Politique, économie, société: Les dossiers chauds de la rentrée

C’est certainement  une coutume importée que de parler de rentrée, mais au Maroc c’est un concept qui se justifie certainement plus qu’en Europe, après ces deux longs mois d’hibernation estivale et ramadanienne.  

Politique, économie, société: Les dossiers chauds de la rentrée

Le 2 septembre 2013 à 14h18

Modifié 2 septembre 2013 à 14h18

C’est certainement  une coutume importée que de parler de rentrée, mais au Maroc c’est un concept qui se justifie certainement plus qu’en Europe, après ces deux longs mois d’hibernation estivale et ramadanienne.  

La rentrée donc, c’est ce lundi, la politique, l’économie, le travail vont reprendre leurs droits et de nombreux dossiers chauds attendent d’être traités. Voici un tour d’horizon des plus importants :

Accord de pêche: les Espagnols s’impatientent

Les Ibériques sont décidés à mener une importante campagne de lobbying auprès des eurodéputés. Objectif : les convaincre de ratifier le protocole d’accord de pêche. Dans cette affaire, le sort de 87 navires et équipages espagnols est en jeu.  

Cela fait plus d’un mois que le protocole d’accord Maroc-UE a été paraphé. Depuis, c’est le statu-quo. Les pêcheurs espagnols commencent à s’impatienter d’autant plus que l’ensemble des navires européens n’ont pas le droit d’entrer dans la zone économique exclusive tant que le Parlement européen n’a pas encore ratifié l’accord en question.

«Une situation qui n’arrange pas non plus l’U.E. par ces temps de crise. Elle est obligée d’indemniser ces pêcheurs au chômage technique », souligne Abderrahmane Elyazidi, secrétaire général du Syndicat national des officiers et marins de la pêche hauturière.

Il y a quelques jours, le ministre espagnol de l’Agriculture, Miguel Arias Canete, est sorti de son silence. En s’adressant directement aux partis politiques ibériques, son message a été clair. «Ce dossier est à classer parmi les priorités nationales ; c’est une affaire d’Etat», a-t-il lancé en substance.

Ce qu’il craint le plus: que le scénario de 2011 se reproduise et que les députés européens rejettent le projet à nouveau. Cela avait entraîné un arrêt de pêche dans les eaux territoriales marocaines,  causant ainsi un grand manque à gagner notamment pour les pêcheurs d’Andalousie, de Galice ou encore des Iles Canaries. 

Son message est donc clair : les formations politiques espagnoles n’ont pas le droit à l’erreur ; le nouveau protocole doit être ratifié, un point à la ligne. Et pour cela, elles devront mettre au point une stratégie de lobbying pour convaincre les eurodéputés, de différentes sensibilités politiques.

Du côté marocain, tout laisse penser que le projet passera comme une lettre à la poste devant le parlement, autre passage obligé pour son entrée en vigueur de l’accord.

Qu’en est-il du manque à gagner pour le Maroc? «Il n’y en a pas. Cette période permettra au pays de reconstituer ses ressources. Il faut aussi savoir que cet accord a une finalité plus politique qu’économique. Son premier objectif est d’avoir l’Europe, essentiellement l’Espagne, comme allié », ajoute M. Elyazidi.

Etalé sur une période quatre années, le nouveau protocole autorise 126 navires européens (dont 87 Espagnols) contre 137 auparavant à pêcher dans les eaux marocaines. La contrepartie financière totale s’élève  à 40 millions d'euros, dont 14 millions dédiés à la poursuite de la mise en œuvre du plan Halieutis.

 

Réformes économiques en attente cherchent coalition gouvernementale désespérément

Et pendant ce temps, certaines réformes, comme la compensation, sont passées de prioritaires à très urgentes, eu égard à l’état des finances publiques. Et quid du projet de loi de Finance 2014, qui devrait être présenté au Parlement à l’automne ? Entre hésitation et atermoiements, la politique joue les filles de l’air et c’est l’économie qui va payer la facture.

La compensation : ce n’est plus un déficit, c’est un gouffre !

Alors que la réforme du système de compensation est attendue sinon réclamée à cors et à cris par les principaux partenaires au développement, et surtout le FMI, la période pré-ramadan avait vu des annonces successives, pas toujours cohérentes, concernant cette réforme.

On en était resté à la très probable mise en place d’un système d’indexation partielle, dont le but était de maintenir les dépenses de compensation dans l’enveloppe budgétaire prévue par la loi de Finances. Mais la décision avait été renvoyée à l’après-Ramadan. Au moment de cette annonce, le cours du pétrole connaissait une certaine détente et était inférieur à l’hypothèse des 105 $ considérés dans la loi de Finance pour établir l’enveloppe de compensation.

