Round up. Comment sont fabriquées les batteries dans une gigafactory

Avec la mise sur les rails du projet de première gigafactory, le Maroc a franchi une étape importante pour le développement d’une industrie de véhicules électriques compétitive et performante. Cependant, la construction, le démarrage, la pérennité et la compétitivité d'une gigafactory représentent un défi complexe. Qu'est-ce qu'une gigafactory?

Round up. Comment sont fabriquées les batteries dans une gigafactory

Le 19 juin 2024 à 11h06

Modifié 19 juin 2024 à 15h27

Avec la mise sur les rails du projet de première gigafactory, le Maroc a franchi une étape importante pour le développement d’une industrie de véhicules électriques compétitive et performante. Cependant, la construction, le démarrage, la pérennité et la compétitivité d'une gigafactory représentent un défi complexe. Qu'est-ce qu'une gigafactory?

Largement médiatisé, le terme "gigafactory" correspond aux plateformes de production de batteries à grande échelle, principalement destinées aux véhicules électriques. Le terme Giga ne fait pas référence à la dimension mais plutôt à la capacité annuelle de production en gigawattheures (1 GWh/an est équivalent de 0.002 GWh/jour équivalent à 2.000 kWh, soit 40 batteries par jour si on considère que chaque batterie à une capacité de 50 kWh).

Gotion High-Tech implantera au Maroc une gigafactory d'échelle moyenne, avec une capacité de production annuelle de 20 GWh et qui est conçue pour évoluer vers une gigafactory de grande échelle, avec une capacité pouvant atteindre 100 GWh.

Ces batteries électriques représentent entre 30 et 40 % de la valeur totale des véhicules électriques légers et environ 50% pour les poids lourds. Cette part importante de la valeur s'explique par la complexité de l'industrie, qui exige un savoir-faire, une technologie de pointe et un accès aux matières premières. En conséquence, le nombre de pays capables de maîtriser cette industrie est limité, et c’est la Chine qui domine actuellement le marché avec une part de 80%.

Gigafactory de Tesla à Austin (États-Unis).

Ce terme est souvent associé à Tesla, qui a popularisé ce type de conception industrielle et en a fait un élément clé de son succès. Cependant, les gigafactories Tesla se distinguent par le fait qu'elles ne se contentent pas de fabriquer des batteries, mais sont également capables de produire, à la même intensité, les voitures, les panneaux solaires, les systèmes de stockage d’énergie, les bornes de recharge…

Aujourd'hui, Tesla possède plusieurs gigafactories à travers le monde et compte beaucoup sur sa gigafactory de Shanghai, qui est son plus grand hub de production avec une capacité annuelle de 950.000 unités. L'entreprise a récemment obtenu l'approbation des autorités chinoises pour la construction d'une deuxième usine en Chine. Cette nouvelle gigafactory ne sera toutefois pas spécialisée dans la production de véhicules électriques, mais plutôt dans les systèmes de stockage d'énergie.

Le produit : nature, composants, dimension

La batterie lithium-ion est une batterie rechargeable qui utilise le lithium comme transporteur d'énergie. Son fonctionnement repose sur le déplacement des ions lithium. Lors de la charge, ces ions quittent l'anode (pôle négatif) pour se déplacer vers la cathode (pôle positif) en passant par l'électrolyte, créant ainsi un courant électrique. Les électrons libérés à l'anode circulent dans le circuit externe vers la cathode pour y neutraliser les ions lithium. Lors de la décharge, le processus s'inverse : les ions lithium retournent à l'anode et les électrons circulent dans le sens inverse pour alimenter l'appareil.

Schéma simplifié d'une batterie Lithium-ion.

On distingue plusieurs variétés de batteries lithium-ion, chacune se caractérisant par les matériaux spécifiques employés dans sa conception. Ces matériaux ont un impact déterminant sur la longévité, les performances et la sécurité de la batterie. Compte tenu de ces caractéristiques, les batteries les plus demandées sont celles de type nickel-manganèse-cobalt (NMC) et lithium-fer-phosphate (LFP).

