Le Conseil supérieur de l'éducation émet des critiques concernant des projets de loi sur l'enseignement
Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a adopté les avis rendus autour du projet de loi 59-21 sur l’enseignement scolaire, et trois autres projets de décret relatifs à l’orientation scolaire et professionnelle, l’application de l’ingénierie linguistique et la vocation des établissements universitaires. Avant le dépôt des moutures finales au Secrétariat général du gouvernement, ces textes doivent d’abord prendre en considération les recommandations du Conseil.
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Kenza Khatla
Le 5 juillet 2023 à 18h08
Modifié 5 juillet 2023 à 18h51Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a adopté les avis rendus autour du projet de loi 59-21 sur l’enseignement scolaire, et trois autres projets de décret relatifs à l’orientation scolaire et professionnelle, l’application de l’ingénierie linguistique et la vocation des établissements universitaires. Avant le dépôt des moutures finales au Secrétariat général du gouvernement, ces textes doivent d’abord prendre en considération les recommandations du Conseil.
Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) a organisé le mardi 4 juillet une rencontre d’information pour présenter ses avis approuvés par l’assemblée générale organisée le 19 juin 2023, en réponse aux demandes du gouvernement concernant cinq projets de textes législatifs relatifs au système éducatif.
Ces avis concluent que les textes en question doivent être revus pour comprendre les observations et propositions présentées par les membres du Conseil, avant de transférer les moutures finales au Secrétariat général du gouvernement.
Notons qu’il s’agit, pour le projet de loi 59-21 et les projets de décret sur l’orientation scolaire et professionnelle et l’ingénierie linguistique, que nous allons traiter en profondeur dans cet article, du second avis du Conseil.
Projet de loi sur l’enseignement scolaire : peut mieux faire
Le projet de loi 59-21 est l’un des piliers de la vision gouvernementale de la réforme de l’éducation, visant l’édification d’une nouvelle école. Ce texte ambitionne de réorganiser l’enseignement scolaire dans sa globalité. Inscrit dans le cadre de la réforme du secteur, il vise la promotion d’une école publique marocaine qui met l’apprenant au cœur de ses préoccupations et cherche à concrétiser les objectifs d’équité, d’égalité des chances, de qualité et de promotion de l’individu et de la société.
Après avoir examiné la dernière version de ce texte, le Conseil note que ce projet de loi n’inclut pas toutes les questions liées aux fonctions, aux tâches, aux composantes, à la gouvernance, au financement et à l’évaluation du système éducatif scolaire. Par conséquent, il a formulé une série d’observations à prendre en compte, aussi bien sur la méthodologie utilisée dans son élaboration que sur son contenu et sa forme.
Sur le plan méthodologique, le Conseil estime que le présent projet de loi est censé évoquer les principes et dimensions liés à toutes les composantes de l’enseignement scolaire, ainsi que les prescriptions législatives l’encadrant, notamment la loi actualisée sur les Académies régionales d’éducation et de formation (AREFs).
L’élaboration de ce texte nécessite également l’élargissement du cercle des consultations, avec tous les acteurs du système éducatif, compte tenu de son importance. Le Conseil considère ainsi que ce projet nécessite l’adoption d’une dimension prospective et d’une approche expérimentale.
En matière de contenu, le Conseil met l’accent sur la nécessité de faire de l’intérêt de l’enfant la pierre angulaire de la constitution de l’école nouvelle. Cela implique ainsi la transition vers un modèle pédagogique basé sur les acquis de l’apprentissage et l’activation du rôle social de l’école afin d’assurer un accès effectif à une éducation de qualité, tout en rappelant les principes de l’équité entre toutes les régions et tous les milieux.
Le CSEFRS appelle également à intégrer l’éducation culturelle, artistique et sportive dans les programmes des enseignants et des apprenants, et à renforcer les moyens nécessaires pour y parvenir, tout en travaillant à l’application effective de l’indépendance de l’institution scolaire et l’implication effective des familles dans le fonctionnement des établissements d’enseignement.
