Affaire du “Go-Fast” mitraillé par la Marine: ce que l'on sait

ROUND UP. Mardi 25 septembre 2018, l’interception d’un “Go-Fast“ qui quittait la région de Sebta et entrait dans les eaux marocaines du côté de Fnideq s’est soldée par un décès et trois blessés. 48 heures plus tard, que sait-on de cette intervention? que disent les lois maritimes dans ce domaine? Voici des éléments de réponse.

Affaire du “Go-Fast” mitraillé par la Marine: ce que l'on sait

Le 27 septembre 2018 à 15h39

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

ROUND UP. Mardi 25 septembre 2018, l’interception d’un “Go-Fast“ qui quittait la région de Sebta et entrait dans les eaux marocaines du côté de Fnideq s’est soldée par un décès et trois blessés. 48 heures plus tard, que sait-on de cette intervention? que disent les lois maritimes dans ce domaine? Voici des éléments de réponse.

Ce mardi 25 septembre, un “Go-Fast“ quitte les eaux de Sebta. Sa trajectoire laisse penser qu’il prend le large en passant par les eaux marocaines côté Fnideq.

Il est immédiatement “logé“ par un patrouilleur de la Marine royale. Selon une source généralement bien informée des questions navales, il s’agissait d’une unité garde côtière, une vedette rapide RPB 20. Attention, cette partie militaire est publiée par nos soins avec des réserves car la source n'est pas officielle.

Notre source précise qu’elle “n’était pas armée, mais que l’officier qui la commandait avait une arme individuelle, un fusil d’assaut M16“. Elle précise que “les unités de la Garde côtière ne sont pas armées“.

Ces unités qui ne sont pas armées sont donc, selon les milieux de la Marine, parfois victimes de tirs de la part de “Go-Fast“ qui savent justement qu’elles ne le sont pas. Le jeune officier qui commande - il a le grade de capitaine - a été victime à deux reprises par le passé de tirs de “Go-Fast“ qui ont, selon notre source, mis sa vie en danger.

Dès que le “Go-Fast“ a violé les eaux marocaines, le capitaine a selon notre source, "respecté les consignes d’usage". Dans le cadre des sommations, il a tiré sur l’embarcation où “il ne voyait que le pilote et le copilote" selon cette version. Nous précisions que cette source n’est pas officielle.

"Ce tir de sommation en rafale sur la coque de l’embarcation", ajoute notre source, a grièvement blessé la jeune femme qui est par la suite décédée à l’hôpital de Mdiq et a blessé trois passagers dont un grièvement. Ce passager a été transporté à Rabat pour amputation.

Selon les déclarations de l'un des rescapés, les candidats à l'émigration clandestine sur le "Go-Fast" étaient au nombre de 18. Auxquels il faut ajouter les passeurs et le pilote de l'embarcation. Ils étaient couchés au fond de l’embarcation selon une source non officielle.

Ces 18 passagers, tous marocains selon notre source, étaient allongés à l'intérieur du bateau, donc "difficilement visibles" lorsque "la Marine royale a dû faire usage de la force après plusieurs sommations auxquelles le conducteur a refusé d'obtempérer".

Selon ce rescapé, les 18 passagers ont été embarqués à proximité de Sebta dans le lieu appelé "Kantra".

L'objectif du bateau intercepté était d'acheminer les passagers jusqu'aux côtes espagnoles. Selon une source sécuritaire, il s'agit probablement d'un réseau de passeurs qui a organisé cette expédition. Une fois arrivés en territoire espagnol, les candidats appellent leurs proches pour demander un paiement. Il s'agit donc selon ces explications, d'un réseau présumé avec des ramifications dans les deux pays.

L'embarcation et le pilote espagnol ont été acheminés à Mdiq sous supervision de la Marine royale.

Le pilote du “Go Fast“: 25 crimes, huit délits et 16 arrestations

Europa Press a dévoilé ce mercredi 26 septembre l'identité du pilote espagnol du "Go-fast", arrêté mardi 25 septembre.

Le pilote espagnol, J.D.Q., a à son actif, 25 crimes, huit délits et 16 arrestations.

Il a également été impliqué dans une affaire de violence sexuelle.

