Agrumes, une année charnière, des réformes s'imposent

La saison 2013-14 des agrumes et des primeurs marocains touche à sa fin. Méventes en Europe et en Russie, faux record d'exportations et de production, marché intérieur désorganisé, importation de concentrés pour fabriquer nos jus marocains: si les leçons sont tirées, une année charnière  pour de nouvelles réformes qui s'imposent.

Agrumes, une année charnière, des réformes s'imposent

Le 2 juin 2014 à 9h29

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

La saison 2013-14 des agrumes et des primeurs marocains touche à sa fin. Méventes en Europe et en Russie, faux record d'exportations et de production, marché intérieur désorganisé, importation de concentrés pour fabriquer nos jus marocains: si les leçons sont tirées, une année charnière  pour de nouvelles réformes qui s'imposent.

Pour les agrumes, l'année est atypique. Les problèmes sont nés en quelque sorte d’une croissance rapide qui a provoqué une forte hausse de la production et une concentration de celle-ci sur les petits fruits, avec un cafouillage à l’export. Et qui a révélé de nombreux dysfonctionnements dans la commercialisation.

Au 15 mai 2014, les exportations d’agrumes ont atteint 557.000 T., en hausse de 49% par rapport à la campagne précédente 2012-13. Dans ce total, la part des clémentines qui a augmenté de 56% d’une campagne à l’autre, est prédominante: 86% des exportations. La clémentine est très demandée mais l’exporter et la produire n’est pas forcément une bonne affaire comme on va le voir. L’ensemble de la filière agrumicole est à la croisée des chemins.

 

Famille Variété Total 2013/14 Total 2012/13 Var
   
Total AUTRES AGRUMES 5 872 2 499 135%
   
Total ORANGES 71 029 63 501 12%
   
Total PETITS FRUITS 479 670 307 289 56%
   
Total général 556 572 373 289 49%

Exportations marocaines d'agrumes au 15 mai 2014 depuis le début de la campagne 2013-14 (source: EACCE)

Inquiétudes sur le marché russe

Habituellement, le marché russe absorbe 100.000 à 120.000 T. de clémentines marocaines et il ne peut en absorber davantage, selon des sources professionnelles.

Cette année, les producteurs marocains qui ont succombé au charme russe étaient plus nombreux que d’habitude, une cinquantaine.

Planter des clémentines est un choix indirectement encouragé par l’Etat et par le marché russe, qui verse des subventions aux exploitations. Résultat : la production de clémentines et de petits fruits en général a fortement augmenté.

Parallèlement, le marché européen est devenu plus difficile en raison de la montée de la concurrence, d’origine égyptienne qui a écoulé 1 million de tonnes cette saison. Alors que le marché russe, qui demande surtout des petits fruits, est bien plus rémunérateur. Plus rémunérateur mais plus risqué. Cette année, certains producteurs vont l’apprendre à leurs dépens.

L’accès au marché russe a été facilité par la conteneurisation. On peut donc être un tout petit producteur et exporter vers une destination aussi lointaine que la ville des tsars, Saint Petersbourg.

Pour la campagne 2013-14, le Maroc a exporté 200.000 T de clémentines en Russie, sur un marché qui habituellement en absorbe 100.000 ou 120.000.

Un climat plus doux que d’habitude, une dévaluation du rouble, des dysfonctionnements sur le marché intérieur ont fait que les fruits marocains ne sont pas bien vendus. Or, il ne s’agissait pas de ventes fermes mais de consignations. C’est-à-dire que l’on attend plusieurs mois avant de savoir à quel prix on a vendu. Et là, malheureusement, on est en train de se rendre compte que pour de nombreux contrats, les recettes couvriront à peine les coûts.

Une source professionnelle informée nous a annoncé que les négociations étaient en cours avec les importateurs russes et qu’elles étaient très dures.

