La croissance en Chine et la trappe à revenu intermédiaire

Le 19 novembre 2015 à 10h05

Modifié 11 avril 2021 à 2h37

La trappe à revenu moyen (middle-incometrap) traduit une érosion de la productivité qui n’est plus soutenue par les gains réalisés sur l’importation de l’innovation ou sur la réaffectation de la main d’œuvre de l’agriculture vers les secteurs industriel et des services. 

Pour Eichengreen, B. et al. (2011)[1], qui ont observé différentes décélérations qui ont touché depuis 1956 les pays ayant réalisé un taux de croissance de 3,5% sur une durée minimale de sept ans, la baisse de la productivité globale des facteurs explique à hauteur de 85% celle de la croissance globale, une tendance qui s’affirme davantage lorsque le secteur industriel représente environ 23% de l’emploi total dans l’économie.

En effet, cela s’explique par le fait que l’augmentation des revenus vers le niveau intermédiaire affaiblit la compétitivité des produits intensifs en main-d’œuvre et épuisent les gains de productivité-travail et si le capital humain n’est pas suffisamment qualifié pour pourvoir à la technologie et aux services à haute valeur ajoutée, la trappe à revenu intermédiaire serait au rendez-vous. Selon les statistiques de la Banque Mondiale, sur les 101 pays et régions ayant atteint le stade de revenu intermédiaire dans les années 1960, seuls 13 ont réussi à contourner la trappe à revenu intermédiaire jusqu’en 2008.

La croissance en Chine, qui représente un véritable risque systémique de plusieurs trillions de dollar pour l’économie mondiale pour une part de 48% du PIB mondial à prix courants en 2014 et qui, selon les statistiques officielle de Pékin, subit une tendance baissière de 0,9% entre 2012 et 2015, serait-elle en train de passer par un scénario pareil[2]? Exposons d’abord les faits qui semblent, par ailleurs, plus tenaces que les chiffres officiels comme en témoignent les mesures de la Banque Populaire de Chine de procéder à une sixième baisse consécutive en un an du taux directeur et d’abandonner l’encadrement de la rémunération de l’épargne qui a été en-deçà du taux d’inflation.

L'économie chinoise va-t-elle se ressaisir?

Au reste, les signes vitaux de l’économie se montrent critiques: déclin continu des indicateurs de l’immobilier depuis 2010 et des ventes dans l’automobile, bien que la Chine demeure le premier marché mondial, baisse des exportations de 6,9% en octobre, diminuant pour le quatrième mois consécutif et recul des importations de 18,8%. Par ailleurs, l’investissement évolue toujours au rythme des surcapacités des usines chinoises et des grandes entreprises de l’Etat avec plusieurs opérations de fusion et des grands programmes d’infrastructures.

S’il existe bel et bien une décélération de la croissance, la trappe à revenu intermédiaire s’explique moins par l’offre et la productivité globale des facteurs que par la demande dont le ralentissement laisse apparaître précisément un surinvestissement de l’appareil productif. En effet, le levier de l’investissement, qui représente 50% du PIB contre 15% à 30% dans les pays développés, pompe désormais plus de capital pour des rendements de plus en plus décroissants.

La trappe se profile comme suit: après une première phase d’industrialisation, reposant sur des salaires peu coûteux, une situation où la demande intérieure, 40% du PIB contre 60% à 80% dans les pays développés, devrait relayer l’industrie et l’investissement ne parvient pas à émerger pour stimuler davantage la croissance chinoise.

Les ménages conditionnent la croissance

Pourtant, la consommation intérieure ne pourrait pas significativement rééquilibrer la croissance si d’une part, la réduction du surplus de l’investissement affecte le taux de chômage et d’une part, la redistribution des revenus est telle que la majorité de la population peine à accéder à la classe moyenne (le coefficient de Gini atteint en Chine 0,48 soit le plus pire comparé aux autres émergents du groupe BRIC: Brésil, Russie et l’Inde).

Bien que les services se comportent mieux (8,58% par rapport au troisième trimestre de 2014) devenant ainsi le premier contributeur au PIB sur les trois dernières années, la croissance en Chine demeure largement conditionnée par la consommation des ménages qui déterminerait positivement la transition économique chinoise si le pays réussirait l’ajustement délicat de son appareil productif sans détruire des emplois etadopteraitdes politiques économiques permettant la réduction des inégalités des revenus.


[1]Eichengreen, B., Donghyun P., and Kwanho S. (2011), "Whenfastgrowingeconomies slow down: International evidence and implications for China", NBER workingpaper, n° 16919, mars.

[2]Source des chiffres: Bureau National des Statistiques de Chine, BM, FMI, OMC et Statista.com.            

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