Ahmed Faouzi

Ancien ambassadeur. Chercheur en relations internationales.

Réfléchir et s’intéresser à l’international

Le 23 décembre 2023 à 8h41

Modifié 23 décembre 2023 à 8h41

Les États, comme les entreprises ou les personnes, ont de plus en plus les yeux rivés sur l’évolution du monde pour comprendre, analyser, et puis agir sur les évolutions en cours. Les crises se multiplient et sont difficiles à appréhender tant les acteurs sont nombreux et les enjeux complexes et imprévisibles.

À chaque différend qui surgit, les gouvernements sont sollicités, et parfois pressés à prendre position ou apporter leur appui à une partie ou à l’autre, ce qui les pousse souvent à se murer dans une neutralité passive.

L’ouverture à l’international, hier une exception et un luxe, est devenue aujourd’hui une exigence et une absolue nécessité. Le développement qui a accompagné l’humanité à ce jour a amélioré la connexion entre les États, les sociétés et les individus. Ces interconnexions croissantes sont accentuées par les développements technologiques de communication moderne, qui ont rendu les contacts instantanés, accentuant ainsi les dépendances des uns à l’égard des autres.

Déjà en 1967, le Canadien et homme de communication Herbert Marshall McLuhan évoquait le village planétaire pour qualifier les effets de la modernité de son époque. Que dirait-il à présent face à la réalité de ce siècle, où chacun dispose d’un smartphone interconnecté au reste de la planète, suivant instantanément les événements qui se déroulent ailleurs sans bouger de chez soi ?

L’avènement d’une seule communauté humaine reste un leurre, car c’est plutôt le réveil des identités sur tous les continents que nous constatons

MacLuhan prédisait qu’il n’y aurait qu’une seule culture et une seule communauté, où l’on vivrait dans un même temps, au même rythme et dans un même espace restreint. Il a eu raison sur le fait que le monde est devenu réellement un village, où les idées et les produits se diffusent rapidement. Mais l’avènement d’une seule communauté humaine reste un leurre, car c’est plutôt le réveil des identités sur tous les continents que nous constatons.

L’ouverture à l’international, qui est toujours une exigence humaine et économique, permet d’explorer d'autres cultures et économies de pays qui hier paraissaient lointains et inaccessibles. Cela offre aux États, aux entreprises comme aux personnes, de nouvelles perspectives et la possibilité de s’approprier des idées innovantes pour son propre développement. Cela élargit les horizons, avec une connaissance plus approfondie sur le monde qui nous entoure.

Mais cette ouverture, tout en étant spontanée pour les personnes, doit être organisée et réfléchie s’agissant des intérêts géostratégiques des États. Les centres de réflexion, les think tanks et l’apport d’experts sont ici une nécessité absolue. Le propre des questions internationales est que leur rythme d’évolution est plus rapide que celui des sujets domestiques, d’où la nécessité d’un suivi continu. Dans tous les pays, les décideurs, absorbés par l’action, disposent en fait de moins de temps pour des réflexions permanentes, profondes et souvent compliquées.

En agissant ainsi pour penser l’international, ce n’est pas uniquement l’État qui élargit son champ de compréhension et d’action, mais également les entreprises qui s’ouvrent sur des opportunités professionnelles au-delà des frontières. L’international est le moyen de diversifier les clientèles, d'augmenter les chiffres d’affaires, et d'améliorer les produits et la compétitivité. Il permet d’optimiser les coûts, de réaliser des économies d’échelle et d’élargir la zone d’action.

L’international n’est donc plus un luxe que s’octroient exclusivement les États. Il est un des moteurs clés de la croissance économique pour les entreprises qui montrent de l’intérêt pour explorer et s’investir hors des frontières. Ces entreprises procèdent ainsi pour acquérir des parts de marché, monter en gamme dans leurs secteurs spécifiques, créer des complémentarités et trouver des débouchés à leurs produits.

La présence des entreprises à l’international est donc un levier stratégique important, qui permet de se diversifier et de sortir de la dépendance vis-à-vis du marché domestique. Il est difficile de rester compétitif dans des marchés intérieurs fermés ou trop restreints. L’international pousse ainsi à affronter l’extérieur où la concurrence est souvent rude et sans pitié. L’aide des instances publiques est, à ce stade, cruciale pour informer, accompagner et anticiper les difficultés.

Les crises politiques, qui se multiplient de par le monde, peuvent interférer dans des projets de partenariat avec l’extérieur. Le suivi de près de ces zones de tension devient décisif pour en analyser les mécanismes, en mesurer l’impact, et prendre les décisions adéquates pour protéger les intérêts nationaux. Le marché extérieur présente certes des possibilités de croissance, mais il cache des cycles économiques différents qu’une entreprise seule ne peut appréhender, sans l’intervention de l’État.

Cependant, l’ouverture à l’international n’est pas qu’économique. Les États agissent sur les plans politique et culturel pour rehausser leur image globale. Ils s’appuient également sur leurs services pour déjouer et anticiper les actions des adversaires qui sont toujours là, à l’affût. Leurs objectifs sont par nature divers, et s’inscrivent aussi dans une démarche multilatérale assidue, qui va de la promotion de la paix à celle des droits humains, en passant par d’autres actions comme la protection de l’environnement.

Toutes ces actions répondent à des politiques réfléchies fondées sur des principes géopolitiques permanents qui doivent être déployés et exécutés à l’international. C’est à la diplomatie du pays d’exécuter, de superviser, de contrôler et surtout d'ajuster les démarches, quand cela s’avère utile, en fonction des priorités assignées. C’est que notre monde actuel, en changement perpétuel, nécessite plus que jamais une veille de tous les jours.

L’ouverture à l’international a donc des vertus, dont la plus importante est la prise de conscience de la diversité et de la complexité de notre monde. Notre regard et notre participation nous permettent certes de servir loyalement nos intérêts, mais nous poussent vers plus de tolérance et d’ouverture d’esprit. C’est cette compréhension qui contribue à son tour à favoriser la stabilité et la paix mondiales, et à résoudre efficacement les conflits par le dialogue et la coopération.

Être présent à l’international, c’est s’informer au quotidien sur les événements internationaux et suivre au jour le jour les battements de notre monde. Cela permet, d’une part, de rester informé sur l’évolution des conflits et des tensions internationaux et d’y apporter une contribution positive, fidèle à notre histoire. De l’autre, l’international pousse nos entreprises à s’impliquer davantage dans cette œuvre en vue d'acquérir des marchés, de suivre les tendances économiques et les avancées technologiques pour être toujours compétitives et performantes. Les ambitions exprimées dans les discours royaux pour s’ouvrir plus sur l’Atlantique et aider au désenclavement des pays du Sahel sont des grands chantiers qui montrent le chemin à suivre.

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