Le gouvernement espagnol est en contact direct avec l'ambassadeur espagnol à Rabat et le consul général espagnol à Tétouan pour rassembler toutes les informations nécessaires sur l'incident, ajoute Europa Press, citant des sources du ministère espagnol des Affaires étrangères. 

La Marine a-t-elle le droit de tirer sur un bateau d’émigration clandestine ?

Médias24 a sollicité une spécialiste pour connaître les règles internationales en ce domaine. Il s’agit de Kiara Neri, maître de conférences HDR en droit international à l’Université Jean Moulin Lyon 3.

Voici sa réponse :

1.    “Les Etats ont le droit de conduire des opérations de police de l'immigration dans leur mer territoriale et dans leur zone contigue, mais pas au-delà.

“Le fait que le navire transportait des migrants fait de cette opération une opération de police de l'immigration, qui n'est autorisée que dans certaines zones maritimes. [NDLR : on ne sait pas, à ce stade, si l’auteur des tirs avait conscience du fait qu’il s’agissait d’une embarcation de migrants ou s’il pensait avoir affaire à une embarcation de drogue].

2.    “Lorsque l'Etat côtier exerce un pouvoir de police, il doit, selon le droit de la mer (Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, ratifiée par le Maroc en 2007, donc obligatoire pour lui), "éviter les conséquences néfastes que peut avoir l'exercice de leurs pouvoirs de police " (art. 225). 

3.    “Par ailleurs, le Tribunal international du droit de la mer (T.I.D.M.) a eu l'occasion de dire que "l'usage de la force doit être évité autant que possible et que, lorsque le recours à la force s'avère inévitable cela ne doit pas dépasser ce qui est raisonnablement requis en la circonstance. Les considérations d'humanité doivent s'appliquer dans le droit de la mer, comme dans les autres domaines du droit international". T.I.D.M., Affaire du navire « MV Saiga » no 2, (Saint-Vincent-et-les-Grenadines c. Guinée), 1er juillet 1999, Affaire no 2, § 155. 

4.    “Il existe une procédure coutumière en droit international pour l'emploi de la force en mer : Emettre un ordre sonore ou visuel de stopper, en utilisant des signaux reconnus internationalement. Si cela s'avère insuffisant, le T.I.D.M. reconnaît que certaines mesures peuvent être adoptées, y compris des coups de feu tirés par-dessus l'étrave du navire.

5.    “C'est uniquement lorsque ces mesures s'avèrent inefficaces “que le navire poursuivant peut, en dernier ressort, faire usage de la force. Même dans un tel cas, un avertissement adéquat doit être émis en direction du navire et tout doit être mis en œuvre pour veiller à ne pas mettre de vie en danger“. Et dans tous les cas l'usage de la force doit être PROPORTIONNE.

6.    “Il existe des précédents d'emploi de la force dans des opérations de police en mer qui ont conduit à des décès et à la saisine d'un Tribunal, notamment l'affaire Saiga évoquée plus haut (dans les eaux de la Guinée- c'était une question de pêche) et l'affaire Enrica Lexie (des militaires italiens ont tiré sur un navire de pêche au large de l'Inde en pensant qu'il s'agissait d'un navire pirate, tuant deux pêcheurs).

7.    “Dans ces précédents, il ne s'agissait pas de migrants mais l'usage de la force a été jugé disproportionné.“

Ce qu’en dit le Forum des FAR

Sur ce forum animé par d’anciens militaires ainsi que par des passionnés, plusieurs posts prennent la défense de la Marine royale. On y lit la confirmation que les unités garde-côtières ne sont pas armées. La page du forum demande d’ailleurs qu’elles le soient dorénavant, “au moins par des 12.7 ou des 14.5 mm.

Hayat, la jeune fille de 20 ans, décédée dans l’opération

Hayat n’avait pas bouclé ses vingt ans. Elle faisait partie d’une fratrie de six enfants, dans une famille démunie de Tétouan. Ses proches ont été avisés de son décès le mardi 25 septembre. Elle a été inhumée le lendemain, mercredi 26 septembre.

Sa grand-mère, sous le choc, décrit une jeune fille tranquille, suivant des études de droit, aspirant à réussir sa vie et qui avait depuis quelques temps, des plans d’émigration avec un groupe de connaissances.

Des propos poignants que l’on peut visionner sur la vidéo ci-dessous:


 

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