Le think tank de Safir dissèque les maux de Casablanca

«Casa, Lieu de vie», un des groupes du think tank créé par Khalid Safir, a rendu sa copie. Un rapport de 120 pages basé sur six axes: l’urbanisme et le logement, la sécurité, la santé, la mobilité, les services administratifs et l’environnement. Les détails.

Le think tank de Safir dissèque les maux de Casablanca

Le 27 septembre 2014 à 17h35

Modifié 11 avril 2021 à 2h36

«Casa, Lieu de vie», un des groupes du think tank créé par Khalid Safir, a rendu sa copie. Un rapport de 120 pages basé sur six axes: l’urbanisme et le logement, la sécurité, la santé, la mobilité, les services administratifs et l’environnement. Les détails.

Un mois après sa nomination, le wali Khalid Safir avait exposé ce qu’il comptait faire pour la ville. D’abord, la doter d’une vision et d’une stratégie. Il s’agit d’une vision Casablanca 2020. Il avait également expliqué que sa démarche allait être participative, “impliquant l'ensemble des acteurs concernés, dont les conseils élus, les administrations et institutions publiques, les universités, les opérateurs économiques et les intellectuels, la société civile et les représentants de partis politiques et de syndicats“.

Après avoir dit ce qu’il allait faire, il a donc fait ce qu’il a dit. On remarquera toutefois que si la démarche est participative et donc légitimée par l’implication de la plupart des acteurs, elle procède d’une initiative de l’autorité et dépossède les élus d’une partie de leur rôle et de leurs responsabilités.

600 personnes ont travaillé donc sur la stratégie qui a donné lieu au plan de développement de Casablanca 2015-2020. Le think tank a fonctionné sous forme de huit groupes de travail. Ci-après, les constats et les conclusions du groupe “Casa, lieu de vie“.

Déficit en logements, insalubrité, bouchons,  mauvaise gestion des déchets, manque d’espaces verts… C’est un tableau bien sombre que vient de brosser le groupe de Mustapha Mellouk pour la métropole. De la santé à la mobilité, en passant par l’urbanisme et l’environnement, le bilan fait ressortir des chiffres inquiétants.

Urbanisme, logement: manque de “hauteur de vue“

Aussi étrange que cela puisse paraître, il existe encore 160.000 foyers casablancais non raccordés en eau courante.

Plus inquiétant encore: le nombre de ménages résidant dans l’habitat vétuste et menaçant ruine s’élève à 72.000, et 21.000 dans les bidonvilles. Le tout avec un déficit en logements de 30.000 ménages par an à l’horizon 2030 et seulement 1m²/habitant d’espaces verts, contre 10m² nécessaires selon l’OMS.

«Les quartiers périphériques sont enclavés et déconnectés du centre (déficit en termes d’offre d’infrastructures de loisirs, culturelles et sportives, de commerce et de transport)», soutient le rapport.

Les principales mesures proposées: réhabiliter les habitations menacées de délabrement ou de ruine et poursuivre le développement de l’offre de logements sociaux en l’inscrivant dans une démarche de mixité. Tout en respectant le ratio de 70% pour l’habitat moyen et haut standing et de 30% pour l’habitat social.

Pour réduire la pollution, le groupe suggère «le transfert des activités industrielles en dehors de la ville», en imposant un seuil de 10 m² de surface plantée par habitant, ce qui exigera l’amendement du Dahir 12/92.

Ville à mobilité réduite

Question circulation, il est de notoriété publique que la métropole est la ville la plus chaotique du Maroc: des embouteillages à tout bout de champ où se mêlent, dans une cacophonie déconcertante, bicyclettes, motos, bus, voitures et poids lourds…

En ce sens, le rapport bouscule les préjugés, car sur les 11 millions de déplacements quotidiens, 5,8 millions sont des piétons, soit 53 % du trafic.

Les voitures individuelles et le transport collectif constituent, respectivement, 15 et 16 % du trafic.

Autant le dire, le diagnostic est accablant :

-          Insuffisance et vétusté des véhicules (bus, taxis)

-          Absence d’une offre multimodale (bus, métro, tramway, train)

-          Insuffisance de desserte des zones périphériques par le transport interurbain

-          Voies de circulation et chaussées en mauvais état/offre de stationnement insuffisante/signalisation insuffisante

-          Plan de déplacement urbain datant de 2006, aujourd’hui caduc

-          Non spécialisation des voies de circulation par type de véhicule

-          Circulation des pieds lourds peu régulée

-          Non respect du code de la route et incivisme des usagers, inefficience des sanctions

Pour y remédier, le comité propose, d’abord, de moderniser l’offre du transport en commun. Comment? En mettant à niveau, techniquement, les bus. Quant aux taxis, petits et grands, ils devraient être équipés de GPS.

Ce ne sera qu’un début, car il faudrait, selon le groupe, restructurer tout le transport urbain : acquisitions de bus, extension du tramway, révision du réseau ONCF… métro (dont le projet a été récemment abandonné).

