Ce que l’on sait sur la taxe carbone prévue par l'Union Européenne pour 2023

A compter de 2023, l’Union européenne mettra en place son mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. De quoi s’agit-il ? Où en est le Maroc face à l’urgence de la décarbonation ? Réponses d’experts.

Ce que l’on sait sur la taxe carbone prévue par l'Union Européenne pour 2023

Le 19 avril 2022 à 16h16

Modifié 19 avril 2022 à 16h16

A compter de 2023, l’Union européenne mettra en place son mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. De quoi s’agit-il ? Où en est le Maroc face à l’urgence de la décarbonation ? Réponses d’experts.

Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), communément appelé taxe carbone, est une mesure climatique. Elle a pour objectifs de prévenir le risque de fuite de carbone et de soutenir l’ambition de l’Union européenne en matière d’atténuation du changement climatique, tout en garantissant la compatibilité avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Le MACF contribuera progressivement à réduire le risque de fuite de carbone, tout en encourageant les producteurs des pays tiers à verdir leurs procédés de production.

"L’objectif de l’UE est d’orienter la consommation des citoyens vers des produits qui ne polluent pas, tout en créant une équité entre les entreprises étrangères et les entreprises européennes, qui paient déjà une taxe carbone depuis 2014", nous explique Saïd Guemra, expert en management de l’énergie 4.0.

"Cette équité va se traduire par le paiement d’une taxe pour le surplus de carbone présent dans certains produits", poursuit notre interlocuteur, précisant que cette taxe pourrait avoir des répercussions sur les prix de vente.

Le mécanisme en place dès 2023 pour cinq secteurs

D’après la Commission européenne, les exportateurs des pays tiers devront déclarer les émissions intégrées dans leurs marchandises, sans toutefois devoir payer d’ajustement financier pendant une période de transition qui débutera en 2023 et s’achèvera fin 2025. Ce délai permettra de mettre en place le système définitif, qui devrait être pleinement opérationnel en 2026.

"A partir de 2023, l’UE constituera une base de données après avoir consulté le bilan carbone des entreprises pour voir où elles en sont, puis, à partir de 2026, elle appliquera la taxe", nous explique Saïd Guemra. "Nous attendons de nouvelles instructions de la part de l’UE", ajoute-t-il, soulignant que "pour l’instant, le taux de cette taxe n’est toujours pas fixé."

Cette taxe carbone s’appliquera dans un premier temps aux importations des marchandises de cinq secteurs présentant des émissions de carbone élevées : le ciment, le fer et l’acier, l’aluminium, l’engrais et l’électricité.

D’ici la fin de la période de transition, la Commission européenne évaluera le fonctionnement du mécanisme et déterminera si sa portée doit être étendue à davantage de produits et services.

Le mécanisme ciblera d’abord les émissions directes

En plus de ne concerner que certains secteurs, l'UE a opté pour la progressivité dans le périmètre d'action de l'entreprise qui rentre en compte dans la taxe selon des scopes.

Ces scopes sont trois établie selon le GHG Protocol, qui est une méthode de calcul et de déclaration d’émissions de gaz à effet de serre :

- Le scope 1 comptabilise les émissions directes de gaz à effet de serre dans le périmètre de l’entreprise, provenant de ses sources détenues ou contrôlées. Il devrait être intégré dans le bilan carbone des industriels dès 2023.

- Le scope 2 regroupe les émissions de gaz à effet de serre liées aux consommations d’électricité nécessaires à la fabrication du produit.

- Le scope 3 englobe toutes les autres émissions de gaz à effet de serre qui ne sont pas liées directement à la fabrication du produit. Ces émissions sont une conséquence des activités de l’entreprise, mais proviennent de sources non détenues ou contrôlées par l’entreprise (transport de carburants achetés, utilisation des produits et services vendus, etc.).

D’ici 2026, la Commission européenne évaluera le fonctionnement du MACF et déterminera s’il y a lieu de couvrir les émissions de carbone dites "indirectes", c’est-à-dire celles provenant de l’électricité utilisée pour produire la marchandise (scope 2).

Le bilan carbone de l’électricité marocain est important

Saïd Guemra rappelle qu’au Maroc, le bilan carbone de l’électricité est assez pesant. "Les émissions d’électricité marocaines culminent à environ 750 grammes d’équivalent CO2 par kWh, tandis qu’elles sont d’environ 180 g/Kwh en Espagne et 50 g/Kwh en France", nous dit-il.

Toutefois, Saïd Mouline, directeur de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE) et expert en énergie, nous précise qu’il faut prendre en considération le fait que le taux de carbone devrait baisser chaque année.

Concernant les engrais, immédiatement concernés par la taxe carbone, la même source estime que ce secteur devrait "plutôt bien s’en sortir, puisque le groupe OCP est déjà à 88% d'énergies renouvelables".

Saïd Mouline insiste par ailleurs sur la nécessité de décarboner tous les secteurs et entreprises marocaines plutôt que de s’en tenir aux secteurs concernés. La décarbonation permet de réduire la facture énergétique et d’améliorer l’efficacité énergétique. L’expert appelle donc les entreprises à utiliser les énergies renouvelables et à valoriser leurs déchets.

"Il faut que les entreprises s’engagent dans un programme de transition et d’efficacité énergétique", plaide également Saïd Guemra, qui recommande la mise en place de centres de veille énergétique sectoriels, spécifiques aux contraintes de chaque secteur.

Ces deux spécialistes préconisent aussi la mise en place effective d’une taxe carbone nationale dans le but d’accompagner la décarbonation du Maroc.

Compenser l’empreinte carbone à travers des investissements verts

Saïd Mouline souligne cependant que décarbonation ne rime pas avec production neutre en carbone. Il s’agit d’une réduction de l’empreinte carbone de l’entreprise, nuance-t-il.

Ainsi, il est possible pour les entreprises de compenser leur empreinte carbone en réalisant des investissements verts. "Un programme a été lancé avec la Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement afin de permettre aux entreprises de réaliser des investissements verts en finançant des toits photovoltaïques dans les écoles des zones rurales, ou en plantant des forêts par exemple", précise Saïd Mouline.

Pour accompagner la décarbonation des entreprises, des lignes de financements verts sont mises en place avec la Caisse centrale de garantie ou l’agence Maroc PME. Ces lignes peuvent être consultées sur le guide de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique.

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