Nabil Benabdallah : “Nous voulons constituer une alternative progressiste à la majorité actuelle”

ENTRETIEN. Un quart de siècle après la Koutla qui avait réuni trois partis d’opposition, le PPS opère un rapprochement avec l’USFP pour se préparer aux prochaines législatives de 2026. L’occasion d’interroger le secrétaire général du parti du Livre sur les ressorts de cette union de gauche, qui vise à constituer une alternative au gouvernement actuel.

Nabil Benabdallah : “Nous voulons constituer une alternative progressiste à la majorité actuelle”

Le 23 janvier 2024 à 12h21

Modifié 23 janvier 2024 à 15h23

ENTRETIEN. Un quart de siècle après la Koutla qui avait réuni trois partis d’opposition, le PPS opère un rapprochement avec l’USFP pour se préparer aux prochaines législatives de 2026. L’occasion d’interroger le secrétaire général du parti du Livre sur les ressorts de cette union de gauche, qui vise à constituer une alternative au gouvernement actuel.

A l’approche du mi-mandat de l’actuel gouvernement, le PPS a déjà ouvert le bal des positionnements en opérant un rapprochement avec l’USFP ; rapprochement qui pourrait s’élargir à d’autres partis de gauche comme la FGD et le PSU, ou à ceux de l’opposition actuelle, voire même à l’Istiqlal qui fait partie de la majorité gouvernementale.

Dans cet entretien, le secrétaire général du parti du Livre, Nabil Benabdallah, nous livre les possibles scénarios qui permettront de générer une alternative progressiste à la coalition menée par le RNI.

Médias24 : Votre parti est en train de se rapprocher de l’USFP, est-ce un retour à la Koutla sans l’Istiqlal ?

Nabil Benabdallah : Pas vraiment car dans tous les cas de figure, le positionnement de chacun de nos partis ne permet pas aujourd’hui d’avoir avec nous l’Istiqlal, qui est une composante de la majorité, même si cela n’empêche rien pour l’avenir.

Aujourd’hui, nous sommes ouverts à un premier cercle avec une identité de gauche composée essentiellement de l’USFP et du PPS

- En d’autres termes, vous n’insultez pas l’avenir...

- En effet, mais à l’issue de l’actuelle expérience gouvernementale, toutes les voies seront ouvertes.

Aujourd’hui, nous sommes ouverts à un premier cercle avec une identité de gauche composée essentiellement de l’USFP et du PPS, puis à un deuxième cercle où on essayera d’aller chercher ce que l’on appelle le peuple de gauche, et enfin à un troisième et dernier spectre qui contiendra toutes les composantes actuelles de l’opposition parlementaire.

Sachant que notre pays en a fortement besoin, nous essayons de construire ou de dégager une sorte d’alternative progressiste à la majorité et au gouvernement actuel.

Ce rapprochement n’est qu’un retour aux fondamentaux

- Qu’est-ce qui vous unit aujourd’hui plus qu’hier à l’USFP ?

- En termes de parcours historique, que ce soit sur le fond ou sur les fondamentaux, nos positions sont très proches sur un certain nombre de questions politiques, économiques et sociales.

Les considérations politiques ou même politiciennes ont fait qu’à certaines périodes, nous avons pu diverger sur des questions de positionnement politique ou d’alliance, comme lors de la constitution du gouvernement menée par le PJD, mais sur le fond, nos positions sont restées très proches.

En réalité, ce qui se passe aujourd’hui n’est qu’un retour aux fondamentaux et à une position éclairée qui permet de considérer que si on veut réellement construire une alternative de gauche, cela passe par une colonne vertébrale constituée principalement de nos deux partis politiques.

Sans ces deux partis, il sera en effet difficile de prétendre que l’un d’entre nous pourra, à lui seul, constituer une alternative au gouvernement actuel.

Sa Majesté le Roi a clairement énoncé que nous devons assainir le champ politique

- Jusqu’où pourra aller ce rapprochement, loin d’être inédit ?

- Dans un premier temps, jusqu’à préparer ensemble le terrain des élections de 2026. Sous quelle forme et de quelle manière, ce sont des choses qui se construiront petit à petit sans précipitation.

