Abdellatif Jouahri : la robustesse des indicateurs économiques imposait la baisse du taux directeur

Lors de la réunion du conseil de Bank Al-Maghrib tenue le 25 juin 2024, le wali a abordé divers sujets, notamment le ciblage de l'inflation, la décision de baisser le taux directeur, les créances en souffrance, la décompensation du gaz butane, les élections en Europe et d'autres sujets. Notons que Jouahri a mis en avant les améliorations des indicateurs macroéconomiques et la situation des finances publiques. Verbatim.

Abdellatif Jouahri : la robustesse des indicateurs économiques imposait la baisse du taux directeur

Le 26 juin 2024 à 18h29

Modifié 26 juin 2024 à 18h29

Lors de la réunion du conseil de Bank Al-Maghrib tenue le 25 juin 2024, le wali a abordé divers sujets, notamment le ciblage de l'inflation, la décision de baisser le taux directeur, les créances en souffrance, la décompensation du gaz butane, les élections en Europe et d'autres sujets. Notons que Jouahri a mis en avant les améliorations des indicateurs macroéconomiques et la situation des finances publiques. Verbatim.

Comme à l'accoutumée, le wali s'est adressé aux journalistes en résumant les grandes lignes de l'analyse du conseil de Bank Al-Maghrib qui ont mené à une baisse de 25 points de base du taux directeur, contredisant toutes les analyses et prédictions des centres de recherche et des analystes qui anticipaient un statu quo.

Bien que plusieurs questions aient porté sur la baisse du taux directeur que peu d’analystes avaient prédite, Abdellatif Jouahri s'est montré optimiste quant aux prévisions de croissance, d'inflation, de finances publiques et de l'ensemble des agrégats macroéconomiques. Selon lui, ces éléments ont non seulement motivé, mais également imposé une telle décision.

"Tout le conseil a décidé à l'unanimité de baisser le taux directeur, nous avons des spécialistes avec nous. En 2024, et jusqu'à présent, nous avons enregistré un niveau d’inflation en dessous des 2% (1,5%), et nous prévoyons 2,7% en 2025. Cependant, la composante principale de l'inflation, soit l'inflation sous-jacente, sera de 2,3% en 2024 et elle a atteint 2,1% en avril. Les autres données sont également positives : la croissance est à 3,4% en 2023 ; elle devrait atteindre 4,5% en 2024 et 4,8% en 2025, des taux de croissance que nous n’avons pas vus depuis quelques années. Concernant les finances publiques, le déficit budgétaire est de 4,3% en 2023 et devrait diminuer dans les deux années à venir. De même, l’endettement total est en baisse, passant de 70% à 68% dans les deux prochaines années, ce qui témoigne d’une maîtrise des finances publiques et de l'endettement total du gouvernement. La lettre de cadrage précédant la loi de finances 2024 du chef du gouvernement avait pour principal objectif la préservation des équilibres macroéconomiques, et ils ont tenu leur promesse. Par ailleurs, le déficit du compte courant a affiché 0,6% du PIB en 2023, et devrait se situer à 1,7% en 2024 et à 2,7% en 2025. Les réserves de change s’élèvent à cinq mois et demi. Quant à l’investissement, nous voyons les grands chantiers dans lesquels le Maroc s’est engagé, tels que les ports de Nador et Dakhla, la Coupe du monde et les projets de dessalement. Ainsi, ce qui m'intéresse le plus, c'est l'inflation et nous sommes dans le cadre de la cible de 2% pour les années 2024 et 2025, et l’ensemble des agrégats montrent des signes positifs. La situation n'est donc pas celle de mars. C’est ce qui a conduit à la baisse de 25 points de base du taux directeur. En septembre, nous allons revoir et évaluer les données, car l’incertitude est toujours présente".

La décompensation du gaz butane

L'entrée en vigueur de la décompensation partielle du gaz butane, couplée aux aides sociales directes, a soulevé des doutes quant à la prise en compte par la Banque centrale des nouveaux prix graduels des bonbonnes de gaz dans ses prévisions d'inflation, ainsi que de la masse monétaire relative aux aides sociales, ce qui pourrait potentiellement créer des tensions inflationnistes.

"Bien sûr, nous avons pris en compte dans nos prévisions de l’inflation ce qui a été annoncé par le gouvernement, les 10 DH du mois de mai et les 10 DH du début de l’année 2025. Concernant à quel niveau ils vont agir sur l’inflation, nous n’avons pas calculé de façon précise. C’est ce qui explique le saut que nous observons entre le 1,5% de 2024 et le 2,7% de 2025. Cependant, l’inflation sous-jacente, qui exclut les produits volatiles, reste à 2,3% sur 2024 et 2025. Nous sommes donc dans la cible de Bank Al-Maghrib. Je pense que la progressivité avec laquelle le gouvernement procède est intelligente, car il n'y a pas eu de réaction négative. La décompensation s’est faite en même temps que les aides sociales directes. Donc, en même temps qu'on décompense, on soutient le pouvoir d’achat des populations ciblées. Cela a coûté autour de 9 MMDH et a touché plus de 3 millions de bénéficiaires. C’est une bonne décision car la décompensation ciblera davantage les populations les plus vulnérables, mais donnera aussi des marges budgétaires au gouvernement pour essayer d’aller plus vite dans les investissements envisagés dans plusieurs secteurs vitaux", explique le wali.

