La canicule menace la survie des arbres fruitiers

D’une grande importance sur le plan social et économique, les filières arboricoles et agrumicoles du pays n’ont pas été épargnées par les fortes chaleurs. Bien qu’elles soient onéreuses, à l’image des filets de protection, plusieurs mesures sont envisageables, à défaut d’apporter des irrigations d’appoint à cause de la pénurie d’eau.

Des mandarines ayant subis un coup de soleil

La canicule menace la survie des arbres fruitiers

Le 4 juillet 2023 à 17h49

Modifié 4 juillet 2023 à 18h35

D’une grande importance sur le plan social et économique, les filières arboricoles et agrumicoles du pays n’ont pas été épargnées par les fortes chaleurs. Bien qu’elles soient onéreuses, à l’image des filets de protection, plusieurs mesures sont envisageables, à défaut d’apporter des irrigations d’appoint à cause de la pénurie d’eau.

Depuis quelques semaines, plusieurs vagues de chaleur affolent les thermomètres aux quatre coins du pays. Les arbres fruitiers ont été impactés par ces températures élevées. Or, contrairement à d’autres espèces végétales dont le semis est annuel, les agriculteurs comptent sur une production issue des mêmes arbres d’une année à l’autre.

Il s'agit donc d'en prendre le plus grand soin, surtout quand les conditions climatiques sont défavorables. Généralement, c'est le cas "quand la température est supérieure à 40 degrés, avec une humidité inférieure à 40%. Dans ce cas, il suffit d'une heure d'exposition pour que les agrumes ressentent les premiers impacts. Au bout de 48 heures, les premières conséquences graves sont perceptibles", nous explique un spécialiste dans la région d’Agadir. 

Deux filières distinctes

Au Maroc, les arbres fruitiers sont répartis entre deux filières : la filière arboricole et la filière agrumicole.

Depuis 2008, la superficie de la filière arboricole a augmenté de 46% pour couvrir environ 400.000 ha, soit 5% de la superficie agricole utile nationale. Trois régions principales sont concernées, à savoir, Fès-Meknès (27% de la superficie arboricole), Tanger-Tétouan-Al Hoceima (20%) et l’Oriental (13%). 

Cette filière est caractérisée par trois groupes d’espèces :

- rosacées à noyaux (pêchers, prunier) : 234.981 ha pour une production de 548.350 t ; 

- rosacées à pépins (pommiers, poiriers, vignes) : 57.140 ha pour une production de 883.380 t ; 

- fruits rustiques (figuiers) : 84.715 ha pour une production de 280.300 t.

De son côté, le verger agrumicole national est dominé par trois groupes de variétés dont les clémentines (35% de la superficie agrumicole), les Maroc-Late (21%) et les navels (18%). La superficie agrumicole est répartie essentiellement entre cinq régions du Royaume :

- Souss-Massa : 32 % (40.344 ha) ; 

- Rabat-Salé-Kénitra : 20 % (25.293 ha) ; 

- L’Oriental : 17 % (21.100 ha).

Une diversité qui fait partie du patrimoine national mais qui subit de plein fouet la pénurie d’eau et des conditions climatiques plus que jamais désastreuses. C’est le cas notamment dans la région de Fès-Meknès, mais aussi dans le Souss-Massa. 

Des raisins qui flétrissent 

Les zones agricoles de la province de Meknès font état de plusieurs arbres fruitiers en mauvaise posture. À commencer par les vignes, "dont les raisins ont beaucoup de mal à supporter la hausse des températures par à-coups. Notamment lorsque le thermomètre est récemment passé d’un vingtaine de degrés à plus de 40°C", affirme à Médias24 Mounir Mouhib, conseiller agricole à l’Office national de conseil agricole à Meknès. 

"Dans ce cas, les jeunes grains se dessèchent et chutent parfois", indique le spécialiste en arboriculture fruitière. On peut également apercevoir des phénomènes tels qu’une réduction des cycles végétatifs ou un flétrissement des raisins. 

Des raisins impactés par les fortes chaleurs.