En effet, quand on fixe des objectifs de départ trop ambitieux, on risque fort de ne pas atteindre la cible et de générer du dépit et de la frustration alors que nous voulons créer de l’espoir et réconcilier les Marocains avec la politique.

C’est pour cette raison que nous accorderons beaucoup d’importance à la réforme du champ politique, parce que nous considérons que ce qui se passe aujourd’hui nécessite de revoir profondément ses fondements mais aussi plusieurs paramètres comme la situation et le rôle des partis, la mise en œuvre effective de la Constitution, la façon dont se déroulent les élections et les lois électorales, le contrôle qui doit être fait de l’utilisation de l’argent lors des campagnes électorales, la question de l’éthique et de la probité du personnel politique...

Des thématiques plus que d’actualité, sachant que dans la dernière lettre royale adressée au Parlement à l’occasion des 60 ans de l’institution législative, Sa Majesté le Roi a clairement énoncé que nous devons assainir le champ politique pour en améliorer la qualité et le rendement.

Si nous voulons y parvenir, il va falloir s’attaquer à une réforme profonde du champ politique.

Une tournée commune PPS et USFP est prévue dans tout le pays

- Peut-on envisager une coordination dans les choix des circonscriptions aux prochaines élections ?

- Il ne faut pas aller trop vite en besogne ; nous ne sommes qu’en 2024 et les élections ne sont que dans deux ans et demi. Partant de là, nous avons donc le temps de travailler pour affirmer encore plus notre action commune dans le cadre d’une plateforme en nous ouvrant à d’autres forces sur le champ social.

Pour cela, nous allons probablement faire une tournée dans tout le pays.

- Une tournée commune ?

- Certainement, pour expliquer les tenants et aboutissants de notre initiative mais partant du principe que petit à petit, l’oiseau fait son nid. Encore une fois, il ne faut pas se précipiter pour garantir le succès de cette initiative.

- Quels seront vos chevaux de bataille aux prochaines législatives : des valeurs progressistes de gauche ou uniquement le point sur le bilan du gouvernement actuel ?

- La réforme du champ politique est fondamentale ; nous comptons prendre en temps voulu des initiatives en ce sens qui seront d’ailleurs annoncées dans les mois à venir.

Il est évident que nous allons développer un certain nombre de principes progressistes dans notre approche globale en défendant des idées communes pour améliorer le rôle de l’Etat, du secteur public et de la gouvernance pour avoir une économie plus performante, avec une vraie vision sociale qui ne soit pas uniquement un slogan utilisé par l’actuel gouvernement qui se prévaut de l’Etat social.

De plus, nous comptons accorder la primauté aux services publics comme l’école et l’hôpital.

Cela ne signifie pas pour autant que nous n’allons pas développer un partenariat privilégié avec le secteur privé. Car sans les entreprises, on ne pourra pas développer notre économie nationale.

Aller aussi loin que possible dans l’égalité homme-femme

Nous souhaitons également combattre l’informel pour porter haut l’entreprise marocaine formelle en dépassant un certain nombre de pratiques existantes dans notre pays qui ont été signalées dans le document du Nouveau Modèle de développement, comme la lutte contre la rente et la corruption, une action pour une transparence dans le domaine des affaires, le fait d’aller encore plus loin vers la promotion de l’égalité homme-femme et énormément de perspectives de réformes pour l’avenir.

- Quid des vraies valeurs de la gauche, notamment l’égalité des sexes, dans le domaine de l’héritage par exemple ?

- Elles font bien évidemment partie de nos priorités et je vous invite à vous référer à nos deux documents sur la réforme de la Moudawana ainsi qu’aux nombreuses rencontres de nos organisations féminines qui développent des visions réalistes allant vers plus d’égalité.

Quand je dis réaliste, cela veut dire que nous allons veiller à aller le plus loin possible en tenant compte d’un certain nombre de positions liées aux principes sur lesquels se base la Constitution.

Si certains ne veulent voir dans cette Constitution le fait que le Royaume est un Etat musulman, nous voulons rappeler à tout le monde que dans son préambule, avant de parler d’Etat musulman, l’Etat est d’abord qualifié d’Etat démocratique où doit régner l’égalité des droits et des chances, et que pour cela, le Maroc a adopté un certain nombre de conventions internationales en la matière.

