Une conversation avec Yassine Mseffer, directeur général du CRI Marrakech-Safi

Facilitation du parcours de l’investisseur, accompagnement de l’entrepreneur, promotion de la région, libéralisation du foncier industriel, coordination entre les acteurs régionaux... Le Centre régional d’investissement de Marrakech-Safi veut renforcer l’attractivité économique et stimuler l’investissement dans la région.

Le Directeur Général du Centre Régional d'Investissement de Marrakech-Safi (CRI-MS), M. Yassine Mseffer, donne une déclaration à l’occasion de la 1ère édition du Rhmana Investor Day. 11102022 – Benguérir

Une conversation avec Yassine Mseffer, directeur général du CRI Marrakech-Safi

Le 18 octobre 2022 à 10h53

Modifié 18 octobre 2022 à 13h40

Facilitation du parcours de l’investisseur, accompagnement de l’entrepreneur, promotion de la région, libéralisation du foncier industriel, coordination entre les acteurs régionaux... Le Centre régional d’investissement de Marrakech-Safi veut renforcer l’attractivité économique et stimuler l’investissement dans la région.

“Le CRI doit accompagner la région dans son développement. Il peut donc être considéré comme une sorte d’agence de développement régional.” C’est en ces termes que Yassine Mseffer, directeur général du Centre régional d’investissement (CRI) de Marrakech-Safi, décrit le rôle que son institution essaie de jouer pour dynamiser l’investissement dans la région.

On n’attend pas que les investisseurs viennent toquer à notre porte. Ceux qui viennent nous voir représentent une infime partie des investisseurs potentiels”, a-t-il estimé auprès de Médias24, en marge du Rhamna Investor Day, la troisième étape d’un roadshow que le CRI a entamé et qui l’a déjà mené à Marrakech et Safi.

“Depuis l’impulsion de la ville verte, et de par sa proximité avec Marrakech, on pense que Rhamna est la nouvelle Silicon Valley de Marrakech et du Maroc. C’est aujourd’hui un pôle de compétitivité et d’excellence en matière de savoir, de recherche et développement, d’innovation, de technologie et de durabilité”, revendique notre interlocuteur.

La communication, importante mais insuffisante

D’après lui, tout un écosystème est en train de germer autour de l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) à Benguerir, notamment avec le data center, le supercalculateur, le Green Energy Park et l’Institut de recherche en énergie solaire et énergies nouvelles (Iresen).

Pour atteindre les investisseurs potentiels, Yassine Mseffer mise sur le marketing territorial. “Un gros travail est fait depuis trois ans. Il a fallu aller vendre la région”, défend-il. Le CRI a ainsi mené des campagnes marketing, avec une nouvelle identité visuelle, un nouveau portail et un film institutionnel.

Mais il ne suffit pas de communiquer : “Ce qui rend la région attractive, c’est un foncier disponible et compétitif, un coût compétitif en termes d’accès à l’énergie, la décarbonation, la disponibilité des talents et des données fiables et gratuites.”

C’est une nouvelle mission fondatrice: notre client n’est plus seulement l’investisseur, mais aussi la région et les acteurs régionaux.

“On peut être perçus comme une agence de développement économique, mais on est surtout un coordinateur et un dynamiseur. On n’existe que par les autres, en l’occurrence les acteurs régionaux et centraux, avec lesquels on coordonne pour faire avancer les choses”, poursuit notre interlocuteur.

Au sujet de sa relation avec le Conseil régional, il dit travailler en symbiose et dans une intelligence collective, aidé en cela par la convergence des finalités, celles relatives à la création de la valeur et des emplois. Car les Conseils régionaux, qui disposent de budgets conséquents, ont parmi leurs prérogatives le développement économique. C’est ainsi que le Conseil régional travaille avec le CRI sur la création d’un fonds régional de promotion de l’investissement, à l’instar d’autres régions.

