Le Capital investissement au Maroc a bien résisté à la crise en 2020 (AMIC)

M. Ett. | Le 7/4/2021 à 15:51

Hausse des montants levés et des nouveaux investissements, baisse limitée du chiffre d'affaires des entreprises investies... Voici les principaux constats du rapport d’activité 2020 de l'écosystème du capital investissement et de l'étude d'impact du Covid sur le secteur.

D’après l’étude de l’activité de l’écosystème du capital investissement au Maroc, présentée lors de la visio-conférence organisée par l'Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC) ce mercredi 7 avril, 1.350 millions de DH de fonds ont été levés en 2020 contre 1.187 millions de DH en 2019, soit une hausse de près de 14%. Les levées de capitaux en 2020 ont été réalisés par 4 fonds, dont 3 sont dédiés exclusivement à l’investissement au Maroc et 1 fonds destiné à l’investissement transrégional.

Le périmètre de cette étude concerne 18 sociétés de gestion en 2020, qui gèrent 38 fonds d’investissement, pour un total de 120 entreprises investies actuellement.

« Il y a une amélioration par rapport à l’année précédente alors qu’on s’attendait tous à une baisse significative de ces montants », commente Omar Benchekroun, Consultant Senior, Fidaroc Grant Thornton.

A noter que les fonds transrégionaux restent les principaux bailleurs de fonds comme indiqué par Omar Benchekroun. « Il y a de plus en plus de fonds régionaux qui s’accapare, depuis 2012, 73% des fonds levés pour le Maroc. Les organismes de développement internationaux sont en effet les principaux bailleurs de fonds du secteur. Ils sont suivis par les institutions financières (banques, compagnies d’assurance, caisses de retraites, holding d’investissement,…) ».

804 millions de DH investis en 2020

En ce qui concerne les investissements réalisés en 2020, ils se sont établis à 804 millions de DH (effectués par 8 sociétés de gestion), contre 765 millions de DH en 2019 (+5%). 20 entreprises ont été investies en 2020 (18 nouveaux investissements et 2 réinvestissements) contre seulement 9 en 2019. « Malgré le contexte de crise sanitaire, le secteur a pu maintenir un rythme d’investissement soutenu et même plus élevé qu’en 2019 ».

Le capital développement reste le principal stade qui intéresse les fonds d’investissement avec 7,37 milliards de DH à fin 2020 contre 6,71 milliards de DH à fin 2019. « Mais, il a été constaté, à partir de 2017, une quasi disparition des investissements dans les entreprises en phase de transmission et de retournement et une véritable émergence de l’investissement dans les entreprises en amorçage et en risque. Cela est lié aux initiatives publiques et privées qui ont été faites ces dernières années en faveur de l’amélioration de l’écosystème innovation mais aussi grâce à toutes les initiatives publiques en termes de soutien de la petite entreprise qui ont porté leurs fruits et qui ont suscité de l’intérêt pour les fonds d’investissement. L’initiative de la CCG a permis de créer de nouveaux fonds dédiés à l’accompagnement des petites entreprises », explique-t-il.

Par secteur d’activité, quasiment tous les secteurs économiques qui bénéficient du capital investissement. Par contre, « quelques secteurs s’accaparent une part importante en termes d’investissement, à savoir les services et transport qui représentent 27% des investissements réalisés à fin 2020 ». Arrivent ensuite les industries (aéronautique, éducation, emballage, industrie chimique et autres), avec une part de 15% et la distribution (14%).

Source : AMIC.

Du côté des tranches de capital acquises dans les sociétés, une baisse significative des transactions majoritaires est observée, contre une augmentation des transactions minoritaires, entre 2017 et 2020. « Ces données montrent que les fonds d’investissement ne cherchent pas à contrôler les entreprises mais juste à les accompagner et à participer à leurs projets de développement », pense-t-il.

L’évolution de la taille des transactions entre les 3ème et 4ème générations de fonds (de 2012 à 2020) a connu une augmentation des tickets de 100 millions de DH dont la part est passée de 13% à 20%. Il y a eu aussi une augmentation des tickets inférieurs à 20 millions de DH qui passent de 37% à 54% entre les deux générations. « On a d’un côté une augmentation du nombre des grosses transactions et une augmentation en parallèle des petites opérations qui s’adressent à de petites structures », observe Omar Benchekroun.

Farid Benlafdil, Directeur Associé, Afric Invest, intervenant lors de cette conférence, explique que « la hausse des petites transactions a eu lieu grâce à l’initiative de la CCG pour soutenir le segment du capital création et capital-risque. Les gros tickets concernent les premières sociétés de gestion créées entre 2000 et 2005 qui ont démarré avec des fonds de 20 à 30 millions d’euros et maintenant ils gèrent des fonds supérieurs à 150 millions d’euros. C’est la taille des fonds qui participe à la hausse du ticket d’investissement ».

En termes d’investissements par région, Casablanca-Settat continue de concentrer la grande part des investissements réalisés dans ce secteur (69% des montants investis à fin 2020). Arrivent ensuite les autres grandes régions du Maroc à savoir Rabat-Salé Kenitra qui s’accapare 9% des montants investis, Fès-Meknès avec 8% et Tanger-Tétouan Al Houceima (5%).