Nous essayerons donc de faire l’équilibre entre ces deux lectures qui font que d’autres tendances, notamment islamistes, s’accrochent, voire s’arcboutent à privilégier seulement le deuxième paragraphe.

Nous allons donc batailler pour nos valeurs car nous estimons que nous devons le faire, mais avec raison.

- En fait, vous allez batailler contre les valeurs du PJD ?

- Nous ne cherchons pas à batailler contre qui que ce soit, mais plutôt à convaincre concernant le bien-fondé de nos idées et de nos valeurs pour le développement de notre pays.

Plus de démocratie, plus de libertés pour plus d’égalité dans notre pays : voilà ce que nous recherchons.

Si nous ne sommes pas là pour essayer d’ériger des tranchées et de créer plus de divisions dans la société marocaine, cela ne nous empêche pas de défendre fortement nos valeurs progressistes.

Ainsi, nous pourrons très bien nous retrouver à travailler avec les forces qui le souhaitent sur certaines questions sur lesquelles nous sommes d’accord, et si ce n’est pas le cas, comme pour le Code de la famille avec le PJD, nous ne travaillerons pas avec eux sur ce dossier.

Ils défendront leurs positions et nous les nôtres dans le respect, mais nous pourrons nous retrouver avec eux sur d’autres questions d’ordre politique, économique ou social.

Mémorandums PPS et USFP sur la Moudawana : notre positionnement est largement plus avancé que celui du RNI, du PAM, du MP et de l’Istiqlal

Quand vous voyez le contenu de notre mémorandum et celui de l’USFP et que vous les comparez à ceux des autres partis présents au Parlement, vous constaterez que notre positionnement est largement plus avancé que celui du RNI, du PAM, du MP et de l’Istiqlal car nous partons d’une idéologie de gauche qui se veut égalitaire, or ce n’est pas le cas des autres.

En d’autres termes, même si on a plus de divergences de valeurs avec le PJD, nous en avons aussi avec les autres forces politiques.

- Dans une société très conservatrice, vous allez prendre le risque électoral de mettre en avant la nécessité de réformer la place de la femme ?

- Nous allons le faire avec raison et mesure mais nous n’allons pas en faire la bataille du siècle. C’est une bataille qui fait partie de la réforme du champ politique à l’instar de celles que nous allons mener sur les orientations économiques du pays et sur le front social pour une véritable justice sociale.

Par conséquent, c’est un combat global qui ne va pas se limiter uniquement à la question du Code de la famille, d’autant plus que ce dossier devrait se clôturer dans les deux ou trois mois à venir après le délai fixé par Sa Majesté pour y apporter des réponses.

Tout en espérant que cette question connaîtra d’importants acquis, cela ne nous empêchera pas d’agir pour faire évoluer le Code de la famille, mais il faudra bien continuer à s’occuper d’autre chose, comme le combat sur l’égalité salariale, la place de la femme dans la politique et dans la société.

S’il est vrai que c’est un travail de longue haleine, nous ne nous sommes pas retrouvés avec l’USFP uniquement sur la question du Code de la famille, mais plutôt sur une plateforme d’actions qui précisera nos priorités dans les prochains jours.

- Quid d’une alliance avec les autres partis de gauche comme la FGD ou le PSU ?

- Si ces formations sont disposées à avoir une attitude positive à l’égard de notre initiative, nous souhaitons ardemment qu’elles puissent la rejoindre.

- Qu’entendez-vous par attitude positive ?

- Que notre porte n’est fermée à personne, en particulier lorsqu’il s’agit de tendances politiques nées dans les rangs de l’USFP et du PPS, mais encore faudrait-il que ces partis acceptent notre initiative portant sur une unité d’action.

Aujourd’hui, nous souhaitons nous retrouver pour parler du présent et de l’avenir et certainement pas pour ressasser ce qui a pu se passer lors des décennies écoulées, car force est de constater que ce travers est souvent présent chez les partis de gauche, que j’appelle à adopter une attitude plus constructive.

