Pour un accord sur la réglementation financière transatlantique

Le 24 février 2014 à 11h17

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

Les signes d'une relation réglementaire qui bat de l'aile entre l'UE et les États-Unis semblent omniprésents. Les nouvelles réglementations fortes sur les banques étrangères de la Réserve fédérale américaine ont poussé la Commission européenne à lancer des menaces de représailles.

WASHINGTON, DC – Les avancées pour réconcilier les États-Unis et l'UE sur la question des produits dérivés (une des principales causes de la crise financière) ont été réduites à néant. Et les plans de l'UE et du Royaume-Uni pour « réserver » les dépôts aux banques sont sur le point de se différencier non seulement sur le fond et la forme, mais aussi par rapport à la nouvelle réglementation Volcker inaugurée aux États-Unis.

 

Mais la leçon que la plupart des observateurs tirent de ces querelles de plus en plus commentées (d'après laquelle même dans le domaine de la réglementation financière, les rapports de force politiques l'emportent sur le bien commun) est incomplète. Après tout, les disparités de réglementation ne sont pas simplement le produit d'intérêts nationaux divergents : la façon d'exercer et de coordonner efficacement la diplomatie peut aussi peser dans la balance.

Par exemple, une étude récente a souligné l'échec des dirigeants du G-20 à définir une feuille de route cohérente et réalisable pour appliquer l'ordre du jour des trains de réformes financières annoncés après la crise de 2008. Depuis près de dix ans, les chefs d'État ont invité les organismes de régulation à s'attaquer aux grandes questions, comme les normes de fonds propres, ainsi qu'à d'autres sujets comme les produits dérivés hors cote et les réformes des notations de crédit. Mais durant cette période, les officiels ont agi plus ou moins à leur guise, laissant des problèmes à traiter selon différents cycles économiques et politiques.

Disparités des deux cultures d'élaboration des mesures de réglementation

Des disparités radicales entre les cultures d'élaboration des mesures de réglementation aux des États-Unis et dans l'UE aggravent le problème. À la différence des États-Unis, où des agences indépendantes gèrent le processus d'élaboration des mesures de réglementation selon des préceptes édictés par le Congrès, des acteurs législatifs à Bruxelles et à Strasbourg (la Commission européenne, le Conseil de l'Europe et le Parlement européen) rédigent les ordres du jour de réglementation et les règlements. Et bien que des agences de l'UE, comme la Banque Centrale Européenne, assument une part croissante de responsabilité dans la réglementation, des divergences dans les prises de décision continuent d'affecter le rythme et la nature de la coordination transatlantique.

Plus grave encore, les réformes monétaires et du marché ont parfois fusionné, ce qui par moment a rendu l'élaboration des mesures de réglementation en partie dépendantes des décisions d'agences et d'établissements divers. Répondre aux nouvelles normes de fonds propres de Bâle III, par exemple, touche à d'autres éléments que les règlements : cela nécessite la recapitalisation des banques, soit un processus qui prend plus de temps en Europe qu'aux États-Unis, en partie parce que la zone euro a dû négocier des mécanismes de financement pour les banques et pour ses gouvernements à court d'argent. À présent ces retards suscitent des doutes aux États-Unis quant à l'engagement de l'UE dans la réforme.

Tous ces problèmes reflètent le simple fait que les décisionnaires manquent des outils appropriés pour conduire la diplomatie de réglementation dans un monde de réforme dynamique du marché. Les moyens conventionnels pour y parvenir (reconnaissance mutuelle et conformité substituée) ont été développés dans un environnement dans lequel les pays puissent se stimuler pour mettre en place des normes et proposer un accès plus facile aux étrangers aux marchés nationaux, une fois que les réglementations dans leurs pays d'origine auront calqué les leurs. Aucun mécanisme ne prévoit une situation dans laquelle tous les pays cherchent simultanément à améliorer leurs systèmes financiers dans plusieurs secteurs.

En attendant, le forum traditionnel pour des pourparlers UE/États-Unis, le Dialogue de réglementation des marchés financiers (qui réunit des organismes de réglementation à intervalles irréguliers pour négocier une à une des listes de règlementations divergentes) est trop souvent lent et évité.

Supprimer les obstacles structuraux

La bonne nouvelle est que les décisionnaires européens et américains ont des options pour supprimer les obstacles structuraux. Ils devraient commencer par développer une nouvelle « boîte à outils » pour aider les pays non simplement à répondre à des normes existantes, mais collaborer également à l'amélioration des normes dans un environnement des marchés qui évolue rapidement. Si cela est mis en application au titre d'une partie des pourparlers sur la Zone de libre-échange transatlantique ou de manière informelle, les programmes de reconnaissance mutuelle et de conformité substituée devraient être plus solides et fournir des mécanismes procéduraux pour coordonner les processus réglementaires et administratifs en temps réel. En outre, les mécanismes de coordination devraient être dans la mesure du possible des processus orientés vers des objectifs quantifiés indexés sur des engagements internationaux et de meilleures pratiques.

En conclusion, étant donné l'interface entre la surveillance financière et les relations monétaires, le dialogue de réglementation des marchés financiers devrait être rétabli parallèlement à des réunions des fonctionnaires du trésor du G-20 et des dirigeants des banques centrales. Au lieu de compter sur le Conseil de stabilité financière multi-régional pour plancher sur les différences et mettre en place un calendrier de réglementation, les organismes de réglementation de l'UE et des États-Unis devraient être encouragés à présenter des solutions communes et des réformes dans une perspective internationale élargie.

Il semble évident qu'une réforme de l'architecture de réglementation transatlantique peut apporter beaucoup à la diplomatie financière et que les intérêts nationaux seront toujours importants. Mais dans un monde de mouvements de capitaux évalués en trillions de dollars et d'enjeux plus importants encore dans un système financier mondial sain, même des améliorations modestes peuvent faire une grande différence. De meilleurs mécanismes d'élaboration de réglementation sont un bon début.

© Project Syndicate 1995–2014

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