Type de batterie Densité gravimétrique d'énergie (Wh/ Kg) Durée de vie (cycles) Taux de charge/décharge (C) Rendement énergétique (%) Températures
(°C)
Batterie au Plomb 35-60 300-800 0.2-0.05 70 [-20 ; 60]
LFP (Lithium Fer Phosphate) 90-120 1,000-2,000 1 95 Chargement:

[-30 ;55]

Déchargement:

[-20;55]

 NMC (Lithium Nickel Manganèse Cobalt) 150-220 1,000-2,000 0.7-1 90 Chargement:

[-20 ;55]

Déchargement:

[0;55]

Si la simplicité du principe de la batterie lithium peut laisser penser à une industrie facile, il n'en est rien. En effet, sa technologie est en évolution permanente et rapide, permettant d'améliorer continuellement les performances des batteries. Ce sont naturellement les pays qui ont investi massivement dans la recherche et le développement qui détiennent les clés de la fabrication de batteries performantes. C'est ainsi que les pays asiatiques, en particulier la Chine , dominent le paysage en matière de brevets sur toute la chaine de la valeur de la batterie.

Le choix stratégique de Gotion High-Tech pour le développement de la première gigafactory au Maroc s'avère pertinent. Cette entreprise figure parmi les 10 premiers acteurs mondiaux en matière de production de batteries, et possède une solide expérience dans ce domaine, comme en témoigne son portefeuille de brevets d'invention dans le secteur.

Prenons l'exemple de la batterie Astroinno L600 de Gotion. Cette batterie permet une charge rapide en seulement 18 minutes, offre une densité d'énergie gravimétrique de 240 Wh/kg, possède une durée de vie remarquable entre 4.000 et 1.800 cycles et maintient des performances optimales en hautes et basses températures. En termes de sécurité, la batterie Astroinno L600 se distingue par ses matériaux d'isolation thermique internes capables de résister à des températures extrêmement élevées allant jusqu'à 1.200 °C et par des canaux d'évacuation de chaleur rapides qui offrent une protection de sécurité ultime à quatre niveaux.

Astroinno L600, batterie de type LFP développée par Gotion.

Pourquoi la construction d’une gigafactory est complexe

Ces méga-plateformes consacrées à la production de batteries électriques, constituent un défi technologique et logistique de taille. Leur mission principale est de trouver un équilibre optimal entre une production à grande échelle, des produits de qualité et des processus durables, tout en réalisant des économies d'échelle. Au-delà du processus de fabrication, une gigafactory doit impérativement intégrer un laboratoire d'analyse et un centre de R&D.

Le point central de cette complexité réside dans la longueur de la chaîne de production des batteries. Par conséquent, le cycle de feedback pour savoir si on a obtenu la qualité voulue peut prendre un long temps. De même, en cas de problème dans la batterie, il faut plusieurs semaines pour identifier l'origine de l'anomalie.

Pour cette raison, la construction doit être conçue pour s'adapter facilement aux évolutions technologiques futures. Par exemple, la chimie ou les composants des batteries peuvent être amenés à changer pour atteindre des performances optimales, ce qui implique de modifier les paramètres des équipements et les protocoles de fabrication, notamment en termes de température, de pression et de vitesse. Tous ces paramètres doivent être contrôlés avec précision afin de garantir le résultat escompté : des batteries performantes et de qualité et/ou des durées de vie plus longues.

La construction d'une gigafactory, jalonnée d'investissements colossaux, est parsemée de risques divers. La clé du succès réside dans la capacité à identifier, évaluer et gérer efficacement ces risques, garantissant ainsi la viabilité du projet. Il s'agit en particulier des risques en relation avec la sécurité des batteries, car un tel risque pourrait non seulement coûter très cher pour l’entreprise mais peut détruire la confiance des clients potentiels à long terme.

Un autre aléa à prendre en considération est le taux de gaspillage. Même les fabricants de batteries les plus avancées auront un niveau de rebuts important dû à des batteries non conformes, principalement pendant les premières phases de production. Cet aléa aura des répercussions sur les coûts de base et, bien sûr, sur les revenus, ce qui exige une anticipation proactive permettant la modification systématique des processus de production.

À cela s’ajoute la nécessité de la compréhension de la chaine d’approvisionnement des matières premières et aux risques de ruptures d’approvisionnements. Bien que ces problématiques complexes puissent nécessiter des investigations approfondies, leur résolution s'avère importante pour assurer la durabilité et la viabilité de la gigafactory sur le moyen et long termes.