Les créances en souffrance

Les créances en souffrance attirent une attention considérable, en particulier sur l'état d'avancement du projet de création d'un marché secondaire dédié.

En réponse à une question à ce sujet, le gouverneur déclare : "Les choses avancent, nous avons pratiquement tout pris en compte, et je pense que vous tombez bien, car la dernière réunion pour finaliser le projet est le 27 juin. Nous devons voir comment les choses vont se faire, c’est-à-dire le circuit de l’adoption qui doit être discuté avec le Secrétariat général du gouvernement. Cela demandera du temps car il reste des choses à régler. Même si nous avons cerné de très près les avis des uns et des autres, je sais que quand on arrive aux derniers 100 mètres, c’est là où les points doivent être revus".

Le ciblage de l’inflation

Un autre sujet de grande importance est la transition vers un système de ciblage de l'inflation, où la Banque centrale se concentrera exclusivement sur le maintien de l'inflation dans une fourchette prédéfinie (généralement 2%). Pour le Maroc, il s'agit d'un changement structurel majeur qui requiert une grande prudence et des préparatifs minutieux.

"Nous avons commencé tout le travail technique avec le Fonds monétaire international, c’est-à-dire la révision de nos modèles de prévision, notamment avec la récurrence des crises géopolitiques qui se sont déclenchées. Nous révisons en totalité nos modèles de prévision, nous examinons également les aspects du timing et de la préparation, ainsi que toute la communication nécessaire à établir sur ce sujet, car ils ne vont pas mentionner le ciblage seul, mais en lien avec l'évolution du régime de change. Nous sommes en pleine préparation de tout ce qui est requis pour que le ciblage entre dans les meilleures conditions d’application par la Banque centrale", résume le wali en réponse à une question sur l'avancement du projet de ciblage de l’inflation.

Élections en Europe, banques marocaines et MRE

Plus de 70 pays sont sur le point de connaître des changements de cap majeurs, entraînant des révisions de paradigmes et d'orientations, en raison des élections prévues d'ici la fin de l'année, notamment en Europe et c'est le cas en France. Ces évolutions nécessitent un suivi attentif de la part de la Banque centrale, particulièrement en ce qui concerne les transferts financiers des MRE et l'activité des banques marocaines en Europe.

"Oui, nous suivons de près les élections à venir et la montée possible de l'extrême droite. Nous verrons d'abord comment cela va être géré, car pour gouverner, il faut avoir une majorité. Beaucoup de gens se posent des questions à ce sujet, notamment sur l'éclatement du vote en France. Nous négocions avec l'Europe, car après le Brexit, l'Europe a revu la législation encadrant la présence et l'activité des banques non européennes sur le sol européen. Évidemment, ils ne voulaient pas que l'Angleterre puisse continuer à bénéficier en quelque sorte du passeport européen, mais cela nous a touchés, car quand ils parlent des banques non européennes, cela touche toutes les banques étrangères, y compris nos banques marocaines. Nous menons des discussions très étroites avec toutes les parties prenantes, notamment le ministère des Affaires étrangères, le ministère des Finances et les banques concernées, auprès de la direction de la Commission européenne FISMA, qui est chargée du dossier et qui a élaboré un projet présenté devant le Parlement européen. Pour nous, il y a des aspects qui ne sont pas très clairs sur le plan de la formulation. Lorsque Monsieur le Maire est venu ici, il y a eu des discussions entre la partie marocaine et la partie française sur cet aspect du problème. Ces discussions vont se poursuivre, quel que soit le gouvernement en place. Elles se poursuivront non seulement au niveau national, mais aussi au niveau européen, car eux-mêmes nous ont dit qu'ils doivent interroger la Commission européenne sur l'interprétation de certaines dispositions. Ainsi, les échanges ne se feront pas uniquement avec les gouvernements, mais aussi avec la Commission européenne. Pour nous, c'est un enjeu très important pour nos concitoyens et pour les nationaux. C’est un dossier que nous suivons de très près et sur lequel nous allons nous défendre afin de sauvegarder les flux naturels de nos Marocains en Europe", conclut Jouahri.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

A lire aussi


Communication financière

CFG Bank: Communiqué de presse post AGO du 30 mai 2024

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.