Procurer le foncier industriel, un défi pour le CRI

Sur la question du foncier également, le CRI travaille de concert avec les acteurs régionaux pour rendre disponibles des lots de terrain pour les investisseurs. Un défi majeur, reconnaît Yassine Mseffer : “On ne peut pas parler d’incitations sans parler de mise à disposition d’un foncier compétitif.”

Plutôt que d’être alarmistes et de dire que la situation sur le foncier était insurmontable, on a cherché des solutions.

“On a réalisé un film institutionnel pour promouvoir l’investissement dans la région Marrakech-Safi. On a filmé les infrastructures ferroviaires et routières, les ports, les aéroports, les datas centers, les universités... mais on a eu beaucoup de mal à trouver des zones d’activités économiques et industrielles qui puissent être vendeurs”, reconnaît-il. “Mais plutôt que d’être alarmistes et de dire que la situation était insurmontable, on a cherché des solutions. On a commencé il y a un an, avec la province de Rhamna, sur un parc industriel existant de 357 lots. Il s’agit d’un parc industriel aux portes de Marrakech, à des prix très compétitifs, mais sur lequel il y a eu seulement 8% de valorisation, alors que 99% des lots étaient déclarés vendus.”

“Il s’est avéré que les deux tiers n’avaient pas terminé le processus d’acquisition du foncier et que certains n’avaient même pas complété le paiement du terrain. On a alors mis en place, avec tous les acteurs publics et régionaux, une politique de déchéance de lots, ce qui n’est jamais facile ni agréable à faire”, ajoute Yassine Mseffer.

Cela a permis de récupérer 69 lots qui ont été remis sur le marché. Une trentaine d’industriels sont déjà en train de construire pour mettre en œuvre leurs projets, notamment ceux qui entrent dans le cadre de la banque de projets d’import-substitution. Ces projets représentent un investissement total de plusieurs milliards de dirhams, qui devra créer près de 1.500 emplois.

Le CRI de Marrakech-Safi poursuit sur cette voie pour libérer, sur ce parc industriel de Sidi Bouathmane, à 20 km de Marrakech, un total de 157 lots. Ce parc devra s’équiper prochainement d’une zone logistique, d’un agropole et d’un marché d’intérêt national.

D’autres projets structurants autour de Rhamna, Safi (Khatazakane), Essaouira (Douar Laarab) et Harbil (Tamansourt) sont portés par le Conseil régional pour assurer une assiette foncière de près de 1.500 hectares, afin de servir de plateformes industrielles et logistiques.

Près de 1.000 entrepreneurs accompagnés par le CRI

L’accompagnement de l’entrepreneur et de la TPE est inscrite dans la loi parmi les missions fondamentales des CRI. “On accompagne tous les grands investisseurs, mais on fait un focus particulier sur les entrepreneurs et la TPE car ce sont les employeurs de demain ; ce sont eux qui forment le tissu socio-économique”, souligne le responsable.

“On a commencé par des programmes exclusifs, tels que le CRI Boost Lab ou le CRI Speed Banking, avec nos partenaires institutionnels et financiers. On a accompagné plus de 1.000 porteurs de projets pour les coacher et les préparer au financement. Aujourd’hui, 403 porteurs de projets ou entrepreneurs ont des accords de principe ou des accords de financement”, précise-t-il.

Face à la diversité des profils d’entrepreneurs, principalement de jeunes urbains, des ruraux et des Marocains du monde, le CRI a dû concevoir des programmes différents et adaptés à chacune de ces cibles.

Le Water show hackathon, un hackathon dédié aux solutions à la problématique de la sécheresse, a sélectionné vingt entrepreneurs triés sur le volet pour bénéficier d’un accompagnement pendant une année. Concernant le programme Intelaka, le CRI préside le comité de coordination et d’accompagnement, qui comprend Bank Al-Maghrib, Tamwilcom, l’Anapec et toutes les banques. Ce comité se réunit une fois par mois. La région a clôturé l’année dernière sur le podium, à la troisième place.

