Bourita: “La normalisation appartient au lexique du Moyen-Orient”

Proclamation de Trump, les relations avec Israël, la main tendue à l’Algérie… De passage chez nos confères de Med Radio, Nasser Bourita est revenu sur les récents développements que connait le dossier du Sahara. Verbatim.

Bourita: “La normalisation appartient au lexique du Moyen-Orient”

Le 15 décembre 2020 à 13h30

Modifié 10 avril 2021 à 23h09

Proclamation de Trump, les relations avec Israël, la main tendue à l’Algérie… De passage chez nos confères de Med Radio, Nasser Bourita est revenu sur les récents développements que connait le dossier du Sahara. Verbatim.

Dans une interview accordée à Med Radio, Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, explique les contours de la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur l’ensemble du Sahara, ainsi que la reprise des contacts officiels avec Israël.

Un travail de longue haleine

Trump qui signe une proclamation sur un coup de tête ? Non, "c’est le résultat d’un long processus piloté par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, et qui a démarré autour de mai 2018", rappelle M. Bourita. Le ministre situe le début des discussions au niveau d’une rencontre entre le Roi et le conseiller du président américain, Jared Kushner. S’en est suivi des échanges de délégations diplomatiques, de lettres et de discussions orales entre les deux chefs d’Etat, etc.  

Bourita insiste sur "l’implication personnelle" du Roi. Exit le tapage. Le Souverain voulait que l’action opère dans "la sérénité en attendant que les choses prennent forme".

Ce n’est pas un simple tweet, c’est une décision assortie d’effets juridiques

Bourita rappelle le poids "historique" de l’évènement. "Ce n’est pas une décision quelconque". Et son auteur "n’est pas un pays quelconque". Cela aurait pu s’arrêter à "un tweet", mais "le Roi a insisté pour que la décision soit assortie d’effets juridiques".

D’un tweet à une proclamation présidentielle, le ministre affirme que ce n’était pas acquis d’avance et que ce glissement a lui-même "pris du temps". On est passé d’une déclaration qui aurait pu être assimilée "à une simple opinion", à une décision où le président statue "conformément aux prérogatives que lui octroie la Constitution et les lois américaines."

Une volte-face de l’administration Biden ?

"Les relations maroco-américaines ne sont pas tributaires des administrations, elles ont un socle solide. Le Maroc est allié non-membre de l’OTAN depuis 2004. Le Maroc est le seul pays d’Afrique à avoir un traité de libre-échange avec les Etats-Unis. Le plus grand exercice militaire américain en dehors des frontières [américaines] se déroule au Maroc. Le Maroc est un partenaire essentiel dans la lutte contre le terrorisme, etc."

La décision de Trump est loin d’être anodine, mais n’est pas non plus "en rupture" avec la position des administrations précédentes. "Depuis l’administration Clinton, les Etats-Unis évoquent l’autonomie comme solution réaliste et crédible. Mais quand on parle d’autonomie, le postulat est de reconnaitre qu’elle doit intervenir dans le cadre d’une souveraineté. Le président [Trump] est allé jusqu’au bout de cette logique".

La marocanité du Sahara comme point de départ, l’autonomie comme point de chute

Le Sahara n’est pas un dossier à "gérer", il doit obéir à une vision et un plan, estime l’intervenant, citant les directives du Roi. "Les éléments essentiels de ce plan sont, d’abord, le modèle de développement pour créer un lien solide entre les provinces des Sud et le Nord du Maroc. Le deuxième élément repose sur la confirmation de la marocanité du Sahara. Nous ne nous réjouissons plus trop si un Etat retire sa reconnaissance [du Polisario], car il l’a retire du néant (…). Aujourd’hui, ce qui compte, c’est de reconnaitre la marocanité du Sahara."

"Le Maroc ne se contente plus de paroles diplomatiques, du type "je suis pour une solution juste, etc.", déclare le ministre, signalant "un grand changement" de paradigme. "Nous ne voulons plus que le dossier soit régi par la logique du feuilleton, le Maroc demande aujourd’hui un point de chute. Celui qui dit soutenir le processus voudrait que ce sujet dure. Celui qui donne le résultat du processus aidera à trouver une solution rapide. Et c’est ce qu’a fait l’administration américaine. Le président américain dit que le point de départ est la souveraineté marocaine, et que le point d’arrivée est l’autonomie".

"Normalisation" n’est pas un mot marocain

Parler de normalisation est "un raccourci. L’action diplomatique est une question de package, mais l’essentiel est de préserver les valeurs et constantes". Dans le dossier palestinien, les constantes du Royaume demeurent "la solution à deux Etats, les négociations israélo-palestiniennes, l’identité arabo-musulmane de Jérusalem".

"Le Maroc est logique. Quand on défend une solution à deux Etats, on reconnait deux Etats. Qui dit défendre la même solution mais ne reconnait qu’un seul Etat, doit expliquer pourquoi".

"Le Maroc n’a fait que reprendre des outils sur lesquels l’autorité palestinienne elle-même était d’accord dans les années 1990".

"La normalisation appartient au lexique du Moyen-Orient. Quand on salue un Israélien, c’est considéré comme normalisation dans certaines régions. Au Maroc, cet Israélien peut être un voisin ou un ami. Il existe des spécificités marocaines qu’il ne faut pas dissoudre dans un contexte moyen-oriental."

"Le Maroc a une spécificité dans sa Constitution votée par les Marocains, et qui reconnait la composante hébraïque comme composante de l’identité marocaine."

"Il existe un lien enraciné entre sa Majesté le Roi et la communauté marocaine en Israël."

"Il n’y a pas de différence entre un Marocain d’Israël et un Marocain de Suède".

Ces spécificités sont utilisées par le Royaume au "service de la paix, au service de la cause palestinienne". "On ne peut pas parvenir à la paix sans canaux de communication. Pour le Maroc, ces canaux sont naturels."

L’Algérie, la "main tendue" 

"Le Maroc veut construire un Maghreb arabe. Les défis d’aujourd’hui imposent une logique différente dans nos rapports avec l’Algérie. Des défis sécuritaires, économiques… Aujourd’hui, nous avons besoin de changer de logiciel et de penser à aller de l’avant."

"Je réitère ce que sa Majesté a affirmé dans le discours de la Marche verte de 2019. Quelle que soit l’initiative de l’Algérie en vue d’entamer le dialogue, le Maroc a toujours été ouvert mais conformément à des constantes et une logique, à savoir que le Royaume ne renoncera pas à son intégrité territoriale et à sa souveraineté."

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