Cour des comptes, les explications d’un juge

  Mohamed Bourou, magistrat à la cour des comptes apporte d'intéressantes précisions sur le dernier rapport et répond à de nombreuses questions que l'on peut se poser.

Cour des comptes, les explications d’un juge

Le 11 mars 2014 à 17h28

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

  Mohamed Bourou, magistrat à la cour des comptes apporte d'intéressantes précisions sur le dernier rapport et répond à de nombreuses questions que l'on peut se poser.

Une approche didactique où transparaissent les enjeux liés à la mise en application d’un véritable contrôle sur les affectations des deniers publics.

Après une première sortie sur les ondes de la radio nationale, répondant aux remarques de Hamid Chabat, SG du parti de l’Istiqlal, il prend sa plume et rédige un texte qui apporte un certain nombre de précisions. Le document est hébergé sur le site marocdroit.

Le juge Mohamed Bourou répond aux questions que suscitent autant les conditions d’élaboration du rapport annuel de la cour des comptes, que ceux réalisés soit pour le compte du parlement que du gouvernement.

Première précision. Le rapport de la cour des comptes émane d’un organisme indépendant, qui se pose à une certaine distance des différents partis. Il opère dans le cadre d’un Etat avec des institutions, un régime constitutionnel et législatif. Bref, souligne l’auteur, «un contexte maroco-marocain».

On apprend que depuis deux ans, la Cour des comptes occupe un nouveau rôle. «D’une part, ce rôle est lié à la responsabilité et à la reddition des comptes. De l’autre, il consiste en l’évaluation de l’utilisation des deniers publics, ceux destinés à la société et au développement», indique Mohamed Bourou. Il donne comme exemples, le rapport sur les retraites et celui sur la caisse de compensation commandé  par le parlement.

Il en vient aux réactions qui ont suivi la publication du rapport annuel de la Cour des comptes.  Il précise d’emblée : «la Cour des comptes n’est ni une cour normale, ni une inspection des finances. Il s’agit plutôt d’un tribunal administratif de contrôle et disciplinaire ».

Il répond ainsi aux griefs formulés à l’encontre du document émis par la juridiction. Il est reproché au rapport de ne pas citer nommément les responsables. Mohamed Barrou réplique que «ne peuvent pas être révélés les noms et les faits délictueux avant que les dossiers ne soient transmis à la justice : la juridiction financière en cas d’infractions financières et à la justice pénale pour les faits criminels». Et d’ajouter : «les autres faits ne sont pas de la moindre importance, les dysfonctionnements soulignés  doivent être rectifiées».

Quid de la non-généralisation de la couverture ? Sans détours, il est répondu : «c’est un choix consacré par l’indépendance de la commission de contrôle, comme c’est le cas sur le plan international ».

Le déséquilibre entre les publications de la cour des comptes et des cours régionales des comptes? Il précise que de 30, le nombre des collectivités locales objet d’enquêtes s’élève dans le dernier rapport à 60. Nombre amené à augmenter dans le cadre de la régionalisation élargie.

Pourquoi la cour des comptes n’enclenche-t-elle pas de procédures disciplinaires financières devant les juridictions financières ? Le juge Barrou confie : «c’est une question qui fait l’objet actuellement d’un débat au sein de la cour des comptes. Il reste à rendre publiques les décisions de justice comme il est précisé dans la constitution. Ce qui ne va pas manquer de se réaliser. Cela a été formellement fixé par le projet de réforme de la juridiction financière».

Les prises de position de ceux concernés par le contrôle de la cour des comptes. Une majorité d’entre eux sont dans une approche positive. Les responsables s’engagent à réviser leur gestion sur la base des recommandations du rapport. Les réponses négatives sont publiques. Il revient sur la sortie de Hamid Chabat. «Par des propos blessants, il a mis en doute les prérogatives de la cour des comptes sans en apporter les preuves», signale l’auteur. Et de préciser : «le rôle du rapport est de créer un débat public sur la situation des finances publiques et de pousser les institutions à prendre leurs responsabilités».

Tout cela est fondé sur une équation à trois variables en matière de contrôle et de reddition des comptes. Les acteurs en sont le parlement, le gouvernement et la cour des comptes. Il revient au gouvernement de rendre effectifs, d’identifier et de communiquer au public les résultats des enquêtes. Il lui incombe également  de faire pression sur l’administration et les institutions n’ayant pas répondu à la cour des comptes et qui n’ont pas appliqué les précédentes recommandations de la cour des comptes.

Autre point. La cour des comptes intègre l’ère de la nouvelle constitution et travaille à l’application progressive des normes internationales. Les bases juridiques : les articles 147 de la constitution et 2 de la loi relative aux juridictions financière. Objectifs : faire preuve de transparence en dévoilant les comptes de l’administration publique à l’opinion publique, collecter les indemnités pour le Trésor public, faire en sorte que les dysfonctionnements ne se répètent pas, «tout au moins rendre difficile la récidive».

Application des recommandations. Il est impératif que ces dernières soient transmises aux concernés. «La cour des comptes devrait avoir la prérogative de prendre l’ensemble des dispositions nécessaires pour protéger les droits de l’Etat et de demander à la partie responsable d’accepter ses responsabilités et d’exécuter les recommandations de la cour des comptes», estime Mohamed Barou.

Il ne manque pas d’insister en déclarant: «afin d’atteindre cet objectif, il faudra l’intégrer dans la réforme actuelle du code des juridictions financières et d’élaborer  des contrôles parlementaires sur les deniers publics».

Présentation des rapports à la demande du parlement ou du gouvernement. Selon les normes en usage à l’international et la disposition 148 de la constitution, la cour des comptes doit remettre des rapports au parlement soit à sa demande ou de son propre chef. Au gouvernement, la cour des comptes est tenue de réaliser des dossiers spéciaux en cas de grande importance ou d’urgence.

Non publication de certains rapports. Il apporte des éclaircissements. Tout d’abord, les rapports annuels doivent comporter une couverture de l’ensemble des activités de la cour des comptes. En revanche, les rapports confidentiels sont évalués avec précision avant leur publication. «Il s’agit de peser le pour et le contre : l’importance de leur confidentialité et l’intérêt de leur publication», indique-t-il à ce sujet.

Dernier élément. Confrontation des parties dans l’élaboration du rapport. Il existe une obligation légale de publication des réponses des concernés. Toutefois, «il est inopportun de rappeler publiquement que la cour des comptes attend toujours les réponses de certains. Nous ne le signalons pas dans le document», conclut-il.


 

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

A lire aussi


Communication financière

Microdata : Avis de convocation à la prochaine Assemblée Générale des actionnaires, programmée le mercredi 26 juin 2024’

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.