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«Les femmes ont besoin de la politique, et la politique a besoin des femmes»

Critique et combative. A moins de 15 jours de l’ouverture du 9e congrès du Parti du progrès et du socialisme, Nouzha Skalli se jette dans la bataille élective.

«Les femmes ont besoin de la politique, et la politique a besoin des femmes»

Le 19 mai 2014 à 17h46

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

Critique et combative. A moins de 15 jours de l’ouverture du 9e congrès du Parti du progrès et du socialisme, Nouzha Skalli se jette dans la bataille élective.

Elle souhaite continuer sa lutte pour les droits des femmes et la parité et élargir les bases de l’ancien Parti communiste aux jeunes marocains.

Nouzha Skalli estime que sa candidature est "naturelle" car au sein des huit partis les plus importants au Parlement aujourd’hui, indique-t-elle, "jamais une femme ne s’est présentée à ce poste". Elle juge le moment "bon" en raison des déséquilibres sociaux à combattre mais aussi parce qu’elle a accumulé "une longue expérience politique en tant que conseillère municipale à Casablanca, ministre, et aujourd’hui député et membre de la commission de la justice".

Née en 1950 à El Jadida, Nouzha Skalli adhère au PPS à l’âge de 19 ans alors qu’elle poursuit ses études à Montpellier (France).

Pharmacienne de formation, elle a occupé le poste de ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité de 2007 à 2012. A ce titre, elle a pu mesurer la difficulté à faire avancer des réformes sociétales et favorables aux femmes. Au sein du gouvernement Abbas El Fassi, elle aura défendu, en vain, le droit à l’avortement sous certaines conditions.

Craintes sur le statut des femmes

Ce qui motive aujourd’hui sa candidature, indique-t-elle à Médias 24 au cours d’un long entretien téléphonique, ce sont ses "craintes sur le statut de la femme". Au départ opposée à la participation de son parti à une coalition gouvernementale menée par le Parti de la justice et du développement (PJD) d’Abdelilah Benkirane, elle s’y résoudra "pour sortir par le haut de l’instabilité née des manifestations du Printemps arabe et pour consolider le nouveau cadre constitutionnel" suite au référendum du 1er juillet 2011. "Ma candidature n’est ni contre quelqu’un ou quelque chose, juge-t-elle bon de préciser. C’est une candidature pour quelque chose de différent, pour défendre et promouvoir nos valeurs".

Aujourd’hui, un peu plus de deux ans après la formation du premier gouvernement Benkirane en janvier 2012, puis du deuxième, en l’automne 2013, elle continue de signaler "les manques dans la lutte contre la corruption" et déplore que "rien n’a été fait sur le statut des femmes".

Skalli cite le fameux article 19 de la Constitution de 2011 qui stipule entres autres que "l’Etat œuvre à la réalisation de la parité entre les hommes et les femmes", l’article prévoyant même la création d’une APALD, une Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination. Une loi organique doit notamment poser le cadre du fonctionnement de la future APALD, une disposition constitutionnelle peu connue du public.

Femme de gauche, politisée, diplômée bac +7, Skalli est, on s’en doute, intarissable sur l’injustice du statut de la femme notamment sur le mariage des mineurs, l’héritage ou la possibilité de voyager dans certains Etats comme les Emirats arabes unis ou l’Arabie saoudite. Elle compare "la place des femmes dans la vie parlementaire au Maroc en 2011: 78e rang sur 150 Etats; et en 2013, 87esur 150". "Au Sénégal, ajoute-t-elle, les femmes constituent 43% des parlementaires ; elles sont 28% en Tunisie et 17% au Maroc". "Dans la haute administration, assène-t-elle, on trouve seulement 15% de femmes et sur 140 nominations faites selon les dispositions de la nouvelle constitution depuis 2012, seules 16 concernent des femmes".

"On n’a jamais autant baigné dans un tel discours péjoratif à l’égard des femmes"

"On n’a jamais autant baigné dans un tel discours péjoratif à l’égard des femmes, déplore-t-elle ; au Parlement, dans les réunions, on entend des mots humiliants. Il faut constamment défendre ce qui est acquis et lutter pour conquérir une véritable parité et une véritable justice dans le traitement". "Nous n’avons encore aucun texte sur les violences domestiques et conjugales", rappelle-t-elle.

Sur le plan politique, elle regrette le retard pris sur les lois organiques. Elle reconnaît que politiquement "ce n’est pas facile". Aujourd’hui, seules cinq ont été passées, cinq autres sont en discussion alors qu’il en reste plus de 10 autres à rédiger, négocier et faire passer dont la loi organique sur la régionalisation.

Quant au nouveau code de procédure pénale, présenté par la presse, "il n’a pas encore été discuté au sein de la commission de la justice", indique-t-elle.

Lors du 9e congrès du PPS qui s’ouvrira le 30 mai prochain ce sont près de 450 membres du comité central qui choisiront le –ou la- prochain(e) secrétaire général(e) du parti. Parmi les autres candidats déclarés figurent l’ancien secrétaire d’Etat Saïd Saadi farouche opposant de l’actuel SG et ministre de l’Habitat Nabil Benabdellah. Avec NouzhaSkalli, M’hammed Grine, Abdehafid Oualalou et Aziz Eddrouche sont les trois autres candidats déclarés.

Sur la préparation du congrès Nouzha Skalli déplore beaucoup de couacs. "Cela ne se passe pas bien partout", indique-t-elle avec franchise. "Les échos qui nous parviennent des régions font état de violences, de fortes contestations, de candidats parachutés et indésirables. Il y a des problèmes à Safi, à Fès et à Ain Sebaâ", notamment précise-t-elle.

Elle souhaite un PPS qui fonctionne mieux, un parti ouvert aux jeunes femmes et aux jeunes hommes et "sans section féminine, signe de sexisme". Si elle juge son parti "grand par ses idées, ses idéaux et ses analyses", elle souhaite qu’il cesse d’être un parti élitiste. "On en a assez, indique-t-elle, d’un parti qui brille par son élite et reste petit par sa taille et sa base populaire, l’un des plus petits de l’actuelle coalition".

Interrogée sur les atouts et les "boulets" du Maroc, elle cite "sa jeunesse et sa position géostratégique, son ouverture linguistique et son positionnement entre l’Afrique et l’Europe, l’Orient et l’Occident". Parmi les boulets, elle cite l’analphabétisme et un niveau culturel qui ne permet pas une intégration aisée des valeurs de la nouvelle constitution et la nécessité de la lutte contre la corruption.

"Les femmes ont besoin de la politique et la politique a besoin des femmes"

C'est l’un de ses mots d’ordre préféré. "J’aime bien rappeler cela", indique la militante politique.

Nouzha Skalli pense que les femmes ont besoin de la politique "pour les défendre, défendre leurs droits et ceux de leurs enfants pour l’éducation, la santé et la sécurité notamment". Et la politique a besoin des femmes "parce que, juge-t-elle, celles-ci lui apporte leur expérience de fille et de mère proches réalités de la vie quotidienne, au foyer et dans la vie active".

La hantise de Nouzha Skalli, ce serait une démocratie sans participation: "elle peut vite se transformer en dictature", avertit-elle. A la fin du mois de mai prochain lors du vote du comité central, Nouzha Skalli sera la seule candidate au poste de SG face à cinq ou six hommes. Un combat éternellement recommencé. Et déterminé.

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