En visite au Maroc pour la première fois depuis le début de la pandémie, Rami Scandar, président d’AstraZeneca Proche-Orient et Maghreb, répond aux questions de Médias24 dans le cadre d’une interview à propos, notamment, du transfert de production de vaccin, du produit Evusheld et des actions d’AstraZeneca au Maroc.

Médias24 : Quel est l’objet de votre visite au Maroc ?

Rami Scandar : Le Maroc est un pays très important pour la région du Proche-Orient et du Maghreb, dont je suis chargé. Il est en 3e position en termes de part de marché. Je suis donc présent ici pour réaliser le suivi de l’introduction d’un produit pour le traitement du diabète, lancé en 2021.

Nous essayons d’introduire également trois produits dans le domaine de l’oncologie : un premier pour le traitement des cancers de l’ovaire et du pancréas, un deuxième pour le cancer du sang et un dernier pour le traitement du cancer du poumon, qui permettrait d’augmenter la durée de vie du patient de deux ans.

- La majorité des médicaments et produits d’AstraZeneca sont-ils commercialisés au Maroc ?

-AstraZeneca commercialise actuellement près de 40% de ses produits au Maroc. D’ici trois ans, on vise la distribution de 80% des produits AstraZeneca dans le royaume. Une douzaine y sont déjà commercialisés et quatre sont en cours d’enregistrement. Ils font d’ailleurs l’objet de ma visite.

- Comment AstraZeneca est-il présent au Maroc ?

-Nous avons plusieurs projets au Maroc. Le plus important concerne le diagnostic ciblé du cancer du poumon afin de décider du traitement adéquat qui doit être utilisé.

Nous améliorons la prise en charge du cancer du poumon en proposant des tests EGFR dans trois centres, à Marrakech, Fès et Rabat. Ceci fait partie de notre partenariat avec la fondation Lalla Salma de lutte contre le cancer. Cette prise en charge permet d’aider environ 800 patients par an en leur fournissant des tests de biopsie d’une valeur de 400 dirhams par kit.

D’autre part, concernant le traitement du diabète, nous organisons des formations de médecins au niveau local, afin de les accommoder à un nouveau traitement du diabète (SGLT) différent des précédents.

- Votre groupe envisage-t-il de réaliser un transfert de technologies et de production dans la région Proche Orient-Maghreb afin d’améliorer l’accessibilité des médicaments, notamment, au vaccin contre la Covid-19 ?

-AstraZeneca est en partenariat avec 25 entités pour la distribution et la production du vaccin contre le Covid-19 dans une quinzaine de pays répartis entre l’Europe, l’Asie et l’Amérique.

A ce jour, nous avons fourni plus de 2,6 milliards de doses à plus de 180 pays. Environ deux tiers de notre approvisionnement mondial est destiné aux pays en voie de développement.

Certes, il n’y a pas de producteur ou de distributeur dans la région du Maghreb et du Moyen-Orient, mais pour le moment, tous ces partenariats suffisent à couvrir les besoins de ces pays. Nous n’avons pas besoin, actuellement, de mettre en place de nouvelles entités de production et de distribution. Ce n’est donc pas prévu pour l’instant.

Si une exigence et une croissance de la demande du marché se manifestent, nous pourrons envisager de mettre en place de nouvelles entités.

- Quelles sont les conditions spécifiques à la mise en place d’une entité de production de vaccins dans un pays ?

-La production des vaccins n’est pas facile. La fabrication du vaccin à grande échelle est un processus extrêmement complexe et l’installation d’un nouveau site de production prend beaucoup de temps. Tous nos partenariats de production se trouvent dans des usines ayant déjà une expérience en matière de production de vaccins.

En revanche, la production de traitements et de médicaments est moins compliquée que la production de vaccins. Le transfert technologique est plus simple.

- Quels sont les défis du Maroc pour mettre en place une usine de production de vaccins ?

-Le transfert technologique est un défi de taille. La production de vaccins nécessite une formation spécifique qui prendrait beaucoup de temps. Il faut des gens formés à cette production et qui disposent d’une expérience dans le domaine.

- La pandémie a-t-elle retardé le développement de nouveaux traitements au sein d’AstraZeneca ?

-Non, les services de recherche et développement sont présents dans plusieurs entités d’AstraZeneca et plusieurs pays. Le vaccin contre la Covid-19 a été développé au Royaume-Uni, en collaboration avec Oxford. Les autres unités continuent leurs recherches et ont pu poursuivre leurs études concernant le développement de traitements et produits qui n’ont rien avoir avec la Covid-19.

- L’activité d’AstraZeneca a-t-elle pu profiter de la vente des vaccins depuis le début de la pandémie?

-La vaccin a été distribué en 2020 et 2021 sans profit. Autrement dit, le vaccin a été vendu au coût de production. En 2022, le prix de vente dans chaque pays se basera sur le PIB par habitant. AstraZeneca continuera de distribuer le vaccin sans profit pour les pays à revenus faibles et intermédiaires.

- Aujourd’hui, Evusheld, la combinaison d’anticorps à action prolongée d’AstraZeneca, a obtenu une autorisation de mise sur le marché dans l’Union européenne afin de prévenir l’infection au Covid-19. En quoi consiste ce traitement ?

-Le vaccin, à lui seul, ne permet pas une protection convenable pour les personnes les plus vulnérables qui ont un système immunitaire très faible, comme par exemple les personnes avec des cancers, sous chimiothérapie, ayant fait un transfert d’organe ou celles qui prennent un traitement impactant leur immunité. Ces personnes ne sont pas vraiment protégées par le vaccin.

Elles doivent donc prendre des anticorps, comme le Evusheld, qui se présente sous forme de deux injections qui garantissent une protection sur 12 mois.

D’autre part, les personnes qui sont exposées au virus ou se rendent dans des lieux à risques peuvent prendre le Evusheld pour se protéger.

Les Etats-Unis ont été les premiers à autoriser ce traitement. Nous sommes actuellement en discussion avec le ministère marocain de la Santé pour commercialiser ce traitement au Maroc. Pour l’instant, Evusheld est utilisé pour la prévention et non le traitement du Covid-19.

En juillet 2022, nous aurons suffisamment de résultats pour juger si ce dernier peut être utilisé en tant que traitement du Covid.