Kristalina Georgieva : Il faut augmenter les dépenses publiques pour faire face à la crise

Brian Brequeville | Le 7/10/2020 à 10:23

Dans un monde « retourné » par la Covid-19, la directrice du FMI a rappelé les risques qui planent sur l’économie mondiale et a annoncé une reprise « lente, difficile et inégale ». Pour surmonter la crise, l’instance table sur une entraide globale et un fort accent sur la dépenses publique. 

 

Dans le monde, l’heure est désormais à « la longue ascension » pour le Fonds Monétaire International. Malgré des prévisions un brin plus optimistes que prévues sur la fin de l’année, Kristalina Georgieva, la directrice de l’institution annonce une reprise qui se fera de manière « lente, difficile et inégale ». Dans un contexte historique, la directrice du FMI liste les différentes menaces planant sur l’économie mondiale et les recommandations pour faire face à ce « monde retourné » par la crise actuelle, laissant planer le risque « d’une génération perdue ».

C'était à l'occasion du 125ème anniversaire de la London School of Economics (LSE), célébré mardi 6 octobre. Kristalina Georgieva est lauréate de cet établissement.

Un brin d’optimisme pour la reprise économique sur 2020

Quand elle aborde les perspectives économiques mondiales, la directrice générale du FMI se veut légèrement moins pessimiste qu’au début de la crise sanitaire. Même si elle rappelle que « 85 % de l’économie mondiale s’est trouvée confinée pendant plusieurs semaines », la forte contraction du PIB mondial initialement prévue sur cette année (-4,9% prévue en juin dernier), sera moins pire que celle imaginée. « Nous estimons maintenant que l’évolution des deuxième et troisième trimestres a été un peu meilleure que prévu, ce qui permet une modeste révision à la hausse de nos prévisions mondiales pour 2020 », souligne Kristalina Georgieva.

Pour ce qui est de 2021, si la directrice du FMI annonce que les prévisions seront disponibles à partir de la semaine prochaine, elle se prononce déjà sur une reprise « partielle et contrastée » sur l’an prochain. Ces prévisions plus optimistes que prévues découleraient notamment de l’implication des pouvoirs publics à travers le monde et des « mesures exceptionnelles » mises en place. « Les pouvoirs publics ont versé environ 12 000 milliards de dollars de soutien budgétaire aux ménages et aux entreprises. Et des mesures sans précédent de politique monétaire ont maintenu le flux du crédit, aidant des millions d’entreprises à rester à flot » rappelle la directrice du FMI.

Les inégalités face à la crise

Mais cette aide déployée pour la sauvegarde économique et sanitaire reste malheureusement fortement inégale de par le monde. « Pour de nombreux pays avancés, dont les États-Unis et la zone euro, le ralentissement reste extrêmement douloureux, mais il est moins sévère qu’attendu. La Chine enregistre une reprise plus rapide que prévu. D’autres pays sont encore en grande difficulté, et certaines de nos révisions des projections sont à la baisse » précise la directrice du FMI.  

Que cela concerne les pays comme les populations, les plus faibles seront les plus exposés. La crise a fortement aggravé les inégalités et le Fonds monétaire souligne notamment son impact disproportionné sur les femmes, les jeunes et les travailleurs non qualifiés. « Il y a manifestement des gagnants et des perdants, et nous risquons de finir dans un monde à deux vitesses. Nous devons absolument trouver une issue » signale l’instance.

Concernant spécifiquement les pays à faible revenu, le FMI rappelle que les chocs sont d'une telle ampleur « que nous faisons face au risque d’une génération perdue ». Plus exposés sanitairement, ils sont aussi dépendants de nombreuses ressources fortement réduites par la crise. « Ils sont très exposés aux secteurs les plus touchés, tels le tourisme et l’exportation de produits de base. Et ils sont très dépendants des financements extérieurs » rappelle Kristalina Georgieva.

De profondes cicatrices économiques à venir

Même si l’économie mondiale est en passe de redémarrer, le FMI estime que « cette calamité est loin d’être derrière nous » et que le monde fait désormais face à la « longue ascension » qui sera « inégale et incertaine ».

Si cette ascension pourrait être favorisée par les avancées sanitaires concernant les vaccins et les traitement face à la Covid-19, le FMI rappelle également le climat d’incertitude qui plane concernant les risques de flambées épidémiologiques. Ces incertitudes impliquent naturellement des risques important à l’échelle mondiale, notamment sur le plan socio-économique.

Le risque de faillites d’entreprises, le chômage de masse ou l’endettement des Etats suite à la décision de nouvelles mesures budgétaires exceptionnelles en font partie. « Du fait de cette perte de capacité, nous prévoyons que la production mondiale restera à moyen terme très inférieure à nos projections pré-pandémie »  annonce la directrice du FMI. Elle poursuit, « nous estimons que la dette publique mondiale atteindra un niveau record d’environ 100 % du PIB en 2020 ». Une conjoncture qui, pour le FMI, impliquera dans la quasi-totalité des pays, un retour en arrière sur l’amélioration du niveau de vie.

Faire face avec plus de dépenses publiques

Pour ce faire, la présidente du FMI liste 4 grandes priorités à suivre pour limiter la casse. Premièrement, la préservation de la santé des populations via le maintien dans les dépenses de soins. « Nous ne pourrons assurer partout une pleine reprise économique que si le virus est vaincu partout » souligne la directrice.

Deuxièmement, par le maintien des dépenses publiques et des aides aux travailleurs et aux entreprises là où les effets de la pandémie persistent. Pour le FMI cela pourra passer par des reports d’impôts, des garanties de crédit ou encore des systèmes de subvention. « Il est tout aussi important de maintenir la politique monétaire accommodante et les mesures de liquidités pour garantir les flux de crédit, surtout pour les petites et moyennes entreprises et soutenir ainsi les emplois et la stabilité financière » indique Kristalina Georgieva.

Troisièmement par la stimulation de la création de l’emploi, notamment dans l’investissement vert avec la réaffectation du capital humain sur les industries d’avenir. Les Etats devront mettre en place des mécanismes « de reconversion professionnelle et d’acquisition de nouvelles compétences jusqu’à l’élargissement de la portée et l’allongement de la durée de l’assurance chômage. La préservation des dépenses sociales sera essentielle pour une juste transition vers les nouveaux emplois » explique le FMI. Kristiana Georgieva rappelle d’ailleurs sur ce point qu’une nouvelle étude du FMI « montre qu’une augmentation de l’investissement public de seulement 1 % du PIB dans les pays avancés et les pays émergents peut créer jusqu’à 33 millions d’emplois ».

Enfin, la gestion de la dette restera primordiale, principalement concernant les pays à faible revenus. Le poids de la dette devenu un fardeau pour certains et risquant d’annuler les progrès effectués, le FMI évoque la nécessité d’alléger leurs dettes et d’améliorer leur accès aux dons. « Dans certains cas, une coordination mondiale sera requise pour restructurer la dette souveraine, avec la participation totale des créanciers publics et privés » estime la directrice du FMI.

Pour assurer ces priorités, le FMI a rappelé son soutien à ses pays membre, rappelant avoir financé 81 pays. « Nos engagements de prêts dépassent 280 milliards de dollars, dont plus d’un tiers ont été approuvés depuis mars » indique la directrice du Fonds, insistant sur le fait que l’instance dispose d’une capacité totale de prêt de 1 000 milliards de dollars.

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