L’industrie au Maroc peine à se financer auprès des banques

Si l’encours global du crédit bancaire a connu une accélération de 5,1% au 1er semestre 2019, celui du secteur industriel a enregistré une baisse de plus de 4%. Cela reflète-il une baisse de la demande de crédits ou bien des conditions d'octroi plus strictes ? En tous les cas, cette tendance qui n’est pas nouvelle souligne la difficulté pour le Maroc de réindustrialiser son économie.

L’industrie au Maroc peine à se financer auprès des banques

Le 1 août 2019 à 13h37

Modifié 11 avril 2021 à 2h43

Si l’encours global du crédit bancaire a connu une accélération de 5,1% au 1er semestre 2019, celui du secteur industriel a enregistré une baisse de plus de 4%. Cela reflète-il une baisse de la demande de crédits ou bien des conditions d'octroi plus strictes ? En tous les cas, cette tendance qui n’est pas nouvelle souligne la difficulté pour le Maroc de réindustrialiser son économie.

Entre juin 2018 et juin 2019, l’encours des crédits bancaires a augmenté de 43,4 milliards de DH pour franchir la barre des 900 milliards de DH, tel qu’il ressort des dernières statistiques monétaires de Bank Al-Maghrib.

Cette manne de nouveaux crédits a profité à l’agriculture (+4,5 milliards) mais surtout au secteur tertiaire (+50 milliards), dont :

- les ménages sous formes de crédits immobiliers et à la consommation (+14 milliards),

- les sociétés financières (+15 milliards),

- le commerce/réparation automobile/articles domestiques (+4,6 milliards),

- les transports et communications (+1 milliard),

- les administrations locales (+2 milliards),

- Divers activités de services (+15 milliards).

Le secteur secondaire a, lui, perdu 11,8 milliards de DH de financements bancaires, dont

- 6,4 milliards en moins pour l’électricité, gaz et eau,

- 4,9 milliards en moins pour les industries extractives et manufacturières,

- 500 MDH en en moins pour le BTP.

L'industrie ne capte que 9% des crédits bancaires contre 12% il y a 5 ans

La tendance au ralentissement ou à la baisse des crédits bancaires au secteur secondaire et aux activités industrielles n’est pas nouvelle.

Il y a 5 ans, en juin 2014, les financements bancaires du secteur secondaire totalisaient 246 milliards de DH, soit plus que les 243 milliards de juin 2019. Ils avaient chuté à 232 milliards en 2017 avant de se redresser.

Pour les industries manufacturières, l’on est passé d’un encours de 91 milliards de DH en juin 2014 à 83 milliards de DH en juin 2019.

Les crédits bancaires à l’industrie ne représentent ainsi que 9% de l’ensemble des crédits contre 12% il y a 5 ans. Ils sont constitués à hauteur de 56% de crédits de trésorerie et seulement de 23% de prêts à l’investissement.

Les investissements industriels sont rarement financés à 100% par fonds propres. On peut donc considérer que l’évolution des crédits bancaires au secteur reflète celle de ses investissements.

Les annonces contrastent avec la réalité

Cette situation contraste avec les nombreuses annonces publiques et privées du lancement de plusieurs projets d’investissements dans l’automobile, l’aéronautique et autres au cours des dernières années.

C’est que dans l’industrie, il n’y a pas que l’automobile et l’aéronautique. Il y a aussi les filières traditionnelles comme l’agroalimentaire, le textile, la métallurgie et la chimie.

Lors de sa dernière sortie médiatique, Ahmed Lahlimi, Haut-Commissaire au plan, avait critiqué la concentration des efforts sur les seules filières de l’automobile et l’aéronautique et "l’abandon" de certaines activités industrielles historiques qui, selon lui, ont le potentiel de générer une valeur ajoutée et des créations d’emplois importantes.

Moins de crédits pour le textile, la chimie...

Pour les industries alimentaires, les financements demeurent en hausse, passant de 26 milliards à 30 milliards au cours des cinq dernières années. Mais le secteur a bénéficié en 2017 de la signature d’un contrat-programme pour son développement avec une enveloppe de 12 milliards de DH. A aujourd’hui, aucune annonce n’a été faite sur l’exécution du contrat-programme et les résultats se font attendre.

Pour le textile, l’on est passé de plus de 10 milliards de DH de crédits bancaires en 2009-2010 à seulement 6 milliards aujourd’hui. Le secteur est signataire de contrats de performance pour le développement d’écosystèmes dans le cadre du Plan d’accélération industrielle. Les résultats sont certes au rendez-vous, mais les professionnels du secteur dénoncent toujours un accès difficile au financement bancaire. Ils ont même formulé des propositions pour régler cette problématique.

Pour la Chimie, l’on est passé de 15 milliards de DH de crédits en 2012 à 10 milliards de DH aujourd’hui. Le secteur est également signataire de contrats de performance dans le cadre du PAI. Leur exécution vient à peine de démarrer, avec la Banque Populaire comme partenaire financier.

Pour l’industrie métallurgique, les financements stagnent depuis 2016 aux alentours de 19 milliards de DH. Le secteur qui compte plusieurs entreprises en difficulté (Buzichelli, DLM, Maghreb Steel…), fait face au dumping étranger et les mesures de protection instaurées ne sont pas dans l’intérêt de tout le monde.

Pour tout ce qui reste comme industries manufacturières, les crédits sont passés de 26 à 16 milliards de DH au cours des cinq dernières années. Ce qui montre que le problème est général.

L'industrie ne pèse que 15,7% du PIB contre un objectif de 23% en 2020

On ne sait pas si cette tendance est due au fait que les banques ont durci les conditions d’accès aux financements en raison de la sinistralité de plusieurs gros clients ou au fait qu’il y a de moins en moins de demandes et de projets d’investissements, ou bien les deux à la fois.

Lors des rencontres entre les entrepreneurs et les banquiers, les explications divergent toujours.

Mais ce qui est sûr, c’est que le Maroc peine à réindustrialiser son économie, seule solution pour atténuer son déficit extérieur et créer des emplois.

Alors que le gouvernement veut atteindre une part industrielle dans le PIB de 23% à l’horizon 2020, l’on était toujours à 15,7% en 2018, soit à deux ans de l’échéance du Plan d’accélération industrielle.

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