Afin de réduire les couts d’investissement, il existe d’autres paramètres externes pouvant réduire le coût d’une gifactory et que l'on peut résumer dans les points suivants :

(1) L’énergie : une énergie disponible avec une préférence pour les énergies renouvelables ;

(2) La logistique : La proximité de la gigafactory aux principales infrastructures de transport (aéroport, port, chemin de fer...) ;

(3) Les ressources humaines qualifiées : les gigafactories ont besoin d'une main-d'œuvre abondante, hautement qualifiée et bien formée.

Fort de sa position géographique avantageuse à proximité de l'Europe, le Maroc présente un ensemble d'atouts majeurs pour le développement d'une gigafactory performante et rentable.

Disposant de ressources minières stratégiques telles que le phosphate, le cobalt et le manganèse, le pays développe également un tissu industriel solide à l'aval de la chaîne de valeur des batteries, notamment dans la transformation du graphite et la fabrication des cathodes et anodes. De plus, le Maroc bénéficie d'une industrie automobile notablement développée, avec un fort taux d'intégration locale, d'une main-d'œuvre qualifiée et expérimentée dans des domaines connexes tels que l'aéronautique, l'automobile, l'électricité et les énergies renouvelables. Enfin, le pays dispose d'une infrastructure logistique performante comprenant un réseau ferroviaire à grande vitesse, le port de Tanger Med, un large réseau d'autoroutes et de voies express, ainsi que des plateformes logistiques modernes.

Cycle de production d’une cellule de batterie

Les cellules de batterie sont généralement fabriquées sous forme de pouch, de prismes ou de cylindres. Ces cellules sont ensuite assemblées en modules, puis en packs, afin d’être intégrées au produit final, le véhicule électrique.

Étape I : approvisionnement en matières premières

La fabrication des cellules de batterie repose sur un large éventail de matières premières. Toute perturbation ou entrave à l'approvisionnement de ces ressources critiques peut affecter la production de batteries. Les cathodes et les anodes sont les principaux éléments d’une batterie correspondent à plus de 70% du poids d'une cellule de batterie.

Pour le Maroc, la batterie LFP s'impose comme le choix le plus judicieux, compte tenu des richesses minières du pays en phosphate et en manganèse, matières premières essentielles à la fabrication de ce type de batterie. La comparaison entre la répartition des matériaux actifs des deux types de batterie est présentée dans le graphe ci-dessous:

(source : PWC)

En ce qui concerne l'utilisation des matières premières, de nouvelles recherches sont continuellement développées et perfectionnées. Par exemple, des chercheurs ont trouvé que l’utilisation d’un alliage d’étain-aluminium peut être moins coûteux et doublant la capacité de chargement des batteries lithium-ion.

Il est important de noter que l'approvisionnement en matières premières, bien qu'essentiel, ne constitue pas le seul facteur déterminant. La qualité des matières premières revêt également une importance capitale, car la moindre impureté peut compromettre la qualité du produit final.

Étape II : fabrication des composants de la cellule de batterie

À partir des matières premières sourcées, l'étape initiale consiste en la fabrication séparée des principales composantes de la cellule (cathode, anode, électrolyte, séparateur...).

1. Mixage

Pour produire une bouillie d'électrode, les matières actives brutes sont combinées avec un solvant, un liant et des additifs. Les matériaux d'anode et de cathode sont ainsi mélangés juste avant d'être acheminés vers la machine de revêtement. Dans le processus de mélange, la formulation des matières premières, les étapes de mélange et la durée du mélange sont tous des paramètres déterminant dans le produit final.

2. Enrobage

L’enrobage correspond au processus d'application de la bouillie d'électrode (produits du mixage) sur les feuilles métalliques d'aluminium (cathode) et de cuivre (anode), suivi du séchage. L'épaisseur des films (anode sur feuille de cuivre et cathode sur feuille d'aluminium) varie entre 5 μm et 25 μm selon la conception de la cellule.

