Le financement extérieur jugé indispensable pour juguler la hausse des taux domestiques (AGR)
Dans son document ‘Hebdo Taux’ publié le 20 mai, la société de recherche Attijari Global Research « AGR » est revenue sur la hausse continue des taux sur le marché obligataire au courant de la semaine du 13 au 19 mai.
Il est à rappeler que le Maroc évolue dans une conjoncture inflationniste depuis la fin de l’année 2021. Avec l’éclatement de la guerre en Ukraine, la situation s’est fortement détériorée. Néanmoins, la société de recherche note que le système bancaire demeure stable « soutenu par les actions proactives de la Banque Centrale à travers ses injections hebdomadaires et une politique monétaire accommodante depuis 2020 ». Cette situation perdure malgré une détérioration continue du pouvoir d’achat des ménages, minés par la hausse généralisée des prix. L’inflation à fin avril atteignait 5,9% contre 5,3% un mois auparavant.
Dans ce contexte, une hausse des taux obligataires est observée. AGR précise que « la tendance haussière des Taux sur le marché obligataire se poursuit cette semaine avec une appréciation du rendement de la maturité 2 ans de plus de 5 PBS, portant ainsi le cumul de la hausse depuis le début de l’année 2022 à 20 PBS ». Néanmoins, il faut préciser que cette hausse n’est pas induite pas des pressions observées sur les finances publiques.
Le marché anticipation des dépenses supplémentaires de l’Etat cette année
A y regarder de près, les finances publiques à fin avril se portent globalement bien, avec des recettes qui progressent nettement mieux que les dépenses et que les prévisions par rapport à la même période l’an dernier.
Contacté sur le sujet, un analyste de la place explique : « Aujourd’hui, il faut rappeler que l'on n'observe pas de pressions significatives sur les finances publiques. Le déficit budgétaire demeure assez maîtrisé, malgré la forte hausse des dépenses de compensation qui sont en grande partie compensées par la hausse des recettes fiscales ». A fin avril, les recettes de l’IS ont progressé de 74% par rapport à la même période en 2021, soit un ajout en valeur de 10 MMDH.
« Ce qu’il se passe sur le marché, c’est qu’il y a en réalité des anticipations de dépenses supplémentaires d’ici la fin de l’année. Aujourd’hui, le cours du gaz butane fait que l’on va dépasser de très loin les objectifs prévus dans la LF 2022 qui tablait sur 450$ la tonne. Sur le marché international, en moyenne et en YTD, nous sommes à plus de 900$ » explique notre interlocuteur. A ce titre, la charge de compensation à fin avril seulement a augmenté de 103,5% à 12,4 MMDH contre un objectif de 17 MMDH dans la LF 2022. Désormais, la question est de savoir si le Trésor pourra maîtriser son déficit budgétaire. En soi, il dispose de plusieurs leviers, notamment les financements innovants comme cela a été fait en 2021 et l’investissement.
Malgré les signaux positifs envoyés par l’Etat sur la gestion du déficit budgétaire, il y a de la tension sur les taux. In fine, l’inflation gagne les esprits. « Aujourd’hui on remarque une hausse des taux de rendement obligataire liés à une hausse naturelle de l’inflation. Malgré le fait que BAM maintienne son taux directeur inchangé, on voit une hausse des taux sur la partie courte qui est liée à la politique monétaire » explique notre source. Sur la partie moyenne et longue, plus corrélée aux finances publiques, des tensions haussières sont également observées, or, comme rappelé précédemment, les signaux budgétaires sont globalement bons.
La hausse actuelle vient donc des anticipations inflationnistes durables de la part des investisseurs, à la recherche de rémunération de leur épargne à des niveaux supérieurs à l’inflation, et non d’une crainte sur les conditions budgétaires.
Dans ces conditions, le Trésor devrait réaliser une levée à l’international pour satisfaire une partie de son besoin de financement.
Une sortie internationale indispensable selon AGR
Dans son document ‘Budget Focus Mars 2022’, AGR expliquait déjà que l’orientation vers le financement extérieur est un levier pour remédier à cette légère pression observée. « En effet, la sortie à l’international permettrait au Trésor de financer son besoin de financement croissant sans pour autant induire de pressions importantes sur les liquidités domestiques » rappelait la société de recherche.
Dans son document Hebdo Taux, AGR rappelle que cette année, une tombée importante à l’international d’un milliard de dollars est attendue au mois de décembre prochain. Malgré des conditions qui demeurent moins favorables à l’international, une sortie du Trésor demeure « indispensable » cette année pour AGR et ce, de manière à juguler les pressions haussières sur les taux domestiques. La situation est en effet moins favorable du fait de l’environnement international et le resserrement global des politiques accommodantes (cessation des rachats d’actifs de la BCE et rehaussement du taux directeur de la FED, ndlr).
Cependant, si ce besoin de financement est satisfait via le marché local, une hausse éventuelle des taux domestiques pourrait être observée. Cette situation serait naturellement à éviter dans le sens où elle entraînerait une hausse naturelle des taux débiteurs et impacterait les ménages et les entreprises, ainsi que les taux obligataires qui pousseraient le Trésor à s’endetter de manière moins favorable.
Il est à rappeler que selon les objectifs de la loi de finances, un total de 40 MMDH devrait être levé sur le marché extérieur par le Trésor cette année. A fin avril, seulement 2,9 MMDH avaient été levés.
Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!