Près de 1.000 entrepreneurs sont accompagnés par le CRI. Mais ce n’est pas suffisant ; il faut désormais massifier cet accompagnement. C’est pour cette raison que les CRI ont signé des conventions avec Tamwilcom, qui ont permis de lancer des appels d’offres d’accompagnement des porteurs de projets Intelaka, ce qui nous permettra d’inclure en quelques mois plusieurs milliers de porteurs de projets.”

La mission de guichet unique renforcée

Depuis décembre 2019 et l’entrée en vigueur effective de la réforme de la loi 47-18, les CRI ont vu leurs missions et prérogatives élargies. Vingt ans après leur création, ils ont toujours une mission historique, communément appelée “guichet unique”. Une sorte de one stop shopping qui permet de faciliter l’acte d’investir. La nouvelle loi a renforcé et musclé cette mission.

Le délai de traitement des dossiers est passé de plusieurs semaines, voire quelques mois, à moins de douze jours.

Le directeur du CRI de Marrakech-Safi explique ainsi comment les Commissions régionales unifiées de l’investissement (CRUI), qui ont l’obligation de se tenir au moins une fois par semaine, ont permis un gain de temps considérable. “Avant, l’investisseur devait parfois passer par douze commissions différentes. Le délai de traitement des dossiers est passé de plusieurs semaines, voire quelques mois, à moins de douze jours.”

“Avant la loi, en 2019, ces commissions se sont tenues quatre fois. En 2020, malgré la crise du Covid, elles se sont réunies 44 fois. En 2021, elles se sont réunies 65 fois, plus d’une fois par semaine”, poursuit-il.

Par ailleurs, le CRI offre actuellement une dématérialisation des procédures, notamment à travers la plateforme CRI-Invest, mise en place par le ministère de l’Intérieur. Elle permet à tout investisseur d’entamer les procédures d’investissement, tout en lui garantissant la traçabilité et le suivi de son dossier. Elle offre par ailleurs un accès à des outils comme le CRI Analytics, qui fournit à l’investisseur une batterie de données censées l’aider à prendre sa décision d’investir.

“On a travaillé avec des partenaires tels qu’Acumenia et Valyans pour mettre en place des outils basés sur l’intelligence artificielle afin de récupérer la donnée, qu’il s’agisse de la donnée objective ou de la donnée subjective, c’est-à-dire le sentiment, aujourd’hui très importante. On a mis en place le cadre mais on a besoin des autres acteurs, qu’ils soient régionaux ou centraux, pour qu’ils y contribuent également avec de la data”, précise Yassine Mseffer.

Marrakech appelée à investir de nouvelles niches touristiques

La crise du Covid a alerté les acteurs régionaux sur l’importance d’accélérer la diversification dans d’autres activités, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il faille laisser tomber l’investissement dans le tourisme. “Sur le plan touristique, Marrakech en est encore à ses balbutiements ; il y a encore tellement de choses à faire !” Si la ville réussit aujourd’hui pleinement dans le “city break” (les séjours de courte voire très courte durée), d’autres niches doivent encore être explorées comme le tourisme d’affaires, le tourisme médical, le tourisme de bien-être et le tourisme rural.

Sur le front industriel également, la région a toute légitimité à développer des filières autres que le tourisme, telles que l’Agritech, les plantes aromatiques et médicinales, l’industrie culturelle et créative et la mobilité durable, énumère Yassine Mseffer.

Le projet d’écovillage de Sidi Kaouki couronné de succès

“A Sidi Kaouki, nous avons lancé, avec la province d’Essaouira et tous les acteurs provinciaux et régionaux, un appel à projet écotouristique. Nous avons mis en place une banque de projets touristiques, formant une sorte d’écovillage avec des lots allant de 300 m² à 3 ha”, nous informe encore le responsable.

“Il y a différents types d’hébergements, l’animation, la culture, le loisir. Ça a été un véritable succès ; nous avons reçu plus d’une cinquantaine de demandes. Au total, 30 investisseurs ont été retenus ; parmi eux des champions dans leur catégorie respective. Nous avons même un investisseur qui compte y ouvrir un musée d’art moderne”, se réjouit Yassine Mseffer.

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