Les désinvestissements baissent en 2020

10 actes de désinvestissements ont été enregistrés en 2020, pour un montant global de 220 millions de DH, contre 796 millions de DH en 2019 (-72%). Plus en détails, 9 sorties totales et 1 sortie partielle ont été effectuées en 2020 par 6 sociétés de gestion.

« La baisse des désinvestissements s’explique par les décisions de désinvestissement qui ont été reportées ou annulées à cause de la crise », explique Omar Benchekroun.

En cumul à fin 2020, 132 actes de désinvestissements ont été réalisés pour un montant total de 5 milliards de DH.

Les principales sorties sont réalisées auprès du marché secondaire, des industriels et du management des entreprises investies.

Le TRI brut moyen (le TRI par opération d’investissement) à fin 2020 s’est situé à 13%. Par stade, le TRI brut est de 17% dans la transmission, 13% dans le développement et 2% dans l’amorçage/risque.

« La différence entre un TRI brut et un TRI net (concerne les flux entre les fonds d’investissements et les bailleurs de fonds) est entre 3% à 5%. Du coup, ce TRI brut de 13% va représenter entre 8% et 9% de TRI net pour les actionnaires qui ont investis dans les fonds », précise Farid Benlafdil.

A noter que la durée moyenne d’investissement est de 6,3 ans.

Impact de la crise du Covid sur l’écosystème

Slimane Ed-Dafali, enseignant-chercheur, Université Chouaib Doukkali, ENCG El Jadida a présenté, lors de cette conférence, une étude faite sur l’impact de la crise du Covid sur cet écosystème.

« La baisse du chiffre d’affaires des entreprises financées n’est que de 20% comparativement à ce qui a été observé au niveau national, comme démontré par une étude réalisée par Inforisk qui a dévoilé que la baisse du chiffre d’affaires des entreprises au niveau national est de 32% en 2020. Cela montre qu’il y a une résilience au niveau des entreprises financées par le capital investissement », a-t-il indiqué.

Cette baisse du chiffre d’affaires varie d’un secteur à l’autre. « Les secteurs de l’industrie chimique, du négoce ou de l’IT sont les moins impactés par rapport au secteur primaire et au secteur du BTP qui sont les plus impactés, précise-t-il.

Les sociétés investies ont fait appel aux mécanismes de soutien instaurés par l’Etat. En effet, 46 entreprises (sur 108 entreprises participantes à l’étude) fiancées par le capital investissement ont demandé le programme Damane Oxygène, et 38 participations ont bénéficié du programme Damane Relance afin de soutenir leur résilience et leur agilité en période de crise.

17 entreprises ont négocié des lignes de crédit supplémentaires, autre que Damane Oxygène, pour couvrir les charges de fonctionnement. 40 entreprises ont bénéficié de l’indemnité forfaitaire instituée par la CNSS, dont 19 sociétés ont reçu un complément à cette indemnité.

Du côté des sociétés de gestion, 22% d’entre elles ont négocié des modifications au niveau de la politique d’investissement avec les bailleurs de fonds. Et seulement 6% ont connu un report de l’injection des fonds. « Cela montre la confiance dont bénéficie le secteur et les entreprises investies », commente Slimane Ed-Dafali.

En 2020, il y a eu 11 investissements, planifiés qui ont été reportés ou annulés. En face, 19 désinvestissements prévus initialement n’ont pas eu lieu.

Du côté de la gouvernance, 33% des sociétés de gestions ont mis en place un Comité spécial pour suivre l’impact de la Covid-19 sur les participations. Et afin d’être bien accompagnées et faire un suivi pointu de l’activité durant la crise, 56% des entreprises investies ont augmenté le nombre de réunions des comités stratégiques et 28% d’entre elles ont augmenté le nombre de Conseils d’Administration.

Sur le même volet, 56% des sociétés de gestion ont mis en place des actions et mesures spécifiques se rapportant à la gouvernance et au suivi de leurs participations depuis le début de la pandémie (cellule de surveillance, négociation de nouveaux délais clients, recouvrement des créances, reports d’échéances bancaires, reporting mensuel, suivi des effectifs, suivi de la trésorerie et autres).

« Ces mesures confirment les résultats significatifs obtenus au niveau de la variation du chiffre d’affaires mais également la résilience observées chez les entreprises investies », affirme-t-il.

Perspectives de l’écosystème du capital investissement

L’étude sur l’impact du Covid sur cet écosystème a révélé que 83% des sociétés de gestion estiment que leurs participations retrouveraient leur niveau d’activité pré-crise au cours de l’année 2021. Par contre, 11% estiment qu’ils n’ont aucune visibilité.

Du côté de l’impact sur la stratégie d’investissement pour les années 2021 et 2022, 12% des sociétés de gestion ont indiqué qu’il y aurait une diminution des investissements dédiés aux PME exportatrices contre 53% qui comptent augmenter les investissements dédiés à cette catégorie d’entreprises. 24% des sociétés de gestion comptent se concentrer sur les investissements en faveur des PME locales. Et 78% vont maintenir leurs orientations d’investissements qui étaient préétablies.

S’agissant des prévisions d’investissement pour les prochaines années, l’AMIC prévoit un montant de 1.350 millions de DH en 2021, 905 millions de DH en 2022 et 630 millions de DH en 2023.


Chiffres clés
 

Source: AMIC.

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