La France met en avant l’économie pour éviter de se prononcer sur le fond de la marocanité du Sahara (E. Dupuy)

A l’issue de leur visite au Maroc, les déclarations des ministres Stéphane Séjourné et Frank Riester peuvent laisser penser que la position française évolue progressivement vers la reconnaissance de la marocanité du Sahara. Le président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), Emmanuel Dupuy estime que les autorités françaises cherchent juste à gagner du temps afin d’éviter de répondre clairement à cette question.

La France met en avant l’économie pour éviter de se prononcer sur le fond de la marocanité du Sahara (E. Dupuy)

Le 6 avril 2024 à 15h05

Modifié 8 avril 2024 à 7h53

A l’issue de leur visite au Maroc, les déclarations des ministres Stéphane Séjourné et Frank Riester peuvent laisser penser que la position française évolue progressivement vers la reconnaissance de la marocanité du Sahara. Le président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), Emmanuel Dupuy estime que les autorités françaises cherchent juste à gagner du temps afin d’éviter de répondre clairement à cette question.

Après une longue période de refroidissement politique entre les deux pays, quelle lecture politique et économique peut-on faire des visites au Maroc des deux ministres français qui, en déclarant à l’unisson que la France était désormais prête à investir dans les provinces du Sud, donnent l’impression d’un changement progressif de sa position sur la marocanité du Sahara ?

"Une réponse économique en deçà des attentes marocaines"

Sollicité par Médias24, le politologue français Emmanuel Dupuy considère qu’il n’y a pas eu suffisamment d’évolution politique et qu’il s’agit avant tout d’un changement de paradigme économique qui n'engage à rien.

Une évolution jugée néanmoins bien en deçà de ce qu’aurait pu être la position française face aux sollicitations et attentes marocaines.

"Tout dépend de ce que l'on veut interpréter vis-à-vis de cette position car s’il est vrai que Proparco a désormais la capacité de financer des projets dans les provinces du Sud, cela ne veut pas dire que les entreprises françaises le feront", estime Emmanuel Dupuy pour qui cette décision permettra d’éviter une évolution du narratif français sur la question du Sahara.

Tout en affirmant que cette décision va dans le bon sens pour les entreprises françaises qui ne veulent pas se laisser marginaliser économiquement, il ne faut pas y voir un geste politique qui anticipe une éventuelle normalisation sur le modèle de celle des Etats-Unis ou de l’Espagne.

Et d’ajouter qu’au lieu d’améliorer la relation bilatérale en allant dans le sens de l'histoire avec une reconnaissance claire de la marocanité du Sahara, la France a préféré se donner une marge supplémentaire de manœuvre en cherchant à se singulariser de la position des autres pays qui, eux, ont franchi le pas.

"Ne pas se laisser marginaliser par l’Espagne, l’Allemagne et les Emirats Arabes Unis"

"Pour ne pas être en reste avec l'immense potentiel en termes d’hydrogène vert ou des retombées économiques autour du gazoduc Lagos-Tanger, il y aura sans doute des investissements français au Sahara qui s’inscriront dans la durabilité énergétique, l’hôtellerie ou dans les activités de transformation halieutique notamment dans le cadre du développement du port de Dakhla", précise Dupuy en ajoutant qu’il ne faut pas s’attendre à des investissements économiques massifs français.

Selon notre interlocuteur, la France ne veut pas se laisser marginaliser par l'Espagne, l’Allemagne, les Etats-Unis ainsi que par les Émirats arabes unis dont la présence ne cesse de croître dans les grands projets structurants du Maroc à l’instar de l'autoroute électrique Dakhla-Casablanca ou l'extension de la LGV vers Marrakech et Agadir qui intéresse beaucoup Alstom.

"Gagner du temps pour éviter de se prononcer"

En se contentant d'inciter ses entreprises à investir au Sahara, la France reste sur une position diplomatique de statu quo qui lui permet d'éluder une décision politique qu’elle ne souhaite pas prendre pour l’instant.

Ainsi, comme la position française n'a pas évolué depuis le statut d’autonomie d’avril 2007, la déclaration du ministre chargé du commerce extérieur Frank Riester permet à la France, selon le président de l’IPSE, de gagner du temps à moindre frais et de lâcher du lest vis-à-vis de ceux qui attendent une évolution sur cette question.

"Sachant que la prochaine étape ne sera vraisemblablement pas la pleine reconnaissance de la marocanité du Sahara mais une simple présence encouragée des entreprises françaises, c’est une façon subtile de ne pas répondre à la question posée par le Maroc", conclut le politologue pour qui tout porte à croire que la position française n’évoluera pas à court-terme.

Mais en réalité, si la France choisit une manœuvre économique pour ne pas se prononcer sur la souveraineté du Maroc, il n’en demeure pas moins que cette "gesticulation" médiatique vient un peu tard après la visite royale aux Emirats Arabes Unis qui a permis de sécuriser le financement des plus grands projets structurants dans les provinces du Sud qui n'ont par conséquent pas ou plus besoin des investissements français…

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