Renault Maroc : Une reprise marquée d’incertitude

| Le 24/11/2020 à 15:25

Avec des exportations en chute de 40% au premier semestre et une demande mondiale très volatile, Renault Maroc tente d’appréhender la crise. Malgré une réorganisation de sa production et le lancement de nouveaux modèles, le géant national avance à vue.

Lors d'un point presse organisé le 24 novembre 2020 à Casablanca, Marc Nassif, directeur général de Renault Maroc, a fait le point sur une année 2020 pour le moins mouvementée. Entre réorganisation du rythme de production et observation des tendances de consommation internationales pour anticiper la reprise, l’incertitude domine.

Elle est d’ailleurs annoncée d’entrée par Marc Nassif. « Ce qui caractérise cette année, c’est que nous avons tous de plus en plus de mal à prévoir » prévient-il. Sur le premier semestre, le groupe a fortement pâti de la crise avec la fermeture de ses deux usines de Casablanca et Tanger, de mi-mars à fin avril. « Notre marché a fortement dévissé. Nos exportations ont été fortement affectées également, de l’ordre de 40% sur le premier semestre de l’année » souligne le directeur général.

Marc Nassif annonce, sans donner de chiffres, que si la situation commerciale en terme de volume s’est améliorée sur le second semestre de l’année, la volatilité demeure forte.« La donne s’est améliorée depuis, sur le niveau commercial également avec des volumes plus raisonnables. Cependant la situation reste très volatile. D’un mois à l’autre nous avons beaucoup de mal à prévoir le comportement de nos marchés. Nos industries étant des paquebots, on ne freine pas à la dernière minute, donc il nous a fallu effectuer des ajustements ».

Le groupe est en effet passé au trois-huit sur ses deux sites de production de manière à assurer le maximum de flexibilité. « Nous faisons du start and stop au niveau de la demande. C’est une situation qui n’est pas confortable, mais cela nous permet d’assurer une stabilité auprès de nos équipes. Nous n’avons pas le choix » explique le DG de Renault Maroc.

Une demande internationale encore incertaine

Au-delà de la complexité de la gestion interne, l’incertitude vient également de la demande internationale. Assurant à l’export 90% de sa production, le groupe en est largement dépendant. Et dans ses marchés porteurs, les incertitudes demeurent aussi. « Nous reprenons de manière plus enthousiaste mais il faut observer les impacts des reconfinements dans différents pays. C’est très difficile de planifier tout ça. Il nous faut énormément de flexibilité. Mais il est certain que nous n’allons pas rattraper le terrain perdu. Le second semestre sera naturellement meilleur que le premier. Sur 2021, nous serons encore en reconquête de volume. Ce process prendra du temps, car il faut aussi prendre en compte le fait que les habitudes de consommation ont évolué » explique Marc Nassif, affirmant que le reconfinement en France s’était fait ressentir sur la demande de véhicules. « Mais nous avons la chance d’avoir un carnet de commande qui permet d’amortir le choc » rassure-t-il.

Cette demande incertaine de la part des partenaires étrangers a d’ailleurs déjà eu un effet sur la politique globale du groupe qui a décidé de réduire sa capacité de production à l’échelle mondiale. D’où la suspension du projet d’extension de l’usine Somaca. « Renault a annoncé un recadrage mondial de ses capacités, de 4 à 3,3 millions de véhicules et la suspension de deux projets d’expansion dont un en Roumanie à Pitesti et l’autre de la SOMACA. L’usine de Casablanca est déjà à plus de 100 000 véhicules de capacité. Ce qui nous dira si l’on va au-delà ou pas c’est ce qui se passera non pas dans les mois qui viennent, mais dans les années qui viennent concernant la reprise commerciale mondiale. Si l’on a des bonnes surprise dans les années à venir, on rouvrira le sujet, mais aujourd’hui nous n’allons pas investir alors que le demande n’est pas là, ce ne serait pas raisonnable » poursuit le DG de Renault Maroc. Pour lui, la reconquête sera longue et 2021 ne marquera pas le retour aux volumes connus sur la période 2018-2019 mais plutôt une observation du comportement des marchés.  