3. Calandrage

Le calandrage est un laminage des électrodes pour atteindre une épaisseur et une porosité contrôlées. Lors de cette étape, la feuille de cuivre ou d'aluminium revêtue des deux côtés est compressée par une paire de rouleaux rotatifs. Ce procédé améliore la densité d'énergie de la batterie, garantit une épaisseur uniforme et renforce le contrôle de la poussière et de l'humidité au niveau de l'électrode.

4. Découpage

La présence de déformations ou de saleté à ce stade augmentera les risques de courts-circuits internes, pouvant entraîner la bonne production. Dans cette tâche, le découpage permet de couper longitudinalement l'électrode revêtue en bandes étroites.

5. Séchage sous vide

Au cours du processus de séchage, l'humidité résiduelle et les solvants sont éliminés des bobines.

Étape III : assemblage de la cellule de la batterie

1. Séparation

La séparation consiste à séparer les feuilles d'anode, de cathode et de séparateur du rouleau. Le processus de découpage est généralement réalisé par découpage. Les rouleaux secondaires séchés sont déroulés et alimentés vers l'outil de séparation.

 

2. Assemblage

Durant le processus d’assemblage, les feuilles d'électrodes séparées sont superposées en suivant un cycle répétitif : anode, séparateur, cathode, séparateur, etc.

3. Encapsulation

Les électrodes, sous forme de rouleau ou de pile de couches empilées, sont chargées dans le boîtier rigide ou le sachet souple. Le format spécifique de la cellule détermine la manière dont ce processus de mise en boîtier ou d'encapsulation est réalisé. Les feuilles des collecteurs de courant (anode en cuivre et cathode en aluminium) sont soudées aux languettes de connexion de la cellule par un procédé de soudage par ultrasons ou laser.

 

4. Injection d'électrolyte

La cellule disposant d’un vide partiel peut être remplie d’une quantité prédéterminée électrolyte. L'électrolyte est injecté dans la cellule sous vide à l'aide d'une aiguille de dosage à haute précision.

5. Formation et scellage

Avant le scellage de la cellule de la batterie, la formation correspond au processus du premier chargement et de déchargement de la cellule de batterie. Dans de nombreuses cellules pouch, un dégagement important de gaz se produit lors du premier cycle de charge et c’est ainsi que des vecteurs de gaz sous pression expulsent ce gaz de la cellule.

6. Stabilisation

Les cellules sont stockées dans une chambre à une température contrôlée pendant une certaine période, permettant de stabiliser l’électrolyte.

Étape IV : protocoles de contrôle finaux (End of line Test)

Dans la station de test, les cellules sont déchargées à l'état de charge d'expédition avec mesure de capacité. Par la suite, un ensemble de test sont effectués et qui diffère selon le fabricant : inspections optiques, contrôle de masse, test d’étanchéité, mesures de résistance internes, tests à impulsions… Une fois tous les tests terminés avec succès, les cellules peuvent être emballées et expédiées.

Étape V : production de modules et packs de batteries

Les véhicules électriques, nécessitant une grande quantité d’énergie et d’autonomie, exigent une grande quantité de cellules de batteries. Ces cellules sont regroupées de manière hiérarchique, d'abord en modules, puis en packs de batteries, pour fournir la puissance nécessaire à une voiture électrique. La production de modules de batterie nécessite un processus d'assemblage mécanique qui comprend l'isolation et la mise sous tension, la formation de contacts électriques et le montage du circuit imprimé et du couvercle du boîtier.

De la même manière, la fabrication de packs de batteries implique l'assemblage de plusieurs modules, suivi d'une intégration électrique et thermique, d'un scellage, d'une charge et d'une programmation finale pour construire une batterie qui répond à la demande en énergie d’un véhicule électrique.

Modèle de pack de batteries (source : emobility-engineering).

Pour des raisons de sécurité, le Système de Gestion de Batterie (BMS) est connecté à ces batteries afin d'assurer un fonctionnement optimal et sécurisé. Les fonctions principales du BMS incluent la protection électrique (sécurité des connexions et des performances), la protection thermique (surveillance de la température et chauffage ou refroidissement du pack si nécessaire), le contrôle du processus de charge, l'équilibrage des cellules de la batterie, l'estimation de l'autonomie restante et la surveillance du vieillissement de la batterie…

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