Marché financier : Voici pourquoi les levées de capitaux ont baissé en 2020

M. Ett. | Le 27/1/2021 à 16:13

Dégradation de l’activité des entreprises, manque de visibilité des investisseurs, lancement des produits Oxygène et Relance et baisse des taux,… voici les explications de la baisse des levées de capitaux sur le marché financier en 2020, d’après le vice-président d’une banque d’affaires de la place. 

La crise du Covid-19 a beaucoup pesé sur les levées de fonds sur le marché des capitaux en 2020. Cela s’est traduit par une baisse de 62% des émissions de titres de capital qui sont passées de 10 milliards de DH en 2019 à 3,81 milliards de DH en 2020, et un recul de 28,5% des émissions de titres de créances négociables qui sont descendues à 44,6 milliards de DH, d’après les statistiques de l’AMMC.

Ces baisses des levées de capitaux interviennent dans une année où une grande partie des sociétés, financières et non financières, avaient pourtant besoin de fonds pour faire face aux conséquences de la crise et assurer la survie de leurs activités. La question qui se pose est de savoir pourquoi ces levées ont reculé en une année de crise ?

Interpellé par LeBoursier, le vice-président d’une banque d’affaires de la place explique cela par les effets mêmes de la crise. La baisse des augmentations de capital en 2020 est causée, selon lui, par 3 facteurs : la baisse des taux des crédits bancaires, le lancement des produits Oxygène et Relance garantis par l’Etat et le manque de visibilité des investisseurs.

Et d’expliquer : « les entreprises ont préféré opter pour la dette auprès des banques, vu que les taux étaient en baisse et les crédits étaient garantis par l’Etat à travers les produits Oxygène et Relance. Elles ont donc préféré s’endetter auprès des banques au lieu de devoir mobiliser les investisseurs ».

A rappeler que les crédits garantis par la CCG ont bénéficié à 65.000 entreprises qui ont présenté 86.000 dossiers de financement en 2020. Cela a porté sur 56 milliards de DH de crédits garantis.

De plus, à cause des difficultés et des perturbations générées par la crise du Covid-19 en 2020, les perspectives d’évolution des sociétés étaient difficiles à tracer. « Il est devenu difficile de formuler des projections de développement, personne ne sait ce qui va se passer ou comment l’économie devrait évoluer. C’était donc compliqué de convaincre les investisseurs ». 

« Les sociétés avaient et continuent d’avoir un problème de recouvrement. En période de crise, elles devaient gérer le court-terme. Elles n’avaient pas de visibilité sur le moyen-terme. Elles n’arrivaient pas à avoir de nouvelles perspectives. Elles apprennent à vivre avec le Covid, c’est-à-dire, vivre au jour le jour et voir si les clients vont payer. Elles continuent de souffrir de l'allongement des délais de paiement. Et quand une société a des agrégats financiers dépréciés et qui continuent de se dégrader, il devient plus compliqué de demander au marché de financer une augmentation de capital », explique notre interlocuteur.

C’est pour dire tout simplement que « les conditions ne sont pas réunies pour attirer les investisseurs », souligne-t-il.

Quid de l'année 2021 ?

Après une année de baisse, les levées de capital devraient-elles augmenter en 2021 ? Difficile d’y répondre. Notre interlocuteur trouve que « cela dépendra de plusieurs facteurs, notamment les perspectives d’évolution des entreprises qui veulent réaliser des levées de fonds. Forcément, les investisseurs voudraient retrouver de la rentabilité en 2021. Les choix de placements restent limités. En ce moment, même la rentabilité des OPCVM est en légère baisse. Ils veulent de la rentabilité, mais, à quel prix ? Il faut que l’entreprise soit vraiment intéressante pour eux pour qu’ils puissent y miser de l’argent. D’ailleurs, quand on fait une augmentation de capital par conversion de dividende, cela montre que la situation de la société est délicate, puisqu’elle a du mal à mobiliser du cash. On a vu ce genre de situation en 2020 ».

« Mais, il ne faut pas oublier,que la baisse des augmentations de capital a commencé bien avant la crise du Covid. Même pour les introductions en bourse, une grande partie se faisait à travers des cessions et non pas des augmentations de capital », souligne-t-il. 

Pour changer cette situation et favoriser les augmentations de capital, « il faut d’abord qu’il y ait de la croissance à financer, et que les sociétés soient plus solides. Il faudrait peut-être aussi de nouvelles introductions sur le marché boursier. Bref, il faudrait que tout le circuit économique fonctionne. Celui-ci est cassé en ce moment », pense-t-il.

Qu’en est-il de la baisse des émissions des certificats de dépôts ?

S’agissant de la baisse des Certificats de dépôt émis par les banques, principale composante du marché des titres de créance négociables, « elle s’explique tout simplement par le fait qu’il n’y a pas de croissance à financer. Il s’agit d’une dette qui permet de financer le court-terme. Ce n’est pas une dette pour financer l’investissement. La dette bancaire n’a pas énormément augmenté, parce qu’elle n’accompagne pas une croissance. Les banques étaient soutenues par l’Etat en 2020 pour qu’elles puissent prêter et laisser couleur le robinet. A part les crédits Oxygène et Relance, il n’y a pas eu une vraie demande de crédits classiques. Le crédit bancaire est là maintenant juste pour colmater les brèches au niveau des entreprises. On va voir le flux des impayés devenir de plus en plus important, mettant de la pression sur les banques», conclut notre source.

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