BTP : sans intervention urgente des autorités, les professionnels craignent de lourdes conséquences sur le secteur

La Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics a tenu, ce jeudi 5 janvier à Rabat, une conférence de presse pour alerter sur les difficultés que traverse le secteur, lourdement impacté par la crise du Covid et la guerre en Ukraine.

La Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics a tenu, ce jeudi 5 janvier 2022 à Rabat, une conférence de presse pour alerter sur la crise du secteur.

BTP : sans intervention urgente des autorités, les professionnels craignent de lourdes conséquences sur le secteur

Le 6 janvier 2023 à 11h53

Modifié 6 janvier 2023 à 16h42

La Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics a tenu, ce jeudi 5 janvier à Rabat, une conférence de presse pour alerter sur les difficultés que traverse le secteur, lourdement impacté par la crise du Covid et la guerre en Ukraine.

La conférence a été organisée en marge du conseil d’administration de la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics (FNBTP), sur le thème : "La non-prise en compte de la répercussion réelle de la flambée des intrants, des matériaux et des délais d’approvisionnement sur les entreprises du BTP, ainsi que les difficultés de mise en œuvre de la circulaire du chef du gouvernement n°09/2022". Cette conférence, qui fait suite à plusieurs actions de sensibilisation concernant l’application biaisée de ladite circulaire, a pour objectif principal de sensibiliser sur la situation critique que connaît le secteur depuis quelques mois déjà.

"Insuffisance des mécanismes de révision des prix"

"Nos entreprises souffrent grandement et continuent de souffrir de la pandémie de Covid-19", a déploré le président de la Fédération, Mohamed Mahboub, lors de cette conférence.

"Plusieurs d’entre elles ont mis la clef sous la porte. D’autres endurent les affres des redressements judiciaires, sans parler des mesures coercitives telles que l’exclusion des marchés publics", a-t-il ajouté.

"La presse nationale a fait état, à plusieurs reprises, de l’impact du Covid et de la guerre en Ukraine sur le BTP. Le gouvernement a aussi fait part de sa préoccupation à ce sujet, en publiant une circulaire visant à prendre en compte cette situation dans la gestion de ses relations avec nos entreprises. Celles-ci ont non seulement dû faire face à la hausse des coûts des intrants et des frais de fret et de transport, mais aussi à la désorganisation des chaînes d’approvisionnement."

"Ceci dans un contexte marqué par la réticence du secteur bancaire, l’insuffisance ou l’inadaptation des mécanismes de révision des prix et la rigidité de nombreux maîtres d’ouvrage."

"Un fossé entre les décideurs politiques et le terrain"

"Une réflexion préliminaire générale est donc nécessaire. Nos entreprises ont le sentiment qu’il y a un fossé entre les décideurs politiques et les personnes sur le terrain, surtout les maîtres d’ouvrage", a par ailleurs souligné M. Mahboub.

"Les premiers comprennent nos problèmes et essaient de les résoudre, tandis que les seconds s’en tiennent à leurs prérogatives, voire négocient et vident les décisions des premiers responsables publics de leur substance."

"Nous avons constaté qu’un certain nombre de maîtres d’ouvrage publics, notamment d’établissements et d’entreprises publics ainsi que d’organismes relevant des collectivités territoriales placés sous la tutelle du ministère de l’Intérieur (en particulier les sociétés d’aménagement), n’ont pas fait preuve de la diligence nécessaire dans le traitement des requêtes des entreprises, ou ont décidé de négocier les acquis de l’esprit et de la circulaire, ou carrément de l’ignorer."

"Nous avons signalé ce fait au chef du gouvernement, fin juillet 2022, à quelques jours de la date de caducité de cette circulaire. Nos entreprises ont souvent été confrontées au refus ou à l’absence de réponse de la part des donneurs d’ordre pour leurs requêtes, ou encore à la lenteur dans l’instruction de leurs dossiers."

Toujours selon le président de la FNBTP, les mesures de la circulaire qui ne sont pas appliquées concernent :

- La résiliation des marchés en cours sans confiscation des garanties pécuniaires, en raison de l’impossibilité de continuation d’un marché au vu de la persistance de la conjoncture économique exceptionnelle (inflation).

- La régularisation, par avenant, des délais d’exécution des marchés en cours. Certains maîtres d’ouvrage sont même allés jusqu’à introduire des clauses de renonciation dans ces avenants. D’autres ont appliqué des pénalités de retard sur certains chantiers au cours de la période d’application de la circulaire.

- Une lecture restrictive des dispositions de ladite circulaire à la défaveur de l’entreprise.

- La persistance du contexte économique inflationniste.

- Le non-rétablissement de l’équilibre financier des marchés.

- La période extrêmement limitée de la mise en application de la circulaire.

- L’absence de retour ou le refus des requêtes visant la revue des modalités de la révision des prix.

"Une action plus ferme doit être prise auprès des maîtres d’ouvrage"

"Dans ce dernier cas, les maîtres d’ouvrage sollicités refusent de procéder à la passation d’avenants ; soit pour intégrer des formules de révision dans le cas des marchés à prix fermes, soit pour supprimer le plafonnement appliqué aux montants des prix révisés ; soit encore pour appliquer des formules plus adaptées sur la base d’index mis à jour."

