Ouarzazate. Dans les coulisses des ksours et des blockbusters américains

C’est une des rares villes qui a su faire de son originalité profondément locale un atout éminemment international. D’aucuns diront que cette notoriété est l’évidence même, au vu des paysages aux allures de carte postale de la région Drâa-Tafilalet. Cela n’explique pas totalement les "facteurs clés de succès" de la bien nommée "Ouarzawood". Une bonne raison d'interroger le premier VRP de la région, Mohamed Takhchi, sur le positionnement unique de cette ville. La réponse est une invitation dans les coulisses de cette fabrique marocaine des superproductions internationales.

Le Ksar Aït Benhaddou

Ouarzazate. Dans les coulisses des ksours et des blockbusters américains

Le 29 février 2024 à 12h58

Modifié 29 février 2024 à 17h10

C’est une des rares villes qui a su faire de son originalité profondément locale un atout éminemment international. D’aucuns diront que cette notoriété est l’évidence même, au vu des paysages aux allures de carte postale de la région Drâa-Tafilalet. Cela n’explique pas totalement les "facteurs clés de succès" de la bien nommée "Ouarzawood". Une bonne raison d'interroger le premier VRP de la région, Mohamed Takhchi, sur le positionnement unique de cette ville. La réponse est une invitation dans les coulisses de cette fabrique marocaine des superproductions internationales.

"La perle du sud", "Ouarzawood", ou plus explicitement le "Hollywood marocain". De tous les surnoms donnés à Ouarzazate, c’est bien celui de "Porte du désert" qui restitue le plus fidèlement le souffle, l’atmosphère et l’énergie qui se dégagent de la ville et de ses alentours. Bordée au nord-est par les massifs montagneux du Haut Atlas et au sud-ouest par les sommets de l’Anti-Atlas, la province entremêle au centre plaines, vallées, gorges, falaises, collines et plateaux qui s’ouvrent sur les étendues désertiques et sahariennes du Grand Sud marocain. Ce sont tous ces contrastes géographiques qui confèrent à Ouarzazate des atouts d’une beauté particulière.

L’oasis de Fint, située à 12 km seulement au sud de Ouarzazate. Elle est le décor de nombreuses scènes de productions cinématographiques : Kingdom of Heaven, Babel, Prince of Persia, Game of Thrones. CP CRT Drâa-Tafilalet

 

Beaucoup de cinéastes considèrent Ouarzazate comme ‘un paradis sur terre’

Porte du désert donc, Ouarzazate est aussi le chef-lieu économique et touristique de la région Drâa-Tafilalet. Été comme hiver, la ville ne désemplit pas. C’est qu’elle est connue dans le monde entier, et ce n’est pas sans raison. Si certains y transitent pour se rendre dans les célèbres dunes de Zagora, beaucoup s’y arrêtent pour se ressourcer à l’ombre des palmeraies et des oasis que le fleuve Drâa a dessinés et abreuvés dans son sillon. Ou pour y visiter les ksours et kasbahs ancestrales qui ont tout gardé de leur charme d’antan. Ou simplement pour oublier le tumulte des grandes métropoles en se laissant bercer par la douceur de la vie locale entre artisanat, agriculture oasienne et circuits touristiques. On y pratique aussi de plus en plus d’activités sportives, comme le trekking ou les trails, et des randonnées à cheval, à dos de chameaux, mais aussi à pieds ou en quads. On en oublierait presque tous ceux qui y affluent tout au long de l’année, climat prédésertique oblige, pour y tourner des films, des grandes fictions à gros budgets, souvent américaines, souvent aussi dans les premières places du box-office mondial.

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Kasbah d’Amridil dans l’oasis de Skoura, à 40 km de Ouarzazate. CP CRT Drâa-Tafilalet

 

"Un décor de cinéma"

Ouarzazate et sa province ont tant de choses à offrir. Quelles que soient les raisons de leurs passages ou arrêts à Ouarzazate, tous les visiteurs, internationaux comme nationaux, succombent à la magie inégalée de la province et de ses mille et une merveilles naturelles, patrimoniales et culturelles. La singularité de son relief, la régularité de son climat, la diversité de sa géographie, la fraîcheur de ses oasis et de ses palmeraies, la splendeur de ses ksours et de ses kasbahs, et puis la mosaïque presque paradisiaque de ses couleurs, entre le terracotta de ses falaises aux airs de grands canyons du sud américain, la verdure de ses vallées et l’ocre de son architecture et de son bâti, Ouarzazate et toute sa province se découvrent comme une multitude de tableaux décrivant des paysages tantôt sauvages et naturels, tantôt pittoresques et authentiques, formant un tout aussi dépaysant que revigorant.