Des répercussions sur les emplois encore inconnues

Le groupe Renault ayant annoncé 15.000 suppressions de postes dans le monde d’ici 2024, la branche marocaine est-elle concernée ? Dans un précédent article, Médias24 annonçait selon des sources sectorielles, mais aussi provenant du ministère de l’Industrie, que le secteur connaîtra une baisse des emplois qui sera équivalente au moins à 20%.

Sans évoquer de chiffre, le DG de Renault Maroc évoque tout de même des périodes d’arrêt de production malgré une reprise qui s’amorce : « Il est évident que depuis le 19 mars, nous avons dû lever le pied. Mais le fait que l’on soit reparti aujourd’hui en trois-huit, cela veut dire que l’écosystème est aussi reparti rapidement. La différence est que de temps en temps nous avons des arrêts de jeux car quand l’Europe reconfine, la demande baisse. On peut avoir un dispositif à pleine puissance mais qui ne génère pas la même valeur car vous avons des périodes en dents de scie ».

Une situation complexe qui vient s’ajouter à une forte hausse des coûts engendrés par la crise sanitaire. « Quand on dédouble le transport pour nos milliers de personnels, cela engendre un coût qui est énorme. Mais nous n’avons pas levé le pied, au contraire. Ce qui se passe aujourd’hui montre que l’on ne peut pas se relaxer. En réunion, le masque est important, mais aérer l’espace devient un sujet en hiver. Nous réfléchissons à comment assurer le maximum de sécurité. Nous ne sommes pas au bout de cette pandémie » explique le directeur général.

Un écosystème qui demeure solide

Mais dans ce contexte pour le moins compliqué, Marc Nassif a tout de même rappelé les fondamentaux industriels du Maroc et ses opportunités sur l’échiquier mondial. « Lorsque nous avons signé l’écosystème Renault le 8 avril 2016, nous avions 26 fournisseurs de rang 1, aujourd’hui, nous sommes à 76 fournisseurs. La montée en puissance est très qualitative. Nous avons rentré des composants qui n’existaient pas. Notamment de la fabrication de colonne de direction, des disques, des étriers de freins, des jantes en aluminium… Tout cela nous donne beaucoup plus de réactivité pour faire face. Nous avons un délai d’attente plus court pour les obtentions des pièces, des temps de développement plus courts, des pièces de plus grande qualité à un moindre coût. Puis nous générons de l’activité et de la technologie ».

D’autant plus que la nouvelle stratégie industrielle axée en partie sur la décarbonation et la substitution des de certaines importations pour la demande locale pourrait représenter une opportunité en cas de reprise. « Nous avons une grande chance, c’est que nous produisons une gamme Global Access qui n’est pas produite en Europe de l’ouest. Donc c’est une barrière à l’entrée qui nous protège. Dans la redistribution mondiale des cartes, et le rééquilibrage entre l’Asie et l’Europe,  le Maroc fait clairement partie de ce système industriel élargi. Le fait que nous soyons passé de 26 à 76 fournisseurs c’est non seulement parce que nous le voulions mais aussi parce que le Maroc a su gérer les fondamentaux de sa compétitivité et a fait que ces industries se sont implantées ». Il poursuit, « qui plus est il y a la volonté de travailler sur une offre énergétique du Maroc décarboné qui sera un argument supplémentaire pour rendre encore plus attractive l’offre Maroc. Je pense que le Maroc n’est pas le pays qui a le plus à s’en faire sur le damier industriel ».

Malgré le contexte de crise, la société a d’ailleurs annoncé aux mois de septembre et novembre le lancement de deux nouveaux modèles de fourgonnettes Renault Express dans son usine tangéroise ainsi que les nouvelles génération de Logan, Sandero et Sandero Stepway. « Vous savez, ce sont des décisions que l’on prend des années à l’avance et ensuite il faut les caler dans le temps. Si on veut être prêts le jour où les marché redémarrent, nous espérons que ce sera dans les mois qui viennent, nous devons continuer à produire. Nous exportons et nous préparons les futurs lancements à venir » conclut Marc Nassif.

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