"Or, il faut rappeler que la révision des prix relève du principe de la préservation de l’équilibre économique et doit refléter fidèlement les évolutions conjoncturelles, surtout inflationnistes. Elle n’est nullement une marge complémentaire, mais bien une mesure de justice. A ce titre, elle doit être adaptée à la réalité et non à des formules paramétriques qui, parfois, cachent une méconnaissance de l’évolution réelle des coûts."

"Nous sommes disposés à donner des exemples concrets sur l’inadaptation des formules actuelles. De plus, certains établissements publics continuent même de lancer des appels d’offres assortis de prix fermes ou de plafonner la révision des prix. Cette situation préoccupante met en péril l’équilibre financier de ces marchés et porte un grand préjudice à la trésorerie des entreprises, déjà très affaiblies par une conjoncture économique éprouvante."

Et de poursuivre : "Nous avons relevé que des maîtres d’ouvrage interprètent en leur faveur certaines dispositions ambiguës de cette circulaire, afin de rejeter les différentes requêtes et réclamations des entreprises, quand bien même ces dernières sont dûment justifiées et motivées par les contraintes liées à la conjoncture économique exceptionnelle actuelle et non imputables à la défaillance des entreprises."

"L’imposition de clauses de renonciation étrangères à l’objet des avenants doit être interdite, car elle relève d’un comportement léonin. Aussi, les entreprises sont soucieuses du sort réservé à leurs doléances rejetées ou restées sans réponse, sachant que les commissions prévues chargées du règlement des litiges ne sont pas installées. Compte tenu de ce qui précède, nous demandons une action plus ferme du gouvernement auprès des maîtres d’ouvrage impliqués pour une résolution rapide de cette situation problématique."

Reconduire la durée de validité de la circulaire pour six mois

D’autre part, "et suite à la persistance du contexte économique inflationniste et à l’incidence des agissements négatifs précités, nous attendons toujours une réponse favorable à la requête de notre Fédération pour la reconduction de la durée de validité de sa circulaire pour 6 mois, en veillant à :

- sa bonne application par tous les ordonnateurs publics concernés, en introduisant les amendements qui vont éclaircir des dispositions afin de faciliter et d’uniformiser leur application ;

- l’installation des commissions prévues chargées du règlement des litiges".

"Certes, nous avons conscience des efforts du gouvernement en faveur de notre secteur, comme la réforme du décret des marchés publics qui vient d’être adoptée. Nous sommes également conscients que seule une remise en cause totale du déséquilibre des relations maîtres d’ouvrage-entreprises permettra d’améliorer globalement, et de façon pérenne, la pratique de la commande publique."

"Nous mesurons l’ampleur et l’importance des projets lancés par l’Etat pour équiper le pays mais, parallèlement, nous faisons le décompte des entreprises laissées sur le carreau avec leurs salariés, leurs familles et leurs sous-traitants, qu’elles aient ou non mis la clef sous la porte ou se battent pour sortir des liquidations et redressements judiciaires."

"La FNBTP réitère ses demandes auprès du gouvernement pour mettre en place des mesures urgentes afin d’accompagner et de garantir la pérennité du secteur industriel et entrepreneurial marocain du BTP, que le Royaume du Maroc a mis des décennies à bâtir depuis l’indépendance, et qui constitue l’un des fleurons de la dynamique économique et industrielle nationale", a-t-il conclu.

Le BTP emploie plus de 1,2 million de personnes, soit 10% de la population active

A la question d’un confrère sur le rôle de la commission de suivi de l’application de ladite circulaire, mise en place par la ministre de l’Habitat, Mohamed Mahboub a répondu que "selon le retour de nos entreprises, il y a encore des problèmes concernant la société Al Omrane, notamment au niveau des paiements".

"En ce concerne le décret des marchés publics, la première mouture approuvée récemment par le gouvernement permettra d’améliorer le climat dans le secteur, si elle respecte ce qui a été convenu avec les professionnels du BTP", a-t-il indiqué. Pour l’heure, "nous n’avons pas encore consulté la version adoptée".

Et d’ajouter : "Le Maroc est l’un des seuls pays africains qui dispose d’une autonomie dans la réalisation de ses infrastructures. Nous n’avons pas besoin d’entreprises étrangères dans ce sens. Nous avons bâti nos entreprises pendant des décennies ; elles ont de l’expertise. Elles ont également sauvé de nombreux projets, en particulier lorsque des entreprises étrangères étaient défaillantes. Il s’agit de projets relatifs aux autoroutes ou à la LGV."

"Contrairement à ce que certains croient, elles ne sont pas là pour faire du profit. Elles participent au développement du pays et emploient des gens toutes catégories confondues, notamment sans diplôme."

Le secteur du BTP emploie plus de 1,2 million de personnes, soit 10% de la population active au Maroc. Il représente 6% du PIB national et un chiffre d’affaires de 60 milliards de dirhams.

 

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