Décryptage. La loi sur l’autoproduction électrique reste inapplicable, malgré la promotion lancée par le ministère

Une campagne de communication lancée sur les réseaux sociaux par le ministère de la Transition énergétique annonce la possibilité d’autoproduire de l’électricité grâce à la loi 82-21. Une proposition irréalisable pour le moment.

Décryptage. La loi sur l’autoproduction électrique reste inapplicable, malgré la promotion lancée par le ministère

Le 4 septembre 2023 à 14h31

Modifié 4 septembre 2023 à 16h01

Une campagne de communication lancée sur les réseaux sociaux par le ministère de la Transition énergétique annonce la possibilité d’autoproduire de l’électricité grâce à la loi 82-21. Une proposition irréalisable pour le moment.

"Vous êtes des particuliers, des entreprises ou des collectivités territoriales, et vous voulez produire votre propre énergie. Le ministère de la Transition énergétique et du développement durable vous informe qu’il existe la loi 82-21 qui vous permet de produire votre propre électricité, quelle que soit la taille de l’infrastructure ou celle du réseau." C’est avec cette promesse que débute un spot publicitaire diffusé sur les réseaux sociaux par le ministère depuis le 16 août dernier.

Ce clip de 44 secondes, diffusé en darija, souligne par ailleurs la possibilité de réduire les factures d’électricité grâce à cette loi. La publicité annonce enfin de nouvelles explications à venir. Qu’en est-il réellement ?

Des textes en gestation

Or, en l’absence des textes réglementaires qui complètent la loi, "rien ne peut encore être fait", tranche Khalid Semmaoui, président de l’Association marocaine des industries solaires et éoliennes (AMISOLE). Au total, quatre projets de décret permettant la mise en application de la loi sont aujourd’hui en discussions et n’ont toujours pas été promulgués.

La loi, entrée en vigueur en mars dernier après avoir été approuvée en Conseil de gouvernement en décembre 2022, nécessite par ailleurs d’autres textes réglementaires pour pouvoir en juger l’applicabilité, notamment les tarifs de vente et les conventions types entre les gestionnaires de réseau et les bénéficiaires, etc.

"Au-delà des quatre décrets, il reste beaucoup de travail, et beaucoup d’intervenants doivent donner leur avis ou encore publier des documents à même de rendre cette possibilité effective", poursuit Khalid Semmaoui. Il est à signaler que le législateur donne aux parties prenantes quatre ans pour produire les textes réglementaires nécessaires à la loi.

Une rentabilité de l’autoproduction difficile à établir

Concernant la promesse de réduction des factures d’électricité, annoncée dans le spot, notre interlocuteur reste sceptique : "Pour le moment, en dehors du Capex, nous n’avons aucun élément économique nous permettant de juger de la rentabilité ou pas d’un projet d’autoproduction électrique".

Pour Khalid Semmaoui, le premier élément à prendre en considération a trait à la loi en elle-même. Les processus d’autorisation de la loi distinguent en effet deux capacités. Une première, inférieure à 11 kilowatts, et qui nécessite une simple déclaration. Cette capacité correspond à une production de 1.200 kWh/mois, soit l’équivalent d’une consommation d’une villa moyenne, ou à une facture d’électricité de 2.500 à 3.000 DH par mois.

Au-delà de ce palier, et jusqu’au plafond de 5 MW prévu par la loi, il faut passer à une demande d’autorisation. Celle-ci comporte des investissements conséquents, notamment en termes d’étude d’impact du projet et d’étude d’orientation, etc., ce qui rend les projets au-delà de 11 kW particulièrement coûteux. "La loi ne prévoit pas de paliers intermédiaires entre les 11 kW et les 5 MW", précise Khalid Semmaoui.

En d’autres termes, à partir de 12 kW, les mêmes obligations sont imposées aussi bien aux copropriétaires d’un immeuble, pour qui l’électricité est une consommation finale, qu’à des industriels ou des collectivités territoriales, pour qui cette électricité est une production intermédiaire.

Autre élément déterminant pour la rentabilité et in fine pour l’attractivité de la loi : la tarification des excédents de production en période de pics. Une information encore manquante et qui doit faire l’objet de discussion et sûrement d’un arbitrage de la part de l’Autorité nationale de régulation de l’électricité (ANRE). En effet, la particularité des renouvelables est bien le phénomène d’intermittence. On produit du renouvelable dépendamment des conditions climatiques, des heures de la journée et des saisons. Parfois, la production dépasse la consommation, ce qui engendre des excédents qu’il faut évacuer vers le réseau.

La loi permet de réinjecter dans le réseau 20% de la production annuelle. Or jusqu’à présent, aucune tarification ni modalité de gestion n’a encore été précisée, ni par l’ONEE, ni par l’ANRE, ni encore par le ministère de l’Intérieur, qui détient la tutelle des régies et concessions de distribution d’électricité. En l’absence de ces éléments, difficile donc de se prononcer, ni sur quand la loi deviendra effective et donc applicable, ni encore si elle permettra de baisser les factures d’électricité comme promis par le spot du ministère.

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