Comment le Maroc a subi et géré la crise, selon les institutions internationales

ROUND UP. La crise du Covid a lourdement impacté l’économie marocaine en 2020 avec un des taux de récession les plus forts de la région. Mais celle-ci devrait vite se rétablir avec une croissance de plus de 4% en 2021, un des taux de rebond les plus élevés de la zone. Le Maroc constitue un cas particulier, selon la Banque mondiale et le FMI.

Comment le Maroc a subi et géré la crise, selon les institutions internationales

Le 17 janvier 2021 à 18h52

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

ROUND UP. La crise du Covid a lourdement impacté l’économie marocaine en 2020 avec un des taux de récession les plus forts de la région. Mais celle-ci devrait vite se rétablir avec une croissance de plus de 4% en 2021, un des taux de rebond les plus élevés de la zone. Le Maroc constitue un cas particulier, selon la Banque mondiale et le FMI.

Toutes les économies du monde ont été frappées lourdement par la crise du Covid en 2020. A part la Chine, qui a réalisé un taux de croissance positif de 1%, toutes les économies mondiales sont entrées en récession. Dans les économies avancées, la contraction a dépassé les 10%, une récession historique que des pays européens n’ont pas connue même en pleine seconde guerre mondiale.

Dans la région Mena, les dégâts ont été moins lourds. En moyenne, selon les données de la Banque mondiale, la zone a connu une récession de 5%, avec des différences entre pays. Dans ce lot, le Maroc se distingue par deux choses, comme le notent les différents rapports économiques sur la situation du Maroc produits ces derniers jours par la Banque mondiale ou le FMI.

Un choc d'une grande ampleur...

La première est l’ampleur du choc qui a été plus sévère au Maroc que dans les autres économies voisines. Le FMI évalue la contraction de l’économie du royaume à 7,2% quand la Banque mondiale avance un chiffre de 6,3%. Des chiffres proches de celui livré cette semaine par le HCP qui a révisé sa prévision à 7%. Soit le taux de récession le plus élevé de la région Mena.

Et il ne s’agit ici que de récession nette, qui ne rend pas compte des pertes réelles de l’économie. Car comme le signale la Banque mondiale, le Maroc a en réalité perdu plus de 10 points de croissance en 2020, la prévision de croissance initiale avant Covid étant de plus de 3%.

Ce choc de grande ampleur subi par le Maroc en 2020, les économistes de la Banque mondiale l’expliquent par le long confinement et l’ampleur des restrictions décidées au Maroc pour limiter la propagation du Coronavirus. Un des confinements les plus durs dans la région, d’où cette particularité marocaine par rapport à des pays comme l'Algérie, la Tunisie ou l’Egypte. 

Les économistes de la Banque mondiale disent même que le confinement marocain a été plus rude et plus contraignant que celui décrété dans des pays européens, comme l’Espagne ou l’Italie, qui ont pourtant été ravagés par la pandémie, que ce soit en nombre de cas qu’en nombre de décès. Une analyse qui rejoint celle du FMI. 

Cette réponse marocaine, que l’on peut juger avec du recul, comme démesurée, a produit sur le deuxième trimestre de 2020 une récession de plus de 15% selon les calculs de la Banque mondiale et du HCP, soit le taux de récession le plus fort jamais enregistré dans l’histoire du Maroc. Avec des pertes d’emplois allant de 530 000 (HCP) à 580 000 postes (Banque mondiale).

... Et des réponses appropriées

Mais les différents rapports analysant l’impact du Covid sur l’économie marocaine ne s’arrêtent pas à ce constat. Ils évoquent également une autre particularité marocaine. Si la réponse en termes de restrictions à la mobilité et au travail ont été sévères sur la destruction de valeur et d’emplois, la réponse économique déployée par le pays a été en revanche une des plus efficaces dans la région.

Le HCP, le FMI comme la Banque mondiale notent ainsi le grand effort budgétaire fourni par l’Etat pour contrer les effets de la crise. Une politique contracyclique qui a mobilisé 11% du PIB du pays, un effort budgétaire remarquable qui dépasse de loin celui fourni dans les pays de la région Mena et dépasse même l’effort fourni dans certains pays européens et d’Amérique latine.

Une politique contracyclique qui a apporté des réponses à la fois au choc de la demande qu’à celui de l’offre, par le biais des aides octroyées aux ménages, des reports d’échéances bancaires, l’instauration du chômage partiel, mais aussi de la batterie de mesures financières déployées pour aider les entreprises à se maintenir à flot et sauvegarder le maximum d’emplois. Le tout en maintenant un niveau de dépense publique convenable, cassant avec le réflexe classique de l’austérité dont le monde a vu les limites pendant la crise de 2008.

Cette politique est ainsi saluée par l’ensemble des organismes mondiaux, qui notent que malgré la baisse des recettes fiscales (15 milliards de moins) et cet énorme effort budgétaire, le Maroc a réalisé la prouesse de limiter son déficit budgétaire à 7,5%, soit le taux de déficit le plus faible de la région. Un déficit qui devra descendre dès 2021 à 6,4% (HCP).