Mais, depuis le mois dernier les cours sont repartis à la hausse et le cours du brent frise actuellement les 115 $. Et selon les analystes, ce n’est qu’un début : le cours pourrait atteindre les 125 $ en raison du conflit en Syrie et même 150 $, si le conflit venait à s’étendre à d’autres pays de région, l’Irak notamment.

Dans ce contexte, il devient urgent pour la maîtrise du déficit public de mettre en place le fameux mécanisme de compensation partielle. En effet, le déficit du Trésor atteignait déjà à fin juillet 39,5 milliards de DH, soit une hausse de plus de 60% par rapport à juillet 2012. On voit mal comment, sans une répercussion de la hausse des cours sur les prix à la pompe, le gouvernement pourrait maintenir les dépenses de compensation dans l’enveloppe prévue qui est de 51 milliards de DH, alors qu’elles dépassaient déjà à fin juillet les 30 milliards.

Mais pour l’instant au niveau du Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance, dont dépend la Caisse de Compensation, c’est silence radio. Peut-être qu’on attend de refiler la patate chaud au nouveau ministre des Finances.

Les retraites : réformer avant d’élargir

Cette réforme est sur la table depuis plus de dix ans, les premières assises nationales sur cette question ayant été organisées en 2003. Le Chef du Gouvernement s’est personnellement engagé à ne pas reculer sur cette réforme. Mais là encore, la concrétisation des déclarations se fait attendre. Pendant ce temps, les menaces de déficit des caisses de retraites deviennent réalités. Le rapport annuel 2012 du Conseil Economique, Social et Environnemental annonçait ainsi la semaine dernière un déficit technique de la CMR pour cette année fiscale.

Le problème des caisses de retraites est double :

-les cotisations versées par les salariés seront à court et moyen terme inférieures aux pensions versées pour la CMR et la RCAR, obligeant l’Etat à financer le déficit sur le budget général.

- Trois régimes obligatoire coexistent, mais avec des conditions de cotisations et de calcul des pensions très différents, notamment entre les deux régimes publics et le régime privé. Le système est donc source d’inégalités.

La réforme demande donc dans un premier temps une fusion des régimes de retraite qui nécessite une remise à plat des conditions de cotisation et de calcul des pensions, pour aboutir à une convergence. Cela signifie une détérioration des conditions de retraite pour les personnels du public. Un gros effort de communication de la part du gouvernement sera donc nécessaire pour susciter le consensus autour de mesures certes impopulaires, mais qui vont dans le sens de l’intérêt général. Cette réforme pour être menée à bien de façon efficace ne devra pas se faire dans l’improvisation.

La fiscalité : le secteur agricole mettra-t-il la main à la poche ?

C’est le Roi qui l’a annoncé : les exploitations agricoles de grande taille paieront désormais l’impôt, dès 2014. Les petites resteront exonérées. Toute la question consistera à définir ce qu’est une exploitation de grande taille. Mais la décision, dans son principe, est actée.

La dévaluation du dirham : la solution pour booster la compétitivité ?

Le Maroc affiche clairement sa volonté de sortir d’un modèle économique où la croissance est fondée sur la consommation interne pour s’acheminer vers une croissance tirée par les exportations. Mais pour cela, il doit renforcer sa compétitivité afin d’être plus attractif pour les IDE et remonter progressivement la chaîne internationale des valeurs, sans être piégé sur des créneaux à faible valeur ajoutée.

La compétitivité d’un pays a une dimension qualité et une dimension prix. Si la dimension qualité est déterminée par des facteurs relativement rigides à court et moyen terme, tels que la qualité du capital humain ou celle des institutions, en revanche la dimension prix est plus flexible à court terme à travers la variation du taux de change. Une amélioration de la compétitivité pourrait donc en principe être obtenue à court terme par une dévaluation du dirham, en suivant l’exemple des pays asiatiques.

Cependant, dans le cas du Maroc, la part de la valeur ajoutée des exportations qui est créée nationalement est encore assez faible. Une partie significative de l’effet compétitivité prix d’une dévaluation serait donc absorbée par le renchérissement du prix des intrants importés. D’un autre côté, le maintien d’un taux de change élevé est un obstacle au développement à grande échelle des nouveaux métiers mondiaux du Maroc et de nouveaux secteurs alternatifs orientés sur l’exportation.