 

Oliver Stone y a filmé de grands extraits de son film épique Alexandre, où Colin Farrell y tient le premier rôle, aux côtés d’Angelina Jolie dans celui d’Olympias, sa mère ; la troisième saison de la célébrissime série de HBO, Game of Thrones, y a fait escale, notamment dans l’enceinte du Ksar Aït Benhaddou dans les environs de la ville ; le réalisateur Alejandro Iñárritu y clôt sa trilogie de la mort en 2006, avec Babel, un drame qui met en vedette Brad Pitt et Cate Blanchett. La liste des grandes productions qui ont choisi Ouarzazate comme décor pour y tourner, partiellement ou en partie, leurs projets de film ou de série est longue : Mensonges d’ÉtatKingdom of HeavenAstérix et Obélix : mission CléopâtreSpy GameLa MomieGladiatorLa Chute du faucon noir...

Les studios ici offrent des infrastructures, des services et des facilités de haut niveau et des techniciens très qualifiés

Moteur, ça tourne. Action !

Tous ces blockbusters, réalisés ces vingt dernières années, ont fait la renommée cinématographique de Ouarzazate et de sa province. Ou ont plutôt accéléré son positionnement de choix sur la carte des meilleurs et plus beaux sites de tournage dans le monde, puisque l’activité cinématographique n’y est pas récente. Lawrance d’Arabie y a été filmé en 1962, Ali Baba et les quarante voleurs, six ans plus tôt, en 1954, et on y recense quelques autres productions cinématographiques tout au long des décennies qui vont suivre.

"Beaucoup de cinéastes considèrent Ouarzazate comme ‘un paradis sur terre’", affirme Mohamed Takhchi, président du CRT de Drâa-Tafilalet. De lieu de tournage épisodique durant la seconde moitié du XXe siècle, Ouarzazate et sa région sont devenus un lieu de production cinématographique incontournable pour les cinéastes du monde entier, au point où l’activité s’y est peu à peu structurée jusqu’à s’y industrialiser.

"Actuellement, il y a quatre studios de cinéma à Ouarzazate. CLA Studios, Atlas Studios, Studio Oasis, pas loin de l’Oasis de Fint, au milieu de l’Anti-Atlas, et le Studio KanZamane. Tous ces studios offrent des infrastructures, des services et des facilités de haut niveau, et des techniciens très qualifiés, ce qui encourage le tournage de films à Ouarzazate et autour", décrit Mohamed Takhchi.

Le feuilletage des sommets montagneux, aux environs de Ouarzazate. CP CRT Drâa-Tafilalet

 

Studios Atlas est le plus ancien de tous. Établis dans la périphérie de Ouarzazate (4 km) sur une surface totale de 20 ha, ils ouvrent leurs portes en 1983 et se démarquent par leurs somptueux décors égyptiens de l’époque pharaonique. On comprend pourquoi des productions comme Astérix et Obélix : mission Cléopâtre (Alain Chabat, 2002), Gladiator (Rydley Scott, 2000), Prince of Persia : Les Sables du Temps (Mike Newell, 2010) et même Kundun (Martin Scorsese, 1997) y ont été filmées.

CLA Studios est le plus grand studio de Ouarzazate. 160 ha aménagés en 2004 en deux plateaux de tournages auxquels sont adossés des ateliers et des décors. Situés à 10 km du centre de la ville de Ouarzazate, les Studios CLA ont abrité de grandes productions comme Kingdom of Heaven. Pour garder une trace et valoriser toute cette effervescence cinématographique, Ouarzazate s’est dotée dès 2007 d’un Musée du Cinéma, installé sur deux hectares, dans un ancien studio de production.

"Il y a réellement une synergie entre l’activité cinématographique et l’activité touristique qu’il faut exploiter. Malgré leur activité incessante, les studios de cinéma de Ouarzazate sont ouverts au grand public, constituant ainsi les piliers d’un ciné-tourisme naissant dans la région."

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Jeu de lumière

Si le cinéma mondial s’est entiché de "Ouarzazate", c’est autant pour ses vastes studios, son climat chaud et ensoleillé toute l’année, ses équipements techniques modernes, sa main-d’œuvre et ses compétences cinématographiques (figurants, techniciens, acteurs, etc.) que pour le paysage, en arrière-plan, sur lequel reposent toutes ces infrastructures. Et si Ouarzazate attire autant de grandes productions mondiales, c’est avant tout pour sa situation géographique exceptionnelle, mêlant oasis verdoyantes et plaines désertiques, sur fond de cimes montagneux blancs de neige. Un jeu de contraste qui forme un décor extérieur naturel riche en couleurs, en reliefs et en lumière, tout aussi naturelle, et d’une qualité rare.

