Létalité, valeur ajoutée, emploi, activité économique: voici l'impact du Covid par région
Selon le dernier Policy Brief de la Direction des Etudes et des Prévisions Financières (DEPF), réalisé en partenariat avec la Banque mondiale, les régions marocaines n’ont pas été touchées de la même manière par la crise socio-économique engendrée par la pandémie.
Létalité, valeur ajoutée, emploi, activité économique: voici l'impact du Covid par région
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Anass El Rhazi
Le 30 juin 2021 à 11h40
Modifié 2 juillet 2021 à 15h09Selon le dernier Policy Brief de la Direction des Etudes et des Prévisions Financières (DEPF), réalisé en partenariat avec la Banque mondiale, les régions marocaines n’ont pas été touchées de la même manière par la crise socio-économique engendrée par la pandémie.
Dans son rapport du mois de juin 2021, la Direction des Etudes et des Prévisions Financières (DEPF) a présenté les résultats d’une étude qu’elle a réalisée, en partenariat avec la Banque Mondiale. Cette étude a pour but d’évaluer l’impact social et économique de la crise sur les différentes régions du Maroc et de formuler des recommandations afin « d’impulser le développement des territoires, de renforcer leur résilience globale pour mieux relever les défis de relance post-Covid-19 et d’anticiper les transformations qui se profilent ».
La région Beni Mellal-Khénifra enregistre le taux de létalité le plus élevé
Malgré la concentration de plus de 50% des cas dans les deux régions de Casablanca-Settat et de Rabat-Salé-Kenitra, ces dernières enregistrent les taux de létalité les plus faibles du royaume (1,2%).
Cette situation est expliquée par le fait que ces deux régions ont le nombre d’habitants par médecin le plus bas du pays (Rabat-Salé-Kenitra avec 835 habitants/médecin et Casablanca-Settat avec 1.015). Inversement, la région Beni Mellal-Khénifra qui compte le plus d’habitants par médecin (2.544) enregistre le taux de létalité le plus élevé (2,9%).
Impact social
Les restrictions de déplacement, l’arrêt temporaire du travail et les mesures de confinement instaurés ont eu des répercussions profondes sur le marché de l’emploi, plus particulièrement dans le secteur informel qui se caractérise par l’absence des filets de la sécurité sociale.
Ainsi, la région de l’Oriental et les régions du Sud, qui se caractérisent par la présence d’une grande part de l’informel dans l’emploi non agricole, ont enregistré les taux de chômage les plus élevés au niveau national (respectivement 20,7% et 19,8%).
Outre le secteur informel, la sécheresse qu’a connu le pays les deux dernières années, conjuguée aux effets des mesures sanitaires, a frappé de plein fouet le secteur agricole. Par conséquent, les régions à connotations agricoles, notamment les régions de l’Oriental, du Drâa-Tafilalet et de Fès Meknès, ont été significativement touchées par la crise à travers un écart de chômage supérieur à l’écart national.
Impact économique
Dans le but de mesurer les coûts économiques de la pandémie et d’analyser ses conséquences aux niveaux sectoriel et territorial, la DEPF a basé son approche sur le tableau entrées-sorties régional qui prend en compte les interdépendances entre les 20 secteurs d’activités, qui composent l’économie marocaine, détaillés au niveau des 12 régions du royaume.
Ainsi, il a été constaté que la ponction économique de 53.947 millions de dirhams causée par la crise au niveau national pendant 2020 cache des écarts sectoriels importants, et intègre également les effets de la sécheresse. Par exemple, quand la baisse du PIB national en 2020 est de 5,3%, les activités de l’hôtellerie et de la restauration ont vu leur valeur ajoutée chuter de 55,8% entre 2019 et 2020 à cause de l’arrêt brutal de l’activité touristique.
C'est la spécialisation économique des zones géographiques qui explique ces disparités selon la DEPF, qui a identifié trois groupes de régions eu égard à leurs taux de perte de valeur ajoutée :
L'Oriental et Marrakech-Safi ont subi les plus grosses pertes de Valeur ajoutée en valeur relative, Casablanca-Settat en valeur absolue
- Le premier groupe, profondément impacté, qui regroupe les régions de l’Oriental (-9,8%), Marrakech-Safi (-9,6%), Souss-Massa (-8%) et Béni Mellal-Khénifra (-6,8%), est spécialisé dans les activités liées au tourisme, aux activités fortement dépendantes de la demande mondiale ou celles caractérisées par une présence importante de l’emploi informel.
