Déficit budgétaire : le Maroc fera mieux que prévu dans la loi de finances

C’est ce que nous affirme une source sûre qui avance que l’État finira l’année sur un déficit inférieur aux 5,9% anticipés dans le Budget 2022. Si cette prévision se réalise, ce sera une performance assez notable au cours d'une année où des dépenses inattendues ont été engagées et où le dénominateur PIB a régressé par rapport à ce qui était prévu.

Déficit budgétaire : le Maroc fera mieux que prévu dans la loi de finances

Le 31 août 2022 à 16h35

Modifié 31 août 2022 à 17h06

C’est ce que nous affirme une source sûre qui avance que l’État finira l’année sur un déficit inférieur aux 5,9% anticipés dans le Budget 2022. Si cette prévision se réalise, ce sera une performance assez notable au cours d'une année où des dépenses inattendues ont été engagées et où le dénominateur PIB a régressé par rapport à ce qui était prévu.

  • Les dépenses supplémentaires générées par la crise se sont élevées à 30 milliards de DH.
  • Les financements innovants atteindront le double des prévisions initiales.
  • Les recettes fiscales en forte hausse.

La loi de finances entrée en vigueur en début d’année prévoyait un déficit budgétaire de 5,9%, en amélioration par rapport au déficit enregistré en 2021 qui s’est fixé selon les chiffres officiels de la Trésorerie générale du Royaume à 6%.

Ce niveau de 5,9% était déjà considéré comme élevé par rapport aux engagements du Royaume de revenir graduellement à des niveaux de déficit acceptables sur les années 2022, 2023 et 2024. Et ce, malgré les grandes progressions anticipées dans les recettes fiscales, notamment celles de l’IS qui devaient croître selon les prévisions de la loi des finances de 35%.

La prévision du déficit a même été revue à la hausse au milieu de l’année, après le déclenchement de la guerre en Ukraine qui a impacté à la hausse le coût de toutes les matières premières importées par le pays ; principalement le gaz et le charbon que l’Etat subventionne directement, dans le cas du gaz butane, et indirectement, dans le cas du charbon utilisé pour la production d’électricité.

Ceci a poussé Bank Al-Maghrib, lors de son dernier conseil trimestriel de juin, à émettre une prévision de déficit de 6,3%, prenant en compte le surplus de dépenses que l’Etat a dû engager pour amortir le choc sur les prix de l’électricité et du gaz, ainsi que les aides octroyées aux transporteurs pour couvrir une partie de la hausse des prix du gasoil. Un surplus de dépenses estimé par le gouvernement à plus de 30 milliards de dirhams ; soit deux points de PIB, rappelle notre source.

Le contexte international, qui a lourdement impacté les équilibres sur le marché interne et, par ricochet, les dépenses publiques, plaidait ainsi pour un creusement du déficit budgétaire. Mais il n’en est rien finalement, comme nous le confie notre source, qui affirme que le déficit réel sera inférieur à celui projeté dans la loi de finances. Celle-ci avait pourtant été conçue bien avant la hausse vertigineuse des cours des matières premières et des dépenses de compensation et de soutien à l’ONEE, aux transporteurs et aux opérateurs du tourisme.

La crise inflationniste a impacté les dépenses, mais a profité également aux recettes

Par quel miracle ? D’abord, celui que les comptables appellent la règle de la partie double. Car si les chocs inflationnistes dans le monde ont agi négativement sur la partie dépenses de l’Etat, ils ont en parallèle favorisé l’expansion de plusieurs composantes des recettes publiques. A commencer par la hausse tous azimuts de l’ensemble des taxes et droits à l’importation. Un effet mécanique de la hausse des prix des produits, semi-produits et équipements à l’international, qui permet aujourd’hui à l’Etat de récolter plus de taxes en valeur sur les importations (hormis celles des céréales qui ont été exonérées de droits de douane en raison de la forte sécheresse qui a frappé le pays).

Même raisonnement pour la TIC et la TVA sur certains produits qui ont connu des hausses de prix sur le marché interne, les hydrocarbures à leur tête.

Et les chiffres du premier semestre sont édifiants : la TVA sur les importations a évolué de 33% durant le premier semestre, soit près du double de ce qui a été prévu dans la loi de finances.

