Tout va mal et tout n'ira pas pour le mieux. C'est ce que suggère le dernier rapport du Pnud, consacré au développement humain dans le monde arabe, publié le 29 novembre.

La crise financière et économique mondiale de 2008-2009, conjuguée à l'instabilité politique depuis 2011, ont eu un impact négatif sur l'indice du développement humain (IDH) dans la région. Pour preuve, la croissance annuelle a diminué de plus de moitié entre 2010 et 2014, par rapport à celle enregistrée entre 2000 et 2010, indique le rapport.

Corollaire: les inégalités se sont creusées, atteignant une moyenne supérieure à la moyenne mondiale.

Cette situation alarmante s'explique en partie par l'augmentation des "conflits armés et des crises violentes dans la région", lesquels sont passés, entre 2000-2003 et 2010-2015, de 4 à 11."

Pour appuyer ce propos, quelques chiffres inquiétants:  la région arabe ne représente que 5 % de la population mondiale, mais a pourtant été le théâtre de 17 % des conflits mondiaux entre 1948 et 2014 et de 45% des attentats terroristes en 2014.

"Cette même année, la région comptait 47 % de personnes déplacées internes et 57,5 % de tous les réfugiés dans le monde, y compris les réfugiés palestiniens déplacés par l'une des occupations territoriales les plus longues de l'histoire moderne", ajoute le rapport.

Ces conflits, dont certains deviennent "de plus en plus longs", "font aussi reculer les gains en matière de développement économique en détruisant les ressources, le capital et la main-d'œuvre, jusque dans les pays voisins."

Une jeunesse frustrée

Ce contexte réussit mal aux jeunes âgés de 15 à 25 ans, dont le nombre avoisine les 105 millions, soit 30% de la population du monde arabe. Cette région où 60% de la population n'a pas encore atteint l'âge de 30 ans.

"Jamais auparavant la région n'a eu une si large proportion de jeunes". Or, "la vague de soulèvements qui a balayé la région arabe depuis 2011 nous a montré que nous ne pouvons plus traiter les jeunes" de cette région "comme passifs ou comme une génération en attente", déclare Sophie de Caen, directrice adjointe du Bureau régional pour les États arabes du Pnud.

Le chômage va empirer

Or, cette catégorie sociale est confrontée à de nombreux obstacles. Le premier concerne l'accès à l'emploi.

"En 2014, le taux de chômage des jeunes dans la région arabe (29,73%) représentait plus du double de la moyenne mondiale (13,99%) et, selon les estimations, la situation devrait empirer dans un proche avenir", prévient le Pnud, indiquant que les économies arabes pourraient ne pas être en mesure de générer les 60 millions de nouveaux emplois nécessaires d'ici à 2020 pour absorber le nombre de travailleurs entrants et stabiliser le chômage des jeunes", ce qui pourrait, entre autres, "alimenter les tensions sociales et économiques dans la région".

Discrimination systématique à l'égard des femmes 

Les femmes subissent cette situation de plein fouet. Ce fait est perpétué par "la discrimination profondément ancrée dans les croyances et les traditions culturelles, dans l'éducation des enfants, les structures religieuses, les médias et les relations familiales", déplore le Pnud. Cette donne "continue d’empêcher les femmes d'acquérir et d'utiliser au mieux leurs capacités", selon le rapport.

De la frustration à la radicalisation.

"Tous ces facteurs se combinent pour créer un sentiment global d'exclusion et un manque d'opportunités dans une grande partie de la région".

Si dans le monde arabe, la majorité "écrasante" des jeunes rejette la violence et considère les groupes extrémistes comme des terroristes, une minorité de jeunes est ouverte à participer à des groupes violents, qui prétendent lutter pour le changement. Au Maroc, cette minorité représente 10% des jeunes sondés selon le rapport.

Mais globalement,  "la radicalisation et l'extrémisme violents augmentent dans les pays arabes", constate le rapport, en raison de la "convergence croissante des chemins par lesquels les mécontents peuvent se radicaliser et les radicalisés devenir violents".