- Vous voulez dire qu’ils vous reprochent d’avoir gouverné avec le PJD ?

- Absolument pas, mais plutôt ce qu’on a pu faire avec le gouvernement d’alternance, notamment la raison pour laquelle nous y avons participé.

Je vais prendre, dans les jours à venir, des contacts personnels avec les leaders de la FGD et du PSU

- Vous voulez donc faire table rase du passé ?

- On ne fait jamais table rase du passé même si on doit évidemment en tenir compte, nous devons nous concentrer pour essayer de construire l’avenir ensemble.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je vais prendre, dans les jours à venir, des contacts personnels avec les leaders de ces partis pour leur dire que nous avons vraiment besoin qu’ils adoptent une attitude plus positive à l’égard de cette démarche

- Vous pensez à quel parti en particulier ?

- Aux deux principaux, à savoir le PSU et à la Fédération de la gauche.

- Pourquoi pas avec le PJD, avec lequel vous avez longtemps été partenaire ?

- Je vous ai dit qu’il y avait trois cercles possibles, à savoir avec l’USFP, puis avec les autres partis de gauche et enfin avec ceux de l’opposition parlementaire dont fait bien évidemment partie le PJD.

Sur certaines questions comme la réforme du champ politique ou sur la nécessité d’une vraie justice sociale, nous avons en effet un certain nombre de points d’accord avec le PJD qui fait que nous pourrons travailler ensemble.

Nous pouvons aussi avoir des positions de convergence avec le Mouvement populaire, mais il n’est pas possible être d’accord sur tout, sans quoi nous n’avancerons sur rien.

Et de manière naturelle, la porte restera ouverte au parti de l’Istiqlal qui, je vous le rappelle, a toujours été notre partenaire depuis l’obtention de l’indépendance.

- Vous envisagez donc une grande coalition gouvernementale menée par le PPS-USFP et la FGD et le PSU, voire avec le Mouvement Populaire et le PJD ?

- Je pense qu’il ne faut pas aller trop vite en besogne. En effet, je ne peux pas vous répondre aujourd’hui sur quelque chose qui va se passer en 2026.

- Mais l’éventualité d’une nouvelle alliance du PPS avec le PJD n’est pas exclue ?

- Encore une fois, je ne peux pas vous répondre, car quid de l’Istiqlal si la possibilité se présente ? En effet, qu’est-ce qui nous dit que demain nous ne serons pas dans des conditions qui feront que nous pourrons, ou serons obligés, de travailler avec l’une des composantes du gouvernement actuel ?

Ce n’est qu’à ce moment que nous pourrons nous prononcer, mais pour l’instant, nous espérons surtout construire une coalition sur une base programmatique proche de nos valeurs de gauche.

Nous agirons donc en conséquence lorsque les conditions seront plus claires mais, à ce jour, notre priorité est de faire émerger une alternative de gauche.

- Comment la gauche peut-elle encore avoir un avenir au Maroc alors que dans une précédente interview accordée à Médias24, vous aviez reconnu que la seule différence actuelle avec la droite se limitait à un positionnement géographique au Parlement ?

- Je n’ai pas dit cela. J’ai dit qu’à l’origine, la gauche avait historiquement davantage un positionnement spatial dans l’enceinte parlementaire qu’une démarcation politique.

"Le mouvement progressiste continuera d’exister encore longtemps"

- Vous avez pourtant bien dit qu’elle se limitait à une différence spatiale au Parlement ?

- Tout simplement parce qu’à l’origine, la gauche était placée chez nous, comme ailleurs, dans les travées de gauche du Parlement, mais en réalité le vrai clivage a toujours concerné, hier comme aujourd’hui, un positionnement progressiste contre celui des conservateurs.

Je n’ai donc jamais considéré qu’il n’y avait plus de différences avec la droite, loin de là. Elles sont nombreuses et je considère que le mouvement progressiste continuera d’exister encore longtemps. Il existera tant que le combat pour les libertés, pour l’égalité, pour la justice sociale, pour un rôle plus important de la femme et de la jeunesse, pour une économie transparente et développée dans laquelle l’Etat et le secteur public jouent un rôle important à côté d’un secteur privé développé, responsable et citoyen, et que la lutte contre la rente et la mauvaise gouvernance se poursuivront.