Il insiste par ailleurs sur la nécessité d’améliorer l’image du métier d’enseignant ainsi que la formation et les conditions de travail des cadres enseignants et de gestion, mais aussi d’œuvrer au développement de l’enseignement à distance comme étant un mode d’apprentissage nécessaire.
Le Conseil appelle aussi à la participation effective des collectivités territoriales au développement de l’enseignement scolaire, tout en rappelant les mesures législatives, réglementaires et financières qu’exige cette participation.
Quant à sa forme, ce projet de loi requiert l’ajout d’un préambule qui intègre la notion de "nouvelle école" et qui précise les objectifs du projet, évoque son cadre de référence et explique les finalités du législateur en l’édictant. Il appelle enfin à la fixation d’un calendrier pour la publication de ses textes réglementaires.
Notons qu’après l’avis émis par le Conseil en 2021, des améliorations ont été introduites au texte initial de ce projet de loi, avant qu’il ne soit transféré une seconde fois au Conseil le 20 mars 2023.
Orientation : plus de cohérence avec l’ensemble des composantes de la réforme
Le second avis du Conseil concerne le projet de décret relatif à l’orientation scolaire et professionnelle et au conseil universitaire. Comme pour le précédent projet de loi, ce texte a déjà fait l’objet d’un premier avis du CSEFRS. Il a été déposé le 18 juin 2021 par le gouvernement pour un premier avis, après lequel des améliorations y ont été apportées. Le texte modifié a été déposé une seconde fois au CSEFRS le 16 février 2023.
Sur ce texte, le Conseil appelle principalement à la cohérence avec l’ensemble des composantes de la réforme pédagogique, en prenant en compte les exigences nécessaires pour mettre en place un nouveau système d’orientation scolaire, professionnelle et universitaire.
"Ce projet de décret, dans sa nouvelle mouture, n’a pas permis de clarifier ce qu’est l’orientation, et ses concepts structurants, de manière à assurer la mise en place d’un système d’orientation unifié, intégré et complet pour tous, à savoir l’enseignement scolaire, la formation professionnelle, l’enseignement supérieur, l’enseignement originel et la lutte contre l’alphabétisme", lit-on dans l’avis du Conseil.
"Cette nouvelle version a également démontré que ce projet repose sur une approche circonstancielle, sélective et fragmentée, qui conduit principalement à améliorer les composantes et les mécanismes du système actuel, sans parvenir à la réforme éducative globale souhaitée."
Le Conseil considère que l’orientation remplit des fonctions éducatives diverses et intégrées, qui visent principalement à accompagner et à suivre le développement des compétences individuelles et des acquis des apprenants, développant ainsi leur autonomie et renforçant l’éducation au choix. L’orientation aide également ces derniers à réussir leurs apprentissages et à acquérir la capacité de s’adapter aux exigences de la vie professionnelle et à l’évolution du marché du travail.
A cet égard, ses membres soulignent la nécessité d’une cohérence de l’ensemble des composantes de la réforme pédagogique pour la construction de la "nouvelle école", et appellent ainsi à s’appuyer sur un ensemble d’exigences, à leur tête la publication des textes législatifs de base relatifs à la mise en place du comité permanent de renouvellement et d’adaptation continus des curricula, des programmes et des formations, et l’élaboration des référentiels et guides de référence, l’élaboration d’un nouveau modèle de promotion des métiers de l’orientation scolaire, professionnelle et universitaire, l’élaboration d’un cadre national de référence pour la certification, et la création d’un observatoire pour mettre en adéquation les nouveaux métiers et formations avec les besoins du marché du travail.
Afin d’établir une nouvelle perspective structurée d’orientation, le Conseil recommande que le contenu du décret soit compatible avec les exigences de la loi-cadre 51-17 et des textes législatifs et réglementaires qui s’y rattachent. Il souligne également la nécessité d’engager une nouvelle dynamique de réforme globale du système d’orientation scolaire, professionnelle et universitaire, fondée sur la coordination entre toutes les composantes du système et le respect des délais fixés dans la loi-cadre.
