Startups Tech : Les fonds d’investissement notent une meilleure qualité du dealflow
L’an dernier, le monde du Capital Investissement au Maroc avait globalement bien résisté à la crise. Dans le dernier rapport de l’AMIC publié en avril dernier, 1.350 millions de DH de fonds ont été levés en 2020 contre 1.187 millions de DH en 2019, soit une hausse de près de 14%.
Malgré les perturbations de la crise, les entreprises financées avaient également mieux résisté aux aléas du coronavirus que le reste des entreprises nationales. Lors de la visio-conférence organisé pour la présentation du rapport, Slimane Ed-Dafali, enseignant-chercheur à l'université Chouaib Doukkali, ENCG El Jadida expliquait à ce sujet que « la baisse du chiffre d’affaires des entreprises financées n’est que de 20% comparativement à ce qui a été observé au niveau national, comme démontré par une étude réalisée par Inforisk qui a dévoilé que la baisse du chiffre d’affaires des entreprises au niveau national est de 32% en 2020. Cela montre qu’il y a une résilience au niveau des entreprises financées par le capital investissement ».
Le secteur technologique a par exemple été l'un des moins touchés par les répercussions de la crise, démontrant une forte résilience en 2020. Globalement, l’année dernière a été vectrice d’opportunités pour certaines startups numériques. Concernant les fonds d’investissements spécialisés sur le segment des entreprises innovantes, quel est le sentiment aujourd’hui ?
Si aucun chiffre officiel n’est disponible sur l’évolution des niveaux de financement par rapport à l’an dernier, certains acteurs témoignent du ressenti depuis le début de 2021.
Un pipeline étoffé et une amélioration des profils des entrepreneurs
La crise a rebattu les cartes dans le monde des jeunes entreprises du numérique et de leurs porteurs de projets. Depuis les opportunités apportées par la crise dans le monde du numérique, certains fonds note qu’en 2021, une amélioration des profils d’entrepreneurs est perceptible.
Contactée, Meriem Zairi, Managing Director de SEAF Morocco nous explique : « Notre pipeline s’est en effet étoffé cette année par rapport à l’an dernier avec des nouvelles cibles potentielles d’acquisition que nous avons pu identifier et avec lesquelles nous avons pu commencer les discussions ». Pour notre interlocutrice, la crise a joué un rôle majeure dans le changement de compétences des profils d’entrepreneurs. L’incertitude et la complexité apporté par la crise a poussé les fondateurs de startups à développer de nouvelles qualités. « C’est assez cru à dire, mais la crise a fait une sorte de sélection naturelle et nous voyons des entrepreneurs plus agiles face à nous. Ils ont été, à un moment, obligé de pivoter et ont appris à évoluer dans un environnement incertain, et c’est une qualité très importante. De manière générale, une certaine maturité a été acquise » poursuit Meriem Zairi.
Un constat que partage également le directeur de l’investissement du Maroc Numeric Fund II (MNF II), Omar El Hyani. « Nous avons senti une amélioration de la qualité des dossiers. Cela démontre qu’il y a une véritable volonté de se diriger vers le digital sur différents domaines et du coup, nous avons plus de startups de qualité dans le pipeline » constate-t-il. Plus généralement, le regard sur cette industrie a changé par rapport à l’ère pré pandémique. Désormais, l’industrie du numérique est comprise et considérée comme nécessaire. Notre interlocuteur poursuit : « Globalement, sur ce segment technologique, il y a une amélioration de la qualité du dealflow et des postulants qui recherchent des financements. Depuis 2019, le paradigme a changé sur ce plan. Tous les gens qui disaient que le numérique était un ‘nice to have’ savent désormais que c’est un ‘must have’. Cela change tout en terme d’approche ».
Au niveau des investisseurs institutionnels, la vision et la perception a également évolué en 18 mois. « La crise apporte également son lot de choses intéressantes. On voit des gens qui se positionnent sur des thématiques intéressantes. On voit aussi une volonté des institutionnels de diversifier leur portefeuille et regardent avec beaucoup d’intérêt ce qui peut être fait sur ces segment-là d’actifs. Nous voyons des débuts d’intérêt des grands institutionnels qui se positionnent sur ce segment et c’est très encourageant » explique Meriem Zairi.
Un nombre croissants de startups cherchent des financements
Les opportunités créées par la crise ont poussé de nombreux entrepreneurs à se lancer. En plus de cela, les programmes d’accompagnement de startups du secteur technologique ont également apporté une jeune écosystème à maturité.
Des initiatives comme 212 Founders de la Caisse de Dépôts et de Gestion (CDG) ou par exemple Innov Idea de la Caisse Centrale de Garantie (CCG) ont permis l’émergence d’entreprises avec un produit, un marché, des process, et une volonté de grossir.
« Nous avons pas mal de programmes depuis 2 ou 3 ans, notamment ceux de la Caisse Centrale de Garantie (CCG) comme Innov Idea qui sont des programmes d’accompagnement de startups et qui commencent à donner leurs fruits. Aujourd’hui, nous avons des startups issues de ce programme qui cherchent à lever des financements plus importants pour accélérer leur croissance » explique Omar El Hyani. Une manne de plus pour gonfler les pipeline des fonds d’investissement spécialisé sur l’accompagnement de ces jeunes entreprises innovantes.
Néanmoins, si le regard sur l’industrie à changé et que les entrepreneurs sont plus pertinents et qualifiés, quelques stigmates de la crise impacte toujours les financement.
Des conclusions de deals freinés par les restrictions
Alors que le contact humain est capital dans la relation de confiance entre fonds d’investissement et entrepreneurs, les différentes restrictions qui ont perduré depuis le début de l’année ont cependant retardé pour certains les discussions d’investissements.
« La principale différence c’est que les relations entre fonds et startups prennent beaucoup plus de temps à se concrétiser par rapport à l’ère pré Covid-19. Les discussions sont plus longues parce qu’il y a principalement des rapports distanciels à cause du contexte pandémique. Or, il est important de créer du lien humain avec l’entrepreneur et le faire dans la durée » nous confie Meriem Zairi. Elle poursuit : « Cela a globalement ralenti les différents process que nous avons et donc il y a une frustration car il y a une relance et que le trend est beaucoup plus positif que celui de 2020, mais il y a une lenteur induite par le Covid qui s’est mise en place sur la façon de faire les affaires et qui complique l’exercice ».
Du côté du MNF II, si les échanges avec les entrepreneurs n’a pas été altéré cette année, d’autres embuches administratives ont retardé la concrétisation de certains deals. « Cela s’est notamment manifesté par la lenteur des tribunaux de commerce. Les délais de traitement se sont considérablement rallongés. Au tribunal de Rabat par exemple, nous avons mis 2 mois pour créer une société » explique le directeur de l’investissement du MNF II.
Si aucun chiffre n’est avancé quand aux prévisions d’investissement durant l’année 2020, la tendance sera probablement similaire à celle observée l’an dernier. « En terme de volume d’affaires, nous serons je pense sur une tendance similaire à celle de l’année dernière » conclut Meriem Zairi.
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