Ces chantiers qui se nourrissent des idées progressistes nécessiteront une action forte qui ne pourra être portée que par la gauche car ce n’est pas le combat des libéraux ou des conservateurs, qu’ils soient religieux ou pas.

C’est d’ailleurs pour cette raison que nous essayons d’unir nos efforts au lieu que chacun continue à se battre tout seul dans son coin.

Puisque vous cherchez à savoir pourquoi nous avons travaillé avec le PJD, c’est parce que nous avons considéré que le champ politique était en danger avec des pratiques indignes qui ont prévalu sur le champ politique national à l’issue de la dérive née de la création d’un nouveau parti en 2008.

Face au constat que la démocratie marocaine était en danger, nous avions espéré que les partis de la Koutla pourraient s’opposer haut et fort à cette dérive mais malheureusement, cela n’a pas été le cas.

À défaut, nous avons considéré, à l’issue du Mouvement du 20 février, de l’adoption de la nouvelle Constitution et des élections de novembre 2011, qu’il était de notre devoir de travailler avec un parti qui, au-delà de nos divergences sur les valeurs, était d’accord avec nous sur la question de la défense de la démocratie mais aussi sur la nécessité d’engager des réformes sociales et économiques.

Malgré notre positionnement différent, nous avons su gérer nos divergences sur la question des libertés et notamment celle de l’égalité homme-femme puisqu’il n’y a eu de ce côté aucun recul ni aucune loi adoptée qui ait été liberticide.

Aujourd’hui, vous avez un gouvernement qui se dit moderniste, mais pouvez-vous me citer le nombre d’avancées qu’il a développées en matière de libertés et sur le champ démocratique

- Aucune avancée non plus ?

- Certes, il n’y a pas eu d’avancées mais il n’y a pas eu de recul non plus, et c’est déjà pas mal.

Aujourd’hui, vous avez un gouvernement qui se dit moderniste, mais pouvez-vous me citer le nombre d’avancées qu’il a développées en matière de libertés et sur le front démocratique ? Aucune avancée et d’ailleurs, il ne s’en soucie même pas, ni n’en parle.

Faut-il rappeler que la question de la réforme de la Moudawana est un chantier qui a été initié par Sa Majesté le Roi et que le gouvernement actuel n’a rien proposé ou fait à ce niveau, ni d’ailleurs sur la réforme du Code pénal qui était censée sortir il y a deux ans et demi et que nous attendons toujours.

Il n’y a par conséquent aucune comparaison possible avec ces forces qui se disent opposées au PJD, d’autant plus que l’actualité montre qu’elles donnent une piètre image de la politique.

- Que pensez-vous apporter de plus que le gouvernement actuel, sachant que vous avez été associé pendant plusieurs années à celui de Abdelilah Benkirane où le RNI était présent ?

- Notre priorité est de réformer le champ politique, ce qui n’est pas le cas du gouvernement actuel. Est-ce que le gouvernement actuel défend la démocratie, les droits de l’Homme et l’élargissement des espaces de liberté ? Certainement pas.

Est-ce que ce gouvernement agit pour une économie plus forte et transparente avec un rôle moteur de l’État ou avec un secteur privé de plus en plus présent et une économie informelle qui régresse ? Il n’y a qu’à voir les récentes critiques de la CGEM sur son action et vous aurez la réponse.

Est-ce que le gouvernement actuel a été en mesure de gérer réellement les crises sociales ? Là encore, il n’y a qu’à voir comment il a géré la crise de l’enseignement, où on est passé à côté de la catastrophe. Et encore ! Ce n’est pas terminé ; l’année est fortement menacée pour les enfants de notre peuple qui sont scolarisés dans l’école publique.

Est-ce que ce gouvernement a la capacité de communiquer avec notre peuple et de le mobiliser, sachant que sans mobilisation sociale, il ne peut y avoir de développement ? La réponse est encore négative parce qu’il ne comprend pas l’importance du partage politique dans toute action.