Application de l’ingénierie linguistique : le texte manque de détails
L’avis rendu par le Conseil autour du projet de décret fixant les applications de l’ingénierie linguistique dans l’enseignement scolaire, la formation professionnelle et l’enseignement supérieur, intervient dans un contexte spécial, marqué par la publication, en mai, par le ministère de l’Education nationale, de deux circulaires sur la généralisation progressive de l’enseignement de la langue anglaise au collège à partir de la prochaine rentrée scolaire, ainsi que la langue amazighe dans le cycle primaire.
Dans son avis, le CSEFRS souligne la nécessité de mettre en place des procédures structurelles générales et détaillées pour la mise en œuvre d’une ingénierie linguistique cohérente avec les documents de référence, à savoir la loi-cadre 51-17, la loi 105.12 relative au CSEFRS et la vision stratégique de réforme de l’enseignement à l’horizon 2030.
Comme pour les deux autres textes, le Conseil a déjà émis un premier avis autour du présent projet de décret en 2021. La seconde demande d’avis a été déposée par le gouvernement le 16 février 2023.
Il est à noter que ce texte se compose de trois parties. La première fixe les modalités générales de l’application de l’ingénierie linguistique et les dispositions à prendre en compte par les autorités compétentes, avec le détail de cette application par cycle. La seconde, quant à elle, comporte les objectifs et les principes de base encadrant l’application de l’ingénierie linguistique. Enfin, la troisième comporte les modalités d’entrée en vigueur de ce texte.
Plus en détail, le Conseil estime que l’intégralité des articles de ce projet s’est limitée à rappeler les objectifs et principes fondamentaux liés à l’application de l’ingénierie linguistique au lieu de les détailler et de les traduire en procédures pratiques.
Le Conseil note également que ce projet s’appuie à la fois sur la loi réglementaire relative à la définition des étapes d’activation du caractère officiel de l’amazighe et sur la loi réglementaire relative au Conseil national des langues et de la culture marocaines. Cependant, son contenu n’évoque pas ces lois. Le Conseil constate alors l’absence de données de base concernant la vision procédurale pour la mise en œuvre de l’ingénierie linguistique, et ce au niveau des :
- principes et piliers, en particulier la manière d’activer le principe d’équité et d’égalité des chances et comment s’acquitter des exigences du cadre législatif ;
- applications pédagogiques, notamment les contrôles relatifs au cadre de référence des cursus et aux référentiels des programmes et des formations, le rôle du comité permanent de révision des curricula et des programmes, la terminologie et les concepts de base, les niveaux de référence et les indicateurs de maîtrise de la langue, les mécanismes et règles de la délivrance des certificats et les ressources humaines ;
- applications institutionnelles.
Le Conseil insiste aussi sur la nécessité d’anticiper, en préparant les ressources humaines nécessaires et en définissant les conditions juridiques d’accès au métier d’enseignant de langues, et les conditions pédagogiques de formation, d’enseignement et d’évaluation professionnelle, notamment en définissant des normes et des niveaux de contrôle des compétences linguistiques nécessaires à la pratique de l’enseignement en langues.
Il appelle par ailleurs à la nécessité de fixer des délais maximaux pour la mise en œuvre des mesures procédurales d’application de l’ingénierie linguistique au niveau de chaque filière, niveau et composante du système éducatif, en plus de :
- ajuster le contenu du texte en ce qui concerne les définitions et les déterminants visant les applications d’ingénierie linguistique ;
- prendre en compte les documents de référence qui seront adoptés pour activer l’ingénierie linguistique ;
- mettre en place des structures et définir les rôles des acteurs à tous les niveaux ;
- adopter un suivi et une évaluation, notamment en procédant à des évaluations institutionnelles régulières des curricula, des programmes et des formations linguistiques.
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