Le pays devra donc s’acheminer à plus ou moins long terme vers une libéralisation progressive du régime de change. Cependant, pour tirer partie de cette libéralisation, il devra mettre en place une stratégie industrielle visant à favoriser l’intégration verticale des entreprises pour limiter le recours aux intrants importés.

La loi organique des finances et la loi de Finances 2014

La réforme de la loi organique des finances est nécessaire d’une part pour l’adapter à la nouvelle Constitution et d’autre part pour accompagner le processus de régionalisation dans lequel le pays s’est engagé. Elle a notamment pour objectif :

-de faire des finances publiques un véritable outil de développement,

-d’améliorer l’efficacité des politiques publiques et la transparence de la gestion des ressources publiques et

-de renforcer le rôle de contrôle du parlement.

Mais alors qu’on en parle depuis l’adoption de la nouvelle Constitution, on ne voit toujours rien venir. Et il y a fort à parier que la prochaine session parlementaire qui s’ouvrira en octobre ne voit encore pas la présentation de cette nouvelle loi au Parlement. En effet, même à supposer que les négociations en cours aboutissent à la formation d’un nouveau gouvernement, les énergies seront sans doute concentrées sur la préparation et la présentation du projet de loi de finances 2014.

La réforme de la loi organique devra donc sans doute attendre le printemps 2014.

Concernant la loi de Finances 2014, l’agenda est plus pressé. En effet, pour à la fois permettre les débats nécessaires à l’exercice d’une bonne démocratie au niveau du Parlement et ne pas entraver le démarrage de la nouvelle année fiscale, le projet de loi devrait être présenté au Parlement dans le courant du mois d’octobre.

Sous cet angle de vue, une réussite rapide des tractations politiques et la formation d’un nouveau gouvernement sont urgentes. Mais, si les tractations échouaient et qu’on s’acheminait vers de nouvelles élections, on verrait sans doute l’histoire bégayer avec une présentation du projet de loi de Finance 2014 en mars, comme ça a été le cas en 2012. Ce qui n’est souhaitable ni pour la bonne gouvernance des finances publiques ni pour le débat démocratique et l’exercice du pouvoir parlementaire.

Qui sera ministre des Finances

Nizar Baraka ayant été nommé à la tête du Conseil économique et social, c’est Aziz Akhannouch qui a hérité, par intérim, du portefeuille de l’Economie et des Finances.

L’hypothèse selon laquelle il s’agit d’un simple intérim est cohérente. Cela fait déjà quelques mois que Chakib Benmoussa avait quitté la présidence du CESE pour prendre l’ambassade du Maroc à Paris. Or, le CESE a un dossier urgent à traiter : le nouveau modèle de développement des provinces du sud, sur lequel il a travaillé toute l’année. Le choix de Nizar Baraka comme successeur est également cohérent, pour des raisons évidentes de compétence et de crédibilité.

Un nouveau modèle de développement des provinces du sud

Le projet de modèle de développement des provinces du sud doit être débattu au cours du mois de septembre avec tous les acteurs concernés, avant d’être présenté au Roi en octobre. Il fait partie des réformes les plus importantes et s’inscrit dans la régionalisation avancée.

Quant au futur gouvernement, beaucoup se demandent si Aziz Akhannouch n’est pas destiné à garder le portefeuille des Finances, quelle que soit la configuration retenue par la future coalition. L’avenir dira ce qu’il en est. Ce qui est certain, c’est qu’il serait un ministre des Finances crédible et rassurant pour les milieux d’affaires.

Lois organiques, réforme de la justice

Une douzaine de lois organiques, toutes aussi importantes les unes que les autres, sont en attente d’élaboration.

De son côté, le ministre de la Justice a promis une présentation publique au cours de la première quinzaine de septembre, du projet de réforme de la Justice, un projet que l’on attend avec impatience et dont très peu de choses ont filtré.

La réforme de l'Education

Dans son discours au ton inhabituel, le 20 août, le Roi a recadré le gouvernement quant à ses responsabilités dans le domaine de l'Enducation. L'échec de l'enseignement est patent et fait l'unanimité. Le Roi a relancé le Conseil supérieur de l'Enseignement en nommant à sa tête Omar Azziman, un homme compétent et respecté. On attend avec curiosité et impatience de le voir en action.

C’est donc dans ce climat d’attente tendue que le gouvernement sortant fera sa rentrée en début de semaine. Mais même animé de la meilleure volonté du monde, le nouveau gouvernement sera sans doute obligé de séquencer les réformes en établissant des priorités pour permettre leur absorption par la population et l’économie, chacune de ces réformes ayant un coût à court terme.

Le problème, c’est qu’à trop attendre, tout devient prioritaire.

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