Je pourrais aller beaucoup plus loin mais il est évident que plus nous serons présents dans une coalition qui représentera une alternative, plus la gauche aura de voix et parviendra à être prégnante dans une coalition gouvernementale pour que nous puissions concrétiser nos positions demain.

Je me dois de rappeler que lorsque nous avons assumé la responsabilité d’un certain nombre de secteurs, en particulier dans la première version du gouvernement PJD, nous avons réalisé un certain nombre d’acquis et avons pu travailler dans des conditions relativement confortables.

Avec le fossé actuel qui ne cesse de grandir entre les différentes couches de la société marocaine et leurs représentants politiques, les choses sont devenues beaucoup plus complexes et la réforme du champ politique est devenue une nécessité, pour ne pas dire une véritable urgence.

Faut-il rappeler que les institutions politiques ont été très fortement dépréciées lors des élections de 2021, avec l’utilisation massive de l’argent, et que les scandales qu’on voit éclater aujourd’hui sont la preuve que le monde politique est menacé et qu’il faut le sauver.

Pour cela, il faut absolument engager des réformes essentielles pour réconcilier notre peuple, et surtout notre jeunesse, avec les institutions, avec des actions d’ordre électoral et politique qui aillent dans le sens de la lettre royale récemment envoyée au Parlement, qui appelait à revaloriser le travail politique, les institutions représentatives et la qualité des élus.

Nous sommes à mon avis les mieux placés pour y parvenir en tant que forces de gauche.

- Le PAM ou le RNI sont-ils une ligne rouge pour une éventuelle coalition menée par la gauche ?

- Je n’ai jamais parlé de ligne rouge, mais nous allons essayer de faire en sorte de constituer, dans un premier temps, avec l’USFP et le PPS, la colonne vertébrale d’une alternative progressiste.

Par la suite, nous verrons avec qui nous pourrons travailler, en espérant pouvoir le faire sur une base programmatique qui soit plus la nôtre que celle des autres partis.

- La porte reste-t-elle ouverte à l’un de ces deux partis ?

- Je vous ai déjà donné une réponse qui consiste à dire que ce qui nous importe, c’est de développer notre présence politique d’ici les élections de 2026 pour faire émerger une nouvelle génération politique chez nous et encore plus chez les autres, et in fine, avoir à ce moment-là une force électorale qui soit beaucoup plus puissante que celle que nous avons actuellement.

Sachant qu’aujourd'hui, nos deux partis représentent pas loin de 60 sièges au Parlement, nous espérons parvenir, d’ici 2026, à doubler notre présence, sans compter l’apport d’autres formations de gauche moins importantes.

Dans cette hypothèse, il est évident que le poids plus important que nous pourrons constituer nous permettra de participer à un gouvernement dans des conditions autrement plus avantageuses que par le passé.

Ce n’est qu’à ce moment-là que nous verrons avec qui nous pourrons constituer un gouvernement, mais encore une fois notre priorité actuelle est d’abord de savoir sur quelle base programmatique et sur quelle orientation économique, politique, culturelle et sociale cela pourra se faire.

Il est en effet beaucoup trop tôt pour commencer à tracer des comètes et à délimiter un terrain politique qui va forcément évoluer d’ici 2026. Ce serait faire preuve de beaucoup d’immodestie que de se prononcer dès à présent sur ce que nous allons faire et avec qui nous allons travailler.

Nous voulons développer une vision programmatique commune qui nous permettra d’agir au sein de la société et de récolter un maximum de soutiens au sein des nombreux déçus de la politique, notamment chez les abstentionnistes.

- Votre quatrième mandat arrivera à terme au moment des prochaines législatives. Pensez-vous que votre successeur conservera la même ligne politique, à savoir s’allier avec l’USFP ?

- C’est une question que je ne me pose pas car je ne peux pas imaginer que la direction qui émergera après la fin de mon mandat ira dans un sens différent.

En effet, le PPS est un parti démocratique qui a toujours prôné l’union des forces progressistes et eu une vision unitaire à l’égard de l’USFP malgré quelques divergences par le passé.

A partir du moment où les conditions d’une action unitaire avec l’USFP continueront de prévaloir en 2026, il n’y a aucune raison qu’il y ait de la part de la future direction du PPS une orientation différente.

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