L’IS, autre grande ressource fiscale de l’Etat, a progressé de 52% sur les six premiers de l’année, contre une prévision initiale sur toute l’année de 35%. C’est le résultat de l’effet de base, les recettes de 2021 étaient exceptionnellement basses, mais aussi des performances de certains secteurs comme celui des mines, du ciment, de la finance…

Deuxième effet bénéfique de la crise inflationniste : les recettes de monopoles liés notamment aux participations de l’Etat dans OCP Group, qui profite depuis 2021 d’un heureux effet prix qui a fortement boosté son chiffre d’affaires réalisé aussi bien sur la vente de la roche que des engrais et autres produits chimiques produits dans ses usines de Jorf Lasfar. En 2021, le groupe phosphatier a ainsi réalisé un chiffre d’affaires de 84,3 milliards de dirhams, plus de 30 milliards de dirhams par rapport à 2020, doublant son Ebitda et portant son bénéfice net à 15,5 milliards de dirhams contre 4 milliards un an auparavant. Des résultats exceptionnels qui ont poussé le conseil d’administration du groupe à décider le versement d’un dividende historique à l’Etat actionnaire d’un montant de 8,1 milliards de dirhams.

>>OCP versera à l’État un dividende historique de 8,1 milliards de dirhams

Le choc inattendu sur les dépenses publiques est ainsi amorti par ces deux éléments exceptionnels qui ont boosté de manière mécanique les recettes de l’Etat.

Financements innovants : l’État récoltera le double de ce qui a été prévu dans la LF

Mais il n’y a pas que ça. Face à l’envolée des dépenses, l’Etat a activé de manière vigoureuse le mécanisme des financements innovants afin de se donner les marges nécessaires pour boucler l’année sans trop de dégâts et, surtout, sans exploser son endettement.

La loi de finances prévoyait des recettes au titre de ces financements de l’ordre de 12 milliards de dirhams. Rien que sur les sept premiers mois de l’année, ces financements ont rapporté à l’Etat plus de 10 milliards, selon une note de recherche publiée ce 29 août par Attijari Global Research. Et l’on cible, selon nos sources, un total de 20 milliards à fin décembre, grâce à des cessions d’actifs étatiques à des institutionnels, contre le versement par l’Etat de loyers annuels avec une belle prime de rendement à la clé.

>>Les financements innovants soulagent le Budget mais pèsent sur les taux obligataires

Résultat : l’Etat va réussir, selon les données actuelles et si rien ne change d’ici la fin de l’année, à couvrir non seulement le surplus de dépenses produit par le choc inflationniste sur les matières premières et énergétiques, mais à réaliser, comme le soutient notre source, un déficit budgétaire inférieur à celui sur lequel il tablait lors de la préparation de sa loi de finances fin 2021.

Et les chiffres de la comptabilité publique au premier semestre appuient cette orientation. Si les dépenses ordinaires ont augmenté de 9,6% à fin juin (à 198 milliards de dirhams), les recettes ordinaires du Trésor ont atteint 172 milliards en hausse de 25% par rapport à la même période de l’année dernière. Un taux de progression qui est également supérieur à celui prévu dans la loi de finances, le taux de réalisation des recettes par rapport à ce qui a été budgétisé a atteint 66% sur le premier semestre, comme le signale la note de l’organisme de recherche d’Attijariwafa bank. Le déficit enregistré à fin juin s’est fixé ainsi à 25,6 milliards, en retrait de 17 milliards par rapport à la même période de l’année dernière.

S’il baisse en valeur par rapport à ce qui était prévu, le déficit budgétaire connaîtra également un soulagement en pourcentage de PIB. Ce qui est également une performance notable. Car si la prévision initiale d’un déficit de 5,9% s’appuyait sur une croissance du PIB de 3,5%, ce dénominateur baissera à moins de 2% selon les prévisions du gouvernement et à 1% selon Bank Al-Maghrib.

Des données qui plaident, comme l’espèrent les pouvoirs publics, pour une amélioration de la note souveraine du Royaume qui pourrait, selon nos sources, récupérer son investment grade début octobre. Cela permettrait à l’Etat de combler son déficit de financement, estimé actuellement à 101 milliards de dirhams à des conditions avantageuses, notamment sur la composante extérieure sur laquelle il misait dans son Budget 2022 sur une levée de 4 milliards de dollars.

>> Le Maroc espère récupérer son investment grade début octobre 

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