En Bretagne, vent de fronde contre la ferme aux 12.000 cochons

(AFP)

Le 29 octobre 2022

La ferme aux 12.000 cochons sera-t-elle régularisée par le préfet? Retoquée deux fois en justice, l'extension d'une "mégaporcherie" dans le Finistère suscite une forte opposition des riverains qui dénoncent odeurs de lisier, pollution de l'air et des plages.

"Pour une agriculture à taille humaine", proclame une grande pancarte, posée au bout de la route touristique de Landunvez, petite commune du Nord Finistère connue pour sa magnifique côte sauvage.

Agglutinés autour des deux tables de camping, les promeneurs se penchent pour signer une plainte collective tandis qu'un verre de "soupe paysanne" leur est servi par un militant.

"Cet été, on n'a pas pu se baigner avec mes petits-enfants car la plage était fermée. C'est quand même désagréable", se désole Christine Douillard, retraitée de 70 ans, qui habite un lotissement au milieu des champs de maïs, où le lisier des porcs est épandu.

"A cause des odeurs, on doit rentrer nos draps qui sèchent. Sinon, on dort dans le caca!", lâche-t-elle.

"On n'est pas contre le cochon", précise son mari Roland Douillard, 71 ans, barbe blanche et bonnet noir. "Mais le problème, c'est l'excès de cochons!"

Dans leur viseur: la "mégaporcherie" Avel Vor ("vent de la mer" en breton), dont les grands silos bleus sont visibles du bourg de Landunvez, à moins de 300 mètres de là.

L'affaire divise la commune bretonne depuis qu'en 2015, le gérant Philippe Bizien a demandé à agrandir son exploitation pour passer à 12.000 porcs (une exploitation moyenne en compte 1.400 environ).

Une enquête publique est donc lancée mais le commissaire-enquêteur émet un avis défavorable à cette extension en évoquant les "nombreuses nuisances" ressenties par les riverains.

Faisant fi de cet avis, le préfet du Finistère autorise cependant l'éleveur à agrandir ses installations en avril 2016, ce que ce dernier fait dans la foulée.

C'est alors que l'affaire est portée en justice par plusieurs associations, dont Eau et Rivières de Bretagne, qui attaquent l'arrêté pour s'opposer à cette "mégaporcherie".

Plages fermées, eau dégradée, pollution de l'air: les émanations du lisier de porc risquent, selon ces opposants, de s'ajouter à celles des élevages voisins, dégradant encore un peu plus l'environnement de la commune d'à peine 1.500 habitants.

- 3.000 porcs au km2 -

Car dans ce pays du Léon, le cochon est roi: la production dépasse par endroit 3.000 porcs au km2 dans une région, la Bretagne, qui se place en sixième position européenne pour la taille de son cheptel porcin.

Avec 7,3 millions de cochons en 2021, la péninsule bretonne compte plus de la moitié du cheptel français sur seulement 5% du territoire de l'Hexagone. On compte ainsi plus de deux cochons par Breton.

"A Landunvez, on est plutôt à 10 cochons par habitant", rectifie Laurent Le Berre, président de l'Association pour la protection de la côte des légendes (APPCL).

En mai 2019 et novembre 2021, les opposants obtiennent gain de cause devant la justice administrative. Mais la porcherie est déjà agrandie et produit 27.000 porcs charcutiers par an, en vertu d'une autorisation préfectorale provisoire.

Pour régulariser la situation, une nouvelle enquête publique, menée au printemps 2022, a cette fois conclu à un avis favorable, malgré les mises en garde de l'Autorité environnementale sur les "émissions d’ammoniac globalement très élevées" des différents élevages du territoire qui contribuent à "la dégradation de la qualité de l’air par la formation de particules fines".

Le Conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) doit désormais se pencher sur le dossier avant que la décision finale ne revienne au préfet.

"Le dossier d'extension coche toutes les cases des réglementations en vigueur", estime Jean-Alain Divanac'h, éleveur de porcs et président de la FDSEA du Finistère, en dénonçant un "débat idéologique".

"Les opposants ne peuvent pas démontrer que les pollutions viennent de l'élevage Avel Vor", pointe-t-il.

M. Le Berre promet lui de nouveaux recours en cas de régularisation de l'exploitation. "Ça peut encore durer 10 ans!", lance-t-il.

Contactés par l'AFP, la préfecture et M. Bizien n'ont pas souhaité s'exprimer dans l'immédiat.

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Le 29 octobre 2022

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