à la normale en 2023, avec une prévision de l’inflation en dessous du seuil de 3%.

Un économiste marocain qui pensait déjà lors de la préparation de la loi de finances que cette prévision était trop optimiste, estime aujourd’hui que l’on est plus proche des calculs de la Banque centrale que de ceux du département des Finances. Bank Al Maghrib, qui s’appuie sur les prévisions du Haut-commissariat au plan (HCP) pour tout ce qui est tendance des prix et indices à la consommation, tablait en décembre sur une inflation à 4%. Un chiffre qui pourrait être revu à la hausse avec la flambée inédite en janvier et début février des produits alimentaires.

"C’est même sûr !", estime notre économiste. "Mais il faudra attendre les publications du HCP pour le mois de janvier pour que l’on puisse mesurer l’ampleur de la hausse des prix et pouvoir faire des prévisions actualisées au moins pour les prochains mois."

Surtout, ajoute-t-il, que notre principal partenaire commercial (la zone euro) continue de souffrir d’une inflation haute, ce qui se traduira inéluctablement sur les coûts de production des industriels marocains, le coût des services, et par ricochet sur les prix à la consommation.

"Quand on essayait de faire des prévisions sur l’inflation fin 2022, les modèles étaient basés sur les prévisions de l’inflation dans le monde, et surtout dans la zone euro. A l’époque, le ton était à l’optimisme, ce qui a complètement changé aujourd’hui. Nous devons donc réactualiser également nos prévisions", explique notre économiste.

La désinflation prendra du temps, selon le FMI

C’est dire que les effets du resserrement de la politique monétaire, aussi bien au Maroc que dans le monde, n’a pas encore produit son effet. Constat que fait également le FMI dans son actualisation des prévisions économiques pour 2023 :

"Certains signes indiquent que le durcissement de la politique monétaire commence à refroidir la demande et l’inflation, mais tous les effets ne se concrétiseront probablement pas avant 2024. L’inflation globale semble avoir atteint un pic au troisième trimestre de 2022. Le prix des produits de base combustibles et hors combustibles a diminué, entraînant une baisse de l’inflation globale, notamment aux États-Unis, dans la zone euro et en Amérique latine", peut-on lire dans le rapport de l’institution mondiale.

La même source d’ajouter : "Cependant, l’inflation sous-jacente n’a pas encore atteint son maximum dans la plupart des pays et reste nettement supérieure aux niveaux enregistrés avant la pandémie. Elle persiste, dans un contexte d’effets de second tour des chocs antérieurs sur les coûts et de pénurie de main-d’œuvre, avec une forte hausse des salaires liée à la résistance de la demande des consommateurs. Les anticipations d’inflation à moyen terme restent généralement ancrées, mais certaines jauges sont en hausse."

Et si l’on en croit le même rapport, la quasi-totalité des pays du monde sont concernés par ce phénomène de persistance de l’inflation :

- "La désinflation prendra du temps : d’ici 2024, l’inflation globale et l’inflation hors énergie et alimentation annuelles projetées seront encore supérieures en moyenne aux niveaux enregistrés avant la pandémie dans 82% et 86% des pays, respectivement", affirme le FMI.

- Dans les pays avancés, l’inflation annuelle moyenne devrait ainsi passer de 7,3% en 2022 à 4,6% en 2023 et à 2,6% en 2024, "ce qui reste supérieur à l’objectif dans plusieurs cas", commente le FMI.

- Dans les pays émergents et les pays en développement, l’inflation annuelle attendue diminuera de 9,9% en 2022 à 8,1% en 2023 et à 5,5% en 2024, "soit un niveau supérieur à la moyenne de 4,9% enregistrée avant la pandémie (2017–2019)".

- Dans les pays en développement à faibles revenus, l’inflation devrait reculer de 14,2% en 2022 à 8,6% en 2024, "un niveau encore élevé, mais proche de la moyenne observée avant la pandémie", selon la même institution.

Conclusion : avec la flambée des prix des produits agricoles au Maroc, la persistance de l’inflation au niveau mondial, et notamment chez nos partenaires commerciaux, nous sommes encore loin d’être sortis de l’auberge. Le tout avec des facteurs de risque qui peuvent aggraver davantage la situation, comme le note le FMI :

"La persistance de la pénurie de main-d’œuvre pourrait se traduire par une hausse des salaires plus forte que prévu. Des prix du pétrole, du gaz et des denrées alimentaires plus élevés par rapport aux prévisions, en raison de la guerre en Ukraine ou d’une reprise plus rapide de la croissance en Chine, pourraient à nouveau provoquer une hausse de l’inflation globale et se répercuter sur l’inflation sous-jacente. Une telle évolution pourrait entraîner un désancrage des anticipations d’inflation et nécessiter des politiques monétaires encore plus strictes", alerte l’institution monétaire.

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