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L’Europe en quête d’emplois

Le 15 janvier 2015 à 10h30

Modifié 15 janvier 2015 à 10h30

BERLIN – Lorsque l’Union européenne a tenu son premier sommet sur la croissance et les emplois en 1997, le chômage s’établissait à 11% pour toute l’Europe. Lors d’un autre sommet qui se déroulait l’automne dernier, peu de choses semblent avoir changé. Le chômage dans la zone euro est passé du creux de 6,8% au premier trimestre 2008 au niveau actuel de 11,5%.  

Pour que l’Union européenne remplisse ses promesses de paix et de prospérité, il faut trouver des façons de créer des débouchés d’emploi pour un plus grand nombre de ses citoyens. Le chômage chez les jeunes est particulièrement préoccupant, même dans les pays dont le bilan statistique est plutôt positif ; dans des pays dont les conditions du marché de l’emploi sont pires, il représente une source potentielle d’instabilité sociale et politique.

La participation au marché de l’emploi est liée non seulement au niveau de revenu, mais aussi à l’estime de soi, à l’intégration et à la situation sociales. Le fait d’être évincé du marché de l’emploi augmente les risques de tomber dans les affres de la pauvreté et de souffrir de problèmes de santé. Et plus le chômage persiste, plus les effets en sont dommageables. Les jeunes gens qui n’ont pas d’emploi ont moins de possibilités plus tard dans leur vie – et constitue un gaspillage de ressources déployées en matière de formations et de compétences qui a des conséquences néfastes sur les économies nationales.

Évidemment, certains pays membres de l’Union européenne sont quand même parvenus à essuyer la crise. Selon le dernier classement en matière de justice sociale colligé dans le cadre du projet des Indicateurs de gouvernance responsable (SGI) de Bertelsmann Stiftung, l’Autriche, le Danemark et l’Allemagne sont en tête sur le plan de l’accès au marché de l’emploi, suivis par la Suède et la Finlande. Pourtant, même dans ces pays, les choses pourraient mieux aller. Le Danemark en est un exemple, car même s’il sert encore de modèle de réforme du marché de l’emploi, depuis le début de la crise de l’Union européenne, le chômage y est en hausse – de 3,5% en 2008 à 6,4% en novembre 2014.

L’Allemagne a grandement réduit son taux de chômage dans la dernière décennie, et ce, même pendant la crise économique. Après des années de fort taux de chômage structurel et à long terme élevé, le pays a mis sur pied un train de réformes du marché de l’emploi et d’autres secteurs dès 2003, propulsant son économie au sommet des économies les plus performantes de l’Union européenne.

La segmentation du marché de l'emploi

Le système allemand de formation professionnelle adapte les compétences de la main-d’œuvre du pays aux besoins des entreprises, contribuant ainsi au faible taux de chômage chez les jeunes. Un facteur gênant demeure : l’apparition d’un marché de l’emploi segmenté, dans lequel des travailleurs temporaires à faible salaire ont de la difficulté à passer la frontière entre des conditions de travail inadéquates et celles du marché principal de l’emploi.

La segmentation du marché de l’emploi constitue un problème dans l’ensemble de l’Union européenne. Selon l’étude SGI, l’Autriche est le pays qui s’en est le mieux tiré sur ce plan, car seulement 8,1% des employés temporaires sondés occupent un emploi temporaire parce qu’ils n’ont pu trouver un emploi temporaire. L’Allemagne arrive loin derrière en deuxième position, avec 21% des répondants au sondage qui préféreraient occuper un poste permanent. Dans l’Europe du Sud frappée par la crise, le problème est encore pire. En Espagne et à Chypre, plus de 90% des personnes occupant un poste temporaire n’arrivent pas à obtenir un emploi permanent.

Emploi et formation supérieure

Autre problème pour l’Allemagne et l’Autriche qui figurent pourtant aux premiers rangs : le manque de choix en matière de formation pour certains groupes qui entraîne des perspectives et une mobilité réduites sur le marché de l’emploi. En Autriche, les enfants sont triés dès la fin du primaire dans des filières d’enseignement distinctes. Il en résulte que leur cheminement de formation est figé dès le jeune âge.

Le statut social des parents détermine souvent la possibilité pour leurs enfants d’accéder à des études supérieures. La progéniture des parents mieux nantis et diplômés d’université a plus de chance d’obtenir un diplôme universitaire. En Allemagne, les perspectives de formation des enfants de familles immigrantes et à bas revenu sont moins nombreuses que dans bon nombre d’autres pays économiquement évolués.

Les conditions du marché de l’emploi pour les immigrants sont également problématiques dans les pays scandinaves, où l’accès à l’emploi est normalement assuré à tous. Au Danemark, les immigrants non occidentaux présentent un taux de chômage plus élevé et des résultats scolaires inférieurs aux autres. De même, malgré un excellent bilan général de la Suède sur le plan de la non-discrimination, les immigrants éprouvent des difficultés à s’intégrer dans la société suédoise et sont désavantagés sur le marché de l’emploi par rapport aux Suédois de souche.

De plus, même si la Suède détient le taux d’emploi le plus élevé de l’Union européenne, elle n’a pas de solution à son problème persistant de chômage chez les jeunes, qui s’élève à 23%. En Espagne et en Grèce, le chômage chez les jeunes dépasse 50% et la situation n’est pas meilleure dans des pays où la crise sévit comme Chypre, le Portugal, l’Italie, et la Croatie. Pour l’Union européenne dans son ensemble, le chômage chez les jeunes s’est établi à un niveau désolant de 21,9% en novembre. Selon une étude, ceci coûte à l’Union européenne 150 milliards d'euros (183 milliards de dollards) par an en pertes de salaires et de dépenses de consommation, outre les épreuves subies par le grand nombre de jeunes gens qui n’arrive pas à obtenir un emploi.

En février 2013, les instances de l’Union européenne ont lancé une initiative pour l’emploi chez les jeunes dotée d’un budget de 6 milliards d'euros pour aider à résoudre le problème. Mais la chancelière allemande Angela Merkel a admis en juin 2014 que l’initiative a jusqu’ici échoué. Le sommet le plus récent de l’Union européenne n’a pas non plus apporté beaucoup de nouvelles idées.

L’Union européenne a établi qu’il faut éviter que les jeunes gens soient sans emploi ou ne suivent aucun programme de formation pour plus de quatre mois ; mais aucun progrès n’a été enregistré en ce sens. À moins que de nouvelles pistes de réflexion ne soient adoptées bientôt, les cohortes de jeunes gens sans emploi de l’Europe risquent de devenir une génération perdue.

Traduit de l’anglais par Pierre Castegnier

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