Réguler le trafic, voilà l’autre urgence dont les responsables de la ville devraient prendre conscience. Le groupe de Mustapha Mellouk n’a pas manqué de s’y intéresser en formulant une demi-douzaine de propositions.

Pour ce qui est des véhicules de tourisme, il est préconisé de mettre en place un poste central de gestion de la circulation: développement des parkings en milieu urbain, construction de parkings-relais en périphérie incitant les automobilistes à utiliser les transport en commun pour aller au centre ville, mise en place d’un modèle de gestion unique du stationnement à l’échelle de la ville.

 Dans le même registre, le groupe propose une régulation de la circulation des poids lourds par la délimitation des zones et horaires de circulation et la mise en place d’un système de transport intelligent pour la diffusion en temps réel d’une information sur l’état du trafic.

                                                      Environnement, le ver est dans le fruit

«Ville blanche», un bel oxymore! Et ce sont les chiffres, ceux du think tank, qui le disent: un million de tonnes par an de déchets ménagers et 1.035 tonnes de déchets industriels, médicaux et pharmaceutiques dangereux. Le tout pour seulement trois décharges publiques. Les espaces verts? Moins d’1m² pour chaque habitant, alors que l’OMS fixe le seuil à 10 m². Et au lieu de se rétrécir, le gap continue de grandir.

Mais les déchets et le manque d’espaces verts ne sont pas les seuls malheurs des Casablanca. Le pire pourrait venir de l’Oued Bouskoura à cause du manque d’infrastructures pour maîtriser les crues. Et, pour ne rien arranger, la ville n’est dotée d’aucun plan de prévention des risques, et encore moins de structures d’abris pour les citoyens.

Bref, il y a péril en la demeure. Le Conseil de la ville, imposant de nouvelles exigences en matière de gestion des déchets, a renouvelé les contrats avec Averda et Sita pour la période allant de mars 2014 à février 2021: 485 millions de DH investis dans plus de 300 véhicules en tous genres, entrés en services le 4 septembre! Un investissement nécessaire mais loin d’être suffisant.

En effet, pour «Casa, Lieu de vie», une nouvelle décharge contrôlée doit être créée à Casablanca. D’autres mesures ont été proposées, comme le tri des produits dangereux par les professionnels, la valorisation des déchets, la formation d’une brigade de surveillance ou encore la clôture des terrains nus.

Santé, le grand corps malade

Les indicateurs sont encore une fois inquiétants: 9,1 lits hospitaliers pour 10.000 habitants, contre 14,7 à Rabat… 53 à Tunis.

Pareil pour le nombre de médecins, qui ne dépasse pas 13 pour 10.000 habitants contre 38 à Tunis. L’indéboulonnable médecine à deux vitesses a encore de beaux jours devant elle: difficulté de transport pour la population pauvre ou vulnérable, répartition déséquilibrée des populations desservies, répartition inéquitable du personnel médical et paramédical, inadéquation entre ressources humaines, locaux et équipements, notre le rapport.

Les principales mesures proposées: améliorer le service offert aux patients au sein des établissements de soins publics, réorganiser la prise en charge des urgences, mettre à niveau les infrastructures de soins existantes, créer de nouvelles infrastructures de soins, positionner le CHU Ibn Rochd en tant qu’organe majeur dans le domaine de la santé au Maroc du Grand Casablanca.

Sécurité

2 homicides, 135 braquages et 233 larcins par 100.000 habitants. Cela n’inclut pas bien entendu les délits non signalés par les victimes. Les effectifs d’agents policiers par 1.000 habitants ne dépassent pas 2,6 , contre 7 à Tunis ou encore 5 à Alger.

La métropole compte trois centres pénitenciers et 14.657 détenus – pour des affaires liées, dans 80% des cas, à la drogue-, soit 357 détenus pour 100.000 habitants, alors que la moyenne nationale est de 190. Rien que la prison d’Oukacha  abrite quelque 8.522 détenus pour 4.800 places, ce qui correspond à un taux d’occupation de 177 %!

Les propositions: Atteindre un taux de plaintes déposées/délits équivalent à la moyenne européenne, baisser le taux GINI (Inégalités) de Casablanca en dessous de 0,35, atteindre le taux de 3,6 agents de sécurité publique pour 1.000 habitants, disposer d’un centre de désintoxication dans chaque préfecture, avoir un service d’appel d’urgence performant avec un temps d’intervention inférieur à 10 minutes et baisser sensiblement le niveau de corruption des services de sécurité.

Services administratifs

Qualité de services insuffisante, manque de transparence sur les procédures, manque d’équipements… ce sont en substance les maux qui nuisent à la relation entre le Casablancais et « son » administration.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

A lire aussi


Communication financière

CTM : Avis de convocation à l'AGO du lundi 10 juin 2024

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.