"Sans Maroc Vert, le Maroc serait devenu importateur d'agrumes"

L’Etat a investi dans la diversification du verger, son renouvellement et son extension, il a organisé la filière et suscité la création d’une représentation interprofessionnelle dans le cadre du plan Maroc Vert. Maintenant, les problèmes qui se posent sont ceux de la commercialisation. Ce thème a d’ailleurs figuré en bonne place dans le Siam 2013.

L’agrumiculture est un secteur qui doit reposer sur trois piliers complémentaires: le marché intérieur, l’export et la transformation.

Les performances à l’export ont souvent masqué les problèmes au niveau des deux autres piliers.

Sur le marché intérieur, si le kilo est vendu à 4 DH, le producteur ne touchera que 1 DH. La multiplication des intermédiaires, l’absence de bonnes pratiques telles que le calibrage ou l’emballage, l’état des marchés de gros, le font davantage ressembler à une béquille qu’à un pilier.

Pour la transformation, il suffit de rappeler que le Maroc importe du concentré d’oranges pour fabriquer ses propres jus, et tout est dit. Il y a au moins un problème d’approvisionnement en fruits et de compétitivité dans la fabrication du concentré.

Enfin, les subventions et le marché russe ont attiré les producteurs vers les petits fruits, clémentines notamment, de sorte que la production et les exportations sont déséquilibrées. Selon nos sources, le ministère de l’Agriculture a rééquilibré les subventions en direction des oranges. Ce déséquilibre de l’offre crée par exemple raccourcit la durée des campagnes : pour les clémentines, elles durent 3 mois ; pour les oranges, elles durent de 8 à 9 et font donc travailler tout autant les stations de conditionnement ou les moyens de transport.

Rééquilibrer l’offre agrumicole, réformer les marchés de gros, développer la production de jus, coordonner les exportations pour éviter la réédition de l’accident russe… telles sont les réformes qui sont dans le pipe. Si elles aboutissent, on dira que la saison 2013-2014 aura bien été une année charnière, malgré les difficultés qu’elle aura rencontrées.

Interrogé par Médias 24, le secrétaire général de l’Aspam, Ahmed Darrab, est optimiste. Pour lui, le plan Maroc Vert a énormément apporté à l’agrumiculture, par le renouvellement et la diversification des vergers, par la hausse des investissements et de la production. Il reste à corriger les dysfonctionnements révélés par la campagne 2013-14. Par la richesse de ses terroirs, la gustativité de ses produits, le Maroc est la terre d’excellente de l’agrume, conclut Ahmed Darrab.

Un gros producteur d’agrumes renchérit : "je suis persuadé que sans le Plan Maroc Vert, l’agrumiculture marocaine aurait été évincée des marchés extérieurs et à terme, le Maroc serait devenu importateur d’agrumes".

 

Famille Variété Total 2013/14 Total 2012/13 Var
         
Total FRUITS DIVERS 87 240 75 153 16%
   
Total LEGUMES DIVERS 248 101 210 888 18%
   
Total PLANTES FRAICHES 25 0  
   
Total POMME DE TERRE 24 197 16 516 47%
   
Total TOMATES 429 621 397 751 8%
   
Total général 789 184 700 308 13%

Exportations marocaines de primeurs au 15 mai 2014 depuis le début de la campagne 2013-14 (source: EACCE)

 

Primeurs : une campagne record

Les primeurs. C’est une campagne record, mais qui porte une inquiétude née d’une récente décision européenne qui va impacter les tomates marocaines.

Au 15 mai 2014, les exportations de primeurs se sont élevées à près de 790.000 T., en hausse de 13% par rapport aux exportations de la campagne précédente. Les exportations de tomates représentent 54% de l’ensemble, avec 430.000 T.

La vraie menace qui risque de toucher des dizaines de milliers d’emplois est celle de l’éviction d’une partie des tomates marocaines des marchés européens. 30% des exportations marocaines de tomates risquent d’être évincées dès la prochaine campagne à partir d’octobre prochain.

 


 

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