Les annonces faites par le Ministre de l’Habitat Nabil Benabdallah en début de semaine, dans le sens d’une simplification des autorisations de construction, ont envoyéun message positif au secteur. Toutefois, les professionnels attendent des signaux forts en provenance du marchéou de la commande publique, seuls àmême de redonner un élan décisif àla production.

Le BTP renoue avec une timide croissance en 2015

La valeur ajoutée affiche une progression de 1,4% au 1er trimestre 2015 en variation annuelle, selon les estimations du HCP. Au cours de l’année 2014, le secteur du BTP a connu une quasi-stagnation autour de 0,4% de taux de croissance annuelle.

Selon l'enquête de conjoncture du HCP les professionnels anticipent une hausse du rythme de production des logements, après une baissede 1,1% courant 2014.

736 conventions relatives àplus de 1,2 million de logements dont 350.745 sont en cours de construction, ont étémises en œuvre au terme du premiers mois de l’année 2014. Dans ces conditions, le secteur du bâtiment et travaux publics, devrait enregistrer un rythme d’accroissement de 2,3% en 2014, contre 1,4% un an auparavant.

Prudence sur les rythmes de production

Un deuxième indicateur confirme les anticipations positives du secteur: la consommation de ciment a connu une hausse de 2,4% au cours des 2 premiers mois de 2015 contre un recul de 9,1% àla même période un an plus tôt.

Les ventes se sont bien tenues au mois de Janvier (+5,1%) contre une quasi-stagnation au mois de Février (-0,4%). Sur l’ensemble du 1er trimestre 2015, les ventes de ciment ont connu une progression de 0,8%, après 9 trimestres de baisses successives, marquant une inflexion dans la production immobilière.

Pourtant, les promoteurs affichent la prudence en 2015. Ils optent pour l’écoulement de stocks, ou en tout cas réduisent la cadence des productions.

Addoha a annoncéla mise en chantier de 12.000 nouvelles unités en 2015 contre 25.000 en 2014, soit un rythme de production réduit de moitié. Pour Alliances, seule immobilière qui détient une activitéde construction, les perspectives sont ternes puisque les pertes opérationnelles en 2014 sont essentiellement dues àce pôle construction. Le groupe a annoncés’être séparéde 5.300 salariés au cours des 9 derniers mois.

Si le BTP renoue avec la croissance, l’emploi dans le secteur se contracte. Avant 2012, le secteur du BTP créait plus de 60.000 nouveaux emplois par an. Entre 2013 et 2014, les pertes sont estimées à58.000 postes. Alors qu’en 2012, on comptait 1.038.000 personnes occupées dans le BTP, en 2014 on n’en comptait plus que 980.000 personnes.

L’amélioration de l’activitéreste fragile et sous l’emprise de certains facteurs négatifs, dont la faiblesse de l’investissement privé. Le temps de l’euphorie et de l’abondance de crédits est révolue. L’enveloppe de crédits alloués aux promoteurs continue sa contraction en ce début d’année (-3,8% en janvier 2015 après la baisse de 5,6% en fin d’année 2014).

Un tassement de la demande privée

En revanche, la hausse de l’encours de crédit immobilier s’est accéléréeau cours des 2 premiers mois passant de 2,6% en décembre 2014 à+ 3,3% en Janvier 2015 (+5,1% un an auparavant), en lien avec la bonne tenue des crédits alloués àl’habitat (+6,2%).

Nabil Benabdallah, Ministre de l’Habitat et de la Politique de la Ville considère que l'immobilier est posésur des bases solides car la demande objective est présente. Pour en attester, il lançait en début d’année une enquête nationale sur la demande d’habitat par ville. En 2013, le déficit en logement était estiméà642000 unités fin 2013.

Dans une interview publiée par les Inspirations Eco en début de cette semaine, le Ministre de l’Habitat revenait sur les extraordinaires rythmes de construction entamés depuis 2010 pour répondre àla demande de logements. En 4 ans, ce sont 520.000 logements qui ont étéachevés ou sont en cours d’achèvement. Une explosion, qui devait provoquer un tassement de la demande, raisonne le Ministre.

Mais si le nombre de transactions immobilières a repris, avec une croissance de 12% àfin 2014, c’est parce que les prix des actifs immobiliers finissent enfin par baisser, en repli de 0,8% en 2014, après une hausse de 1,3% l’année passée.

Les promoteurs en attente d’un message fort du gouvernement

«Nous constatons l’amorce d’une reprise, mais celle-ci reste timide»nous confie Mostafa Meftah, Secrétaire général àla FNBTP. Malgréle fait qu’ils sont en discussion avec le gouvernement, les professionnels sont anxieux et attendent des messages forts de la part du gouvernement.

Le Ministre de l’habitat et de la Politique de la Ville, M. Benabdallah, a formulédes propositions en amont, adressés aux promoteurs. Il a répondu favorablement àl’une des doléances de ceux-ci sur la fluidification de la règlementation des constructions, àsavoir lever l’autorisation préalable de la protection civile.

M. Meftah admet que ce type d’annonces contribue àaméliorer le sentiment général du secteur, le climat des affaires, et permettent de relancer les investissements. Mais les professionnels attendent un commencement de concrétisation des annonces, un signal fort.

Or, c’est le taux de réalisation du budget général de l’Etat et des collectivités publiques et la part allouée aux entreprises nationales qui ont un impact décisif sur le secteur. Le secteur pâtit de la demande privée mais également de la commande publique en recul depuis 2013.

Les chantiers publics mettent un certain temps àse mettre en place, les chantiers peuvent durer des années, et les autorisations et les recherches de fonds ralentissent leur réalisation. Les recherches de nouveaux types de financement, comme les PPP, ralentissent les rythmes de réalisation. De plus, le secrétaire général de la fédération se plaint des pratiques d’entreprises étrangères qui cassent les prix sur les commandes publiques.

S’il n’y a pas et n’aura pas de freinage brutal de l’activité, la période d’euphorie est passée. Les promoteurs et constructeurs ne disposant plus de l’abondance de crédits, ceux-ci font désormais plus attention dans les rythmes de mise en travaux.