La Chine est le principal producteur mondial, mais le Vietnam se lance à son tour dans la production, à un moment où les cours sont en baisse. C’est donc un des points importants débattus à Marrakech lors de la conférence mondiale sur la fluorine "Fluorspar 2015", du 6 au 8 octobre.

Chaque année, six millions de tonnes de fluorine sont extraites dans le monde. Et l’acide fluorhydrique qui en découle se retrouve dans les aérosols, les réfrigérateurs, les climatiseurs, les céramiques, mais aussi dans l’aluminium ou l’acier. Pour ce dernier, par exemple, la fluorine aide à la fluidité du mélange et permet de réduire la température de fusion, ce qui provoque une baisse sensible de consommation d’énergie. C’est aussi un piège pour toutes les impuretés.

C’est donc un minerai essentiel à notre vie de tous les jours, que l’on trouve sur tous les continents, mais produit pour plus de 50% en Chine. Un marché relativement stable jusqu’ici, mais qui risque fort d’être perturbé par l’arrivée en force du Vietnam qui s’apprête à produire 200.000 tonnes par an. A titre de comparaison, le Maroc, avec sa mine près de Meknès tourne autour de 80.000 tonnes par an… "C’est vrai, constate Youssef El Hajjam, directeur des activités métaux précieux et fluorine au sein de Managem, mais nous produisons une fluorine de haute qualité, qui intéresse beaucoup le marché européen." "Comme nous sommes proches, nous gagnons beaucoup sur le fret."

Il n’empêche, et tout le monde le constate à Fluorspar 2015, que le marché est quelque peu morose depuis un an ou deux en raison de la chute des cours, de près de 30%. Principale raison: la baisse de la croissance en Chine, car si le pays est un grand producteur, c’est aussi un grand consommateur de fluorine. Alors, dans ce contexte, l’arrivée du Vietnam sur le marché n’enchante guère!

Le Maroc, optimiste pour 2017

Pourtant Youssef El Hajjam reste optimiste: "2016 va être encore un peu dur, mais dès 2017, je pense que les prix vont remonter. Ne serait-ce que parce que, dans la situation actuelle, certaines mines du continent africain ont fermé ou se sont mises en sommeil, diminuant ainsi l’offre."

Et notre interlocuteur a d’autres arguments forts à faire valoir: "En 2002 et 2003, les cours étaient autour de 140 dollars la tonne de fluorine". "Aujourd’hui, on est à 300 dollars la tonne. Même si c’est loin des 600 dollars que l’on a connu, ce n’est quand même pas mal! D’autant plus qu’au moment où on était à 600 dollars, on en a profité pour faire des investissements complémentaires qui nous aident aujourd’hui à rester compétitifs. L’avantage d’appartenir à un groupe minier comme Managem est très important car si nous étions seuls avec des charges fixes élevées, peut-être que l’on n’aurait pas survécu."

"Mais là, il y a beaucoup de synergie entre les différentes mines, notamment en R&D, avec le centre de recherche de Marrakech. Les achats aussi sont centralisés, avec une capacité de négociation importante. Donc nous avons la capacité de réduire énormément nos frais. Et puis il ne faut pas oublier que le dollar a par ailleurs progressé ces derniers temps par rapport au dirham. Cela compense en partie la baisse des cours. Vu qu’une grande partie de nos coûts est en dirham ou en euro, nous sommes donc compétitifs sur cet aspect-là également."

L'OCP a la capacité d'extraire la fluorine

Quant aux réserves de minerai, elles restent relativement élevées: en Chine, on parle d’une réserve de 24 millions de tonnes, soit au moins sept ans de production pour le pays. Le Vietnam arrive sur le marché avec 20 ans de réserves, au moins. Ce n’est donc pas un marché où il y a un risque de pénurie à court terme.

D’autant plus qu’il y a d’autres sources de fluorine: l’OCP, par exemple, sait que les phosphates contiennent un peu de fluorine. L’entreprise a la capacité de l’extraire, même si au stade actuel, ce n’est pas rentable. Mais à des cours plus élevés, ou en cas de baisse trop forte des réserves, ce sera une source d’approvisionnement complémentaire…