- Le deuxième groupe formé des régions modérément touchées, Il s’agit des régions de Laâyoune-Sakia El Hamra (-6,2%), Guelmim-Oued Noun (-5,8%), Fès-Meknès (5,2%), Casablanca-Settat (-5,1%) et Dakhla-Oued Ed Dahab (-5%). Ces régions sont généralement spécialisées dans les secteurs modérément impactés par la crise sanitaire et dont la part de l’emploi informel est relativement faible.
- Le troisième groupe, considéré relativement résilient aux effets de la crise, est constitué des régions de Tanger-Tétouan-Al Hoceima (-1,6%), Rabat-Salé-Kenitra (-2,5%) et Drâa Tafilalet (-4,3%). Ces régions sont caractérisées par une présence relativement élevée des activités de support, des activités non marchandes de l’administration ou des activités ayant profité de cette crise.< Tourisme, transport, IMME les plus impactés
Jusqu’à quel point les mesures de soutien à l’économie ont-elles été efficaces ?
En parallèle des mesures de protection sanitaire mises en place par les pouvoirs publics, des mesures de soutien économique ont été déployées à la fois du côté de l’offre (indemnités ciblées en faveur des travailleurs du secteur informel et du secteur formel en arrêt d’activité) et du côté de la demande (garantie publique des crédits bancaires a été conçue pour soutenir les secteurs productifs afin de maintenir leur activité et préserver les emplois).
Et afin de pouvoir évaluer l’impact de ces mesures sur l’atténuation des pertes en valeur ajoutée, la DEPF a construit un scénario hypothétique qui neutralise les mécanismes déployés dans la réalité, et a conclu que ces politiques ont permis un gain de l’ordre de 20.560 millions de dirhams, soit 1,5 point de pourcentage de la valeur ajoutée. Dans ce cas figure, le PIB du pays aurait chuté de 6,84% au lieu de 5,3% dans la réalité.
Quels enseignements peut-on tirer de cette situation ?
Cette crise a pu mettre en lumière le rôle central que peuvent jouer les régions dans la gestion territoriale et la coordination entre les différents acteurs locaux.
A ce titre, les collectivités territoriales ont été mobilisées pour constituer des Comités de Veille Économique (CVE) à l’échelle des régions, dont le rôle consiste à gérer la mise en œuvre des mesures décidées au niveau central et à proposer des mesures spécifiques à certains territoires.
Les Centres Régionaux d’Investissements (CRI) ainsi que les banques et les chambres professionnelles ont, de leur côté, été impliqués pour la sensibilisation et l’accompagnement des entreprises pour bénéficier des produits de la Caisse Centrale de Garantie. Cependant, ces réponses conjoncturelles face à la crise ne doivent pas faire oublier leurs aspects circonstanciels en raison de la nature structurelle de ces problématiques.
Quels leviers pour consolider les bases d’un développement territorial ?
Ainsi, dans la perspective de renforcer les capacités d’action des acteurs territoriaux, la DEPF a formulé quelques recommandations :
- Le renforcement de la coordination entre les niveaux central et local en dotant les acteurs territoriaux de moyens d’action suffisants ;
- La poursuite des mesures sociales et de relance économique en faveur des plus démunis et aux secteurs les plus fragilisés par la pandémie ;
- L’établissement de services sanitaires de qualité accessibles à tous, l’instauration d’un système éducatif performant et la revalorisation des compétences afin de développer un système de gouvernance pour les secteurs de la santé et de l’éducation ;
- La création d’écosystèmes industriels au niveau local, en tenant compte des avantages comparatifs des différentes régions, pour réduire les degrés de dépendance des chaînes d’approvisionnement ;
- L’accélération du déploiement sectoriel et territorial du système de protection sociale ;
- Le renforcement de la capacité budgétaire des collectivités locales ;
- La simplification des procédures et l’investissement dans le domaine du numérique afin de renforcer la connectivité des territoires ;
- L’encouragement des investissements dans les énergies renouvelables pour fonder une économie durable.