Les pommiers ne sont pas en reste. "Ils sont également en danger car ils ne supportent pas la chaleur et cela peut conduire à l’apparition de brûlures sur la peau du fruit", déplore notre interlocuteur. Les étés plus chauds et secs dégradent aussi la qualité des fruits avec des risques de coups de soleil et de déformation en l'occurrence.

Jaunissement et brunissement à retardement 

Plus au sud, la région de Souss-Massa est historiquement connue pour ses produits maraîchers mais aussi pour sa filière agrumicole dont la production annuelle avoisine les 700.000 tonnes. À l’instar de Fès-Meknès, le Souss-Massa est aussi concerné par des épisodes caniculaires qui ont un effet négatif sur les agrumes. 

À commencer par les coups de soleil, "ce sont des brûlures que l’on peut observer sur la peau du fruit. Cela se matérialise par un jaunissement en cas de faible brûlure, voire un brunissement en cas de brûlure aiguë", déplore un spécialiste agrumicole dans le Souss. déplore

En outre, un arrêt de l’évolution des calibres est aussi à redouter, "surtout quand la chaleur est jumelée à une faible humidité", poursuit notre interlocuteur. Dès lors, les producteurs se retrouvent avec des fruits de petit calibre, ce qui pose problème lors de la commercialisation.

Le développement de l’arbre subit également les affres des fortes chaleurs. "Par exemple, l’arbre ne réussit plus à renouveler son bois", souligne-t-il. "Dans ces conditions, l'arbre est en stress hydrique aigu, après avoir consommé ses réserves d’eau et celles du sol."   

Autre conséquence des fortes chaleurs sur les agrumes, en particulier les mandarines, c’est le brunissement à retardement. Ces brunissements apparaissent généralement des mois après que l’arbre a été exposé à une canicule. 

"Lors de la récolte, entre janvier et mars, le fruit est d’apparence normale. Par la suite, il est envoyé dans une station d’emballage pour être exporté. Une fois arrivé chez le client, un brunissement ou noircissement apparaît sur la peau sensible des mandarines car elles ont été agressées par les fortes chaleurs pendant l’été", avance notre interlocuteur. 

"Je me souviens d’une année où il y a eu des fortes chaleurs également lors du mois de janvier dans la région. Nous avons constaté entre 30% et 35% de brunissement, des mois après la récolte", se remémore-t-il.

Brunissement de mandarines des mois après la récolte.

Des filets de protection en l’absence d’irrigation d’appoint 

Face à cette hausse des températures fréquente et intense, les agriculteurs ne sont pas pour autant démunis. Plusieurs mesures sont envisageables. Pour les arbres fruitiers qui ne supportent pas la chaleur, comme les pommiers ou les poiriers, "il faudrait de préférence déplacer ces cultures en altitude où les températures sont beaucoup moins élevées", propose Mounir Mouhib.  

Dans le cas des vignes, "il est conseillé de mettre des filets, qui permettent de créer de l’ombre. D’ailleurs, les raisins qui ont été brûlés ne disposaient pas de filet pour les protéger", poursuit le conseiller à l’ONCA. Ces filets sont également utilisés pour protéger les agrumes en temps de canicule. 

"Au départ, nous utilisons ce filet pour éviter la pollinisation de la Nadorcott par les abeilles et se prémunir des croisements avec une variété à pépins. Puis nous l’avons mis en place pour assurer un ombrage qui permet de réduire les risques de coup de soleil", avance le spécialiste en agrumes. 

Toutefois, ce filet qui diffère des filets contre la grêle et de ceux destinés à la protection des cultures maraîchères sous serre, n’est pas à la portée de tous les producteurs "car contrairement aux deux autres types de filets, il n’est pas subventionné", regrette notre interlocuteur, précisant que son coût est de 200.000 DH/ha.   

Enfin, il est à noter que l’irrigation est de moins en moins privilégiée en période de canicule à cause de la pénurie d’eau dont souffre le Royaume. "Nous sommes passés de 6 à 2 heures d’irrigation par jour dans les zones arboricoles de la province de Meknès", conclut Mounir Mouhib. 

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