 

Ksar Aït Ben Haddou est l’illustration parfaite de ces vestiges historiques devenus des plateaux de cinéma à ciel ouvert. Niché à 30 km de Ouarzazate, sur le flanc d’une colline, dans la vallée de l’Ounila, ce monument architectural est un ensemble d’habitations ceinturées de murailles. Les constructions, très compactes, sont en terre et en bois, et de dimensions variables : certaines, de petits logements, sont modestes, d’autres, des kasbahs, sont plus imposantes avec leurs tours d’angles hautes chichement décorées. Leur architecture renvoie à un type de construction présaharien typique du sud traditionnel marocain. C’est ce décor bâti en pisé, les murailles en briques rouges et son pré vert en milieu désertique qui a attiré des cinéastes de renom comme David Lean, Robert Aldrich, Martin Scorsese, Oliver Stone, Ridley Scott ou encore Alejandro Iñárritu (le cinéaste mexicain aux multiples Oscars et célèbre notamment pour les films The Revenant, Birdman et Babel). Le style architectural bien conservé des lieux et leur authenticité bien préservée ont valu au Ksar Aït ben Haddou d’être inscrit, dès 1987, sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

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Les kasbahs de Taourirt, de Tifoultoute, des Cigognes, d’Amridil sont toutes somptueuses 

Le trésor est dans la kasbah

Des ksours et kasbahs somptueux, Ouarzazate en regorge un certain nombre. "Je citerais notamment celles de Taourirt, de Tifoultoute, des Cigognes, et même la kasbah d’Amridil dans l’oasis de Skoura, à 40 km de Ouarzazate", énumère Mohamed Takhchi. Tout comme son aînée d’Aït Ben Haddoua, la kasbah Taourirt est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Accolée à la ville de Ouarzazate (1 km à l’est), la kasbah est connue particulièrement pour ses décors amazighs propices aux représentations culturelles locales, notamment le chant, la poésie et la danse d’Ahwach, un art amazigh typique de la région. A son intérieur, la kasbah abrite une grande salle de réception, des espaces de vie privée, une salle à manger… mais surtout une architecture et une atmosphère qui n’a rien perdu de son âme de jadis. Bâtie en 1754, la kasbah est restée dans l’histoire pour avoir été un lieu de résidence des pachas de Marrakech. Elle est aujourd’hui un site touristique de premier plan dans les circuits de visites de la ville et de toute la région.

Vue sur l’Oasis de Fint, située à 12 km au sud de Ouarzazate. CP CRT Drâa-Tafilalet

 

Et un peu plus loin (10 km de Ouarzazate), se dresse au milieu des montagnes une oasis qui a elle aussi été un éminent lieu de tournage dans la province (Babel, Kingdom of Heaven). L’oasis de Fint porte bien son nom. "Cachée" au milieu de la faune montagneuse, des villages et de la roche, elle jouit d’un emplacement géographique qui l’a longtemps préservée de l’animation touristique qui fait les beaux jours de Ouarzazate et sa province. Longée par une rivière dont les habitants tirent l’eau nécessaire à l’irrigation de leurs cultures, l’oasis, calme et paisible, est propice aux balades et randonnées, en bord de rivière ou à l’ombre des palmiers. Pour compléter le tableau idyllique des kasbahs de Ouarzazate, il y a celle de Telouet, une des plus éloignées de la ville (plus de 70 km), mais un lieu chargé d’histoire. Ancienne demeure du pacha Glaoui, la kasbah a été bâtie en 1860 dans le village du même nom qui occupait une position stratégique dans les montagnes du Haut-Atlas, sur la route des caravanes marchandes, pas loin de mines de sel. Demeure des pachas et caïds de la région, elle a été, depuis sa création, le théâtre de grands aménagements qui en ont, au fil du temps, embelli le décor intérieur, très raffiné, et agrandi les surfaces.

Les célèbres dunes de Merzouga, à 50 km au sud d’Erfoud. CP CRT Drâa-Tafilalet

 

Entre la ville et son patrimoine cinématographique, et la province et ses oasis, ksours et kasbahs, on croit avoir fait le tour. Sauf que, Ouarzazate, le joyau de Draâ-Tafilalet, est un trésor intarissable. Après s’être nourrie de l’histoire riche des lieux, de sa culture et de son patrimoine, la géographie de la province propose un autre type d’activités tout aussi bénéfique pour le corps que pour l’esprit : les randonnées. A cheval pour faire le tour des 4.500 ha de palmiers et des jardins abritant figuiers et amandiers de la palmeraie de Skoura, ou pour se hisser dans les hauteurs de la Vallée des amandiers, ou bien à pieds pour gravir les monts Assaghmou et Ghassat, les randonneurs y trouveront des paysages propices aux longues traversées et aux rencontres avec les populations locales, aussi bien celles résidant dans les villages des montagnes de l’Atlas que celles nomades.

 

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