Ce déficit s’est accompagné en toute logique de l’explosion de la dette, qui a atteint 77% du PIB selon la Banque mondiale, mais qui reste à un niveau soutenable.

Les économistes de la Banque mondiale et du FMI, très à cheval en temps normal sur le respect de l’orthodoxe financière, estiment même que malgré cette montée de l’endettement, le Maroc a pu garder sa crédibilité auprès des investisseurs internationaux. Et ce en dépit la dégradation de sa note par Fitch Ratings qui n’a pas eu, selon les économistes de la Banque mondiale, un grand effet sur la signature du Maroc.

Preuve, expliquent-ils, par la dernière sortie du Maroc sur les marchés internationaux où il a pu réaliser une levée record de 3 milliards de dollars à des taux très intéressants. Ce qui représente pour eux un signe de confiance des marchés vis-à-vis du Maroc. Une confiance que les deux institutions de Bretton Woods affichent clairement dans leurs rapports puisqu’ils prévoient un retour à une tendance baissière de l’endettement du Maroc dès 2023…

Un fort rebond prévu en 2021

Avec en bonus un fort taux de rebond en termes de croissance dès 2021. Le FMI prévoit une croissance de 4,5%, tandis que la Banque mondiale table sur 4%. Des chiffres qui ne diffèrent, comme l’expliquent les économistes de la Banque mondiale, que par l’effet de base produit par l’écart de la prévision de récession en 2020 (6,3% selon la Banque mondiale et 7% selon le FMI). Le HCP, lui, avance la même prévision que celle du FMI, avec un rebond anticipé de 4,6% pour une récession de 7% en 2020.

Ce rebond n’effacera pas complètement les effets de la récession de 2020, qui ne seront absorbés qu’en 2022, mais il sera selon la Banque mondiale l’un des taux de croissance les plus forts de la région en cette année 2021. Et ce, grâce à la réponse des autorités, qui poursuivront leur politique contracyclique pour soutenir l’économie.

La Banque mondiale et le FMI soulignent sur ce registre que la réponse du Maroc ne s’est pas contentée de gérer les effets de la crise sur le court terme, mais a été beaucoup plus ambitieuse, avec le lancement d’un fonds de 45 milliards de dirhams pour la recapitalisation des entreprises, mais aussi par l’enclenchement de réformes structurelles comme l’élargissement de la couverture sociale à tous les Marocains ainsi que la réforme en profondeur du portefeuille des entreprises publiques. Deux chantiers qui mettront le pays sur le chemin du progrès social, comme le note justement la Banque mondiale.

La vigilance reste de mise

Saluant la gestion économique de la crise, ainsi que la maîtrise sur le moyen terme des équilibres budgétaires et monétaires, ces différentes institutions alertent toutefois sur le degré d’incertitudes qui continue d’être élevé. 

Preuve par les récentes évolutions de la pandémie à l’échelle mondiale, avec l’apparition de nouveaux variants du virus et le reconfinement de pays entiers… 

Si le Maroc a pu négocier le virage de 2020 avec plus ou moins d’habileté, limitant au maximum les dégâts et profitant de ce moment de crise pour enclencher des transformations sociales importantes, la vigilance reste ainsi de mise. Car les prévisions de croissance présentées aujourd’hui peuvent varier du jour au lendemain au gré de l’évolution de la situation. Une situation qui appelle à « la modestie » en termes de prospective, comme le soulignent les économistes de la Banque mondiale.

Cette accélération subite de la pandémie, avec ces nouvelles variantes, risque ainsi selon le FMI de maintenir la pression sur la demande extérieure adressée au Maroc, mais aussi sur la demande intérieure, en cas de reconduction sur l'année 2021 des mesures de restrictions sanitaires. Ce qui empêchera une relance rapide de l'économie et fragilisera davantage le tissu social, avec toutes les vulnérabilités mises à nu par la crise en 2020. 

D'où les recommandations de la Banque mondiale, qui tout en saluant les efforts fournis par le Maroc, insiste sur le lancement de nouvelles réformes pour mettre l'économie du pays à l'abri de nouveaux chocs. Et ce, en réformant en profondeur l'Etat, en gérant la problématique du secteur et des emplois informels, en ouvrant le monde du business à plus de concurrence et en investissant davantage dans les secteurs sociaux pour améliorer la qualité du capital humain. Ce dernier étant devenu un des déterminants incontournables pour la croissance et le développement.

>> Lire aussi :

Satisfecit du FMI au ministère des Finances et à Bank Al-Maghrib (Consultation art.IV) 

Roberto Cardarelli (FMI) : "Le Maroc a réagi à la crise de façon appropriée"

Banque mondiale : Le Maroc plus impacté par la crise que les pays de la région Mena

HCP : Récession économique de 7% et 530.000 emplois perdus en 2020

FMI: Les risques encourus par l'économie marocaine et les pistes de riposte

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