A Islamabad, les écoles prisonnières de la contestation antigouvernementale

(AFP)

Le 25 septembre 2014

Des policiers sortant de la douche à moitié nu, se rasant ou plongeant leurs doigts dans des plats de lentilles huileux: à Islamabad les forces de l'ordre mobilisées pour les manifestations antigouvernementales ont établi leur quartier dans des écoles, au grand désarroi des étudiants ainsi privés de cours.

Les autorités pakistanaises ont déployé environ 30.000 policiers en renfort dans la capitale depuis le début, à la mi-août, du sit-in des opposants Imran Khan, ex-star du cricket reconverti en homme politique nationaliste, et son acolyte, le chef religieux Tahir ul-Qadri.

Mais les manifestations s'éternisent, faute d'accord entre le gouvernement et les deux opposants qui exigent mordicus la démission du Premier ministre Nawaz Sharif qu'ils accusent d'avoir bénéficié de fraudes massives lors des élections l'ayant porté au pouvoir l'an dernier, un scrutin pourtant salué par la communauté internationale.

Les policiers venus de la campagne continuent donc d'occuper les écoles publiques réquisitionnées par les autorités pour les loger. Au collège Model Girls d'Islamabad, l'une des quelque vingt institutions d'enseignement reconverties en auberge des forces de l'ordre, des contenants en polystyrène vidés de leur lunch jonchent les corridors, des chaises et des bureaux s'entassent dans des coins et du linge humide traîne dans les escaliers.

Atiqa Sajjad, qui fait des études pour entrer à la faculté de médecine, est retournée lundi en classe après qu'un tribunal eut ordonné aux policiers de plier bagages, mais la décision de la justice n'a jamais été appliquée. Et Atiqa a retrouvé des officiers qui vaquaient à leurs occupations.

"Ils marchaient à moitié nu dans les corridors, certains se rasaient dans la cour, d'autres entraient et sortaient des douches... c'était étrange", surtout pour ce pays conservateur, confie-t-elle.

Les manifestations antigouvernementales ont atteint leur apogée fin août lorsque des manifestants ont tenté de s'approcher de la résidence du Premier ministre, prélude à des heurts avec les policiers qui ont fait trois morts et des centaines de blessés, le tout sur fond de rumeurs d'intervention de l'armée.

Aujourd'hui, quelque milliers de manifestants tout au plus demeurent encore devant le Parlement pour demander la démission du Premier ministre mais la contestation est en perte de vitesse.

Des étudiants prient pour la reprise des cours comme Iffat Rizvi, 12 ans. "Mais il y a des centaines de policiers qui vivent encore dans mon école qui a des airs de prison", déplore-t-elle.

- La colère des policiers -

Et il n'y a pas que les élèves et leurs parents qui espèrent une sorte de crise, les policiers appelés en renfort sont, eux aussi, au bout du rouleau.

"Pensez-vous vraiment que nous sommes heureux ici? Qui sur terre aimerait dormir sur le plancher d'une salle remplie de moustiques?", tonne Manzoor Elahi, un policier irrité par ce "retour à l'école" forcé. "Ce n'est pas tout le monde qui a le privilège d'avoir un matelas et nous n'avons aucune intimité", enchaîne-t-il, précisant qu'une centaine de policiers pouvaient s'entasser parfois dans une même salle de classe pour dormir.

"Certaines écoles sont désormais dans un état lamentable", reconnaît un responsable au ministère de l'éducation interrogé par l'AFP.

Mais à qui la faute? Jeune boursière venue de Hunza, dans le nord, près de la frontière chinoise, Tahira Jabeen accuse à la fois le gouvernement et les ténors de l'opposition issus des classes supérieures: "Nawaz Sharif et Imran Khan n'ont pas d'enfants qui fréquentent ces écoles, ce sont des gens comme nous, de la classe moyenne inférieure, qui souffrent".

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Le 25 septembre 2014

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