Loi-cadre sur l’enseignement: le blocage persiste

Le projet de loi-cadre sur l’enseignement bloque toujours sur l’article 31, celui qui propose d’enseigner les matières scientifiques et techniques dans des langues vivantes étrangères.

Loi-cadre sur l’enseignement: le blocage persiste

Le 4 mars 2019 à 14h34

Modifié 11 avril 2021 à 2h39

Le projet de loi-cadre sur l’enseignement bloque toujours sur l’article 31, celui qui propose d’enseigner les matières scientifiques et techniques dans des langues vivantes étrangères.

La commission de l'Education se réunira les lundi et mardi 11 et 12 mars 2019 pour essayer de trouver un compromis sur l'article 31 du projet de loi-cadre 51.17.

Les sources du blocage sont l’Istiqlal et le PJD. Le premier estime probablement que la question linguistique est son territoire et qu’aucun autre parti ne doit pouvoir surenchérir sur ce thème.

Le PJD est, lui, en butte à une autre contradiction : il conduit le gouvernement et en tant que tel, il ne peut bloquer une loi présentée par le gouvernement et adoptée en conseil des ministres.

C’est pour cela que de nombreuses discussions en coulisses avaient eu lieu en marge des réunions de la commission parlementaire de l’éducation. L’une des réunions avait été présidée par Habib Malki, président de la Chambre des représentants et il y a avait eu accord général autour d’un amendement de l’article 31. Le fac-similé ci-dessous présente l’article 31 dans sa version originale.

Selon une source interne à la commission, cet amendement a été accepté par tous les députés membres de la commission mais a été refusé par le ministre de l’Education nationale. Le PJD étant le parti qui conduit le gouvernement, il lui est quasiment impossible, sans se désavouer, de passer outre le refus du gouvernement.

L’amendement en lui-même appelle des remarques. Il ne s’agit pas vraiment d’un amendement de fond, mais surtout d’un amendement de forme. Il fait de l’article 31 un article miné, puisqu’il reporte la résolution du différend à des dates ultérieures. La version d’origine affirmait des principes et donnait le feu vert au gouvernement d’agir par voie réglementaire, pour préciser quelles sont les matières ou modules concernés. L’amendement remplace pouvoir réglementaire par pouvoir législatif. Il enlève également l'enseignement des "disciplines" pour ne garder que l'enseignement de "modules et d'unités". Cela signifie que pour chaque module ou chapitre enseigné dans une langue étrangère, il faudra passer par une loi.

On voit d’ici les blocages possibles, les débats sans fin. C’est surtout contraire à l’esprit d’une loi-cadre. Au lieu de servir de cadre général qui mettrait la réforme de l’enseignement à l’abri des aléas politiques, elle donne davantage de marge d’action aux futures majorités pour agir sur le contenu.

Samedi 2 mars 2019, la réunion du secrétariat général du PJD a évoqué le blocage du projet de loi-cadre. Après la réunion (vidéo ci-dessous), le secrétaire général adjoint Souleiman El Omrani a "de nouveau rappelé que le parti se situe dans une logique de compromis pour faire aboutir le projet de loi".

Contacté par nos soins, M. El Omrani nous a déclaré que sur "les questions stratégiques telles que la mise en oeuvre de l'officialisation de la langue amazigh, le Conseil national des langues ou le projet de loi-cadre sur l'enseignement, le PJD estime que tout le monde doit sortir des positionnements idéologiques et qu'il est dans l'intérêt du pays d'aboutir à l'unanimité sur ces sujets, grâce à des compromis". Cela étant dit, des sources sûres annoncent à Médias24 l'absence de toute avancée pour le moment, malgré la multiplication des contacts entre les différentes parties.

Le débat sur l'article 31 porte sur la langue d'enseignement et non pas sur l'enseignement des langues. Ce deuxième point a déjà été tranché. Les langues étrangères seront désormais enseignées à l'école publique.

Le débat porte donc sur l'utilisation d'une langue étrangère, essentiellement le français et l'anglais pour enseigner des matières scientifiques et techniques, sachant que les formules (par exemple les équations) resteraient exprimées en alphabet latin.

La société civile a été étrangement silencieuse. Les voix qui s'élèvent pour soutenir cette disposition sont peu nombreuses et se font vertement tancer par les partis qui s'y opposent, certains n'hésitant pas à exprimer une forme d'excommunication à leur encontre et à évoquer un lobby qui veut perpétuer la colonisation française du Maroc.

Certaines voix estiment qu'il faut enseigner les matières scientifiques en langue arabe car les élèves ont du mal à suivre et les enseignants pas préparés.

Effectivement, 30% des bacheliers scientifiques optent à l'issue de leur baccalauréat, pour une filière non scientifique en langue arabe. Pour réduire ou éliminer ce gâchis, faut-il mettre les sciences à la portée des élèves peu ou mal formés en langues étrangères, en les enseignant en arabe? Ou bien faut-il relever le niveau des élèves et des enseignants en renforçant leur formation en langues étrangères?

A supposer que l'on opte pour la première solution: des élèves formés en langue arabe pour les sciences ont-il réellement des chances de suivre des études de haut niveau dans les universités étrangères et de faire partie de l'élite internationale? Ces parcours resteront réservés aux élèves des écoles privées ou des missions étrangères, enfermant les autres dans des trappes et perpétuant les inégalités.

Pendant ce temps, les politiques qui au parlement défendent avec virulence l'arabisation totale, inscrivent leurs progénitures à la mission française, dans les écoles américaines ou dans les meilleures écoles privées.

>>Lire aussi: Loi-cadre sur l'enseignement: le débat dans et en dehors du parlement

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