Le procédé de fabrication du vaccin Sinopharm est sûr (experts marocains)

Le taux d'efficacité du vaccin chinois n'a pas encore été dévoilé, mais la technique de fabrication est sûre. L'efficacité et la sécurité d'un vaccin sont deux notions à dissocier. Voici les explications du Dr Kamal Marhoum El Filali.

Le procédé de fabrication du vaccin Sinopharm est sûr (experts marocains)

Le 13 novembre 2020 à 17h32

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

Le taux d'efficacité du vaccin chinois n'a pas encore été dévoilé, mais la technique de fabrication est sûre. L'efficacité et la sécurité d'un vaccin sont deux notions à dissocier. Voici les explications du Dr Kamal Marhoum El Filali.

Si l'objectif recherché par la vaccination est commun, les modes de fabrication, le niveau d’efficacité et les risques varient. 

Il est donc important de souligner que l'efficacité et la sécurité d'un vaccin sont deux notions à dissocier. Un vaccin peut être très efficace tout en ayant des effets secondaires importants, comme il peut être moyennement efficace mais plus sûr quant aux risques encourus. 

En effet, un degré d'efficacité élevé ne réduit pas forcément les risques, surtout lorsque sa fabrication repose sur une technologie nouvelle. 

C’est pourquoi Dr Kamal Marhoum El Filali, chef de service des maladies infectieuses au CHU Ibn Rochd qui supervise les essais cliniques du vaccin du chinois Sinompharm à Casablanca, estime qu’il va falloir “surveiller de très près les technologies innovantes” utilisées dans la fabrication des vaccins anti-Covid. 

Dans la course au vaccin, une dizaine d'essais cliniques sont actuellement en phase 3 (dernière phase). Le vaccin développé par le laboratoire américain Pfizer et la société de biotechnologie allemande Biontech a été déclaré efficace à 90%, alors que le vaccin russe "Sputnik V" l’est de 92%, selon le Fonds russe d'investissements directs. 

Le taux d'efficacité du vaccin chinois développé par Sinopharm n'a pas encore été dévoilé. Il s'agit de l'un des vaccins que le Maroc prévoit d'utiliser dès mi-décembre dans le cadre d'une vaste campagne de vaccination. Ce qui est sûr, c'est qu'aucun vaccin ne sera autorisé dans le monde sans une efficacité minimale de 50%

Pour Dr Marhoum El Filali, un taux d'efficacité de 60 ou 70% est un bon résultat. Mais il ne suffit pas qu'un vaccin soit efficace, encore faut-il qu'il soit sûr. Cette notion de sécurité n'est pas tributaire de l'efficacité, elle dépend d'autres paramètres dont le mode de fabrication. 

Tuer, atténuer le virus ou le transporter : des méthodes de fabrication classiques

Les vaccins chinois sont fabriqués de manière "classique", déjà utilisée et donc plus sûre. 

"Le virus lui-même est utilisé comme élément principal pour fabriquer les anticorps et entraîner une immunité protectrice. Le virus passe par plusieurs méthodes chimiques pour être tué, il est donc inactif", nous explique Dr Kamal Marhoum El Filali. 

"Autrement dit, on compte juste sur le matériel antigénique pour faire élaborer, par l'organisme de l'individu vacciné, des anticorps protecteurs", poursuit-il. 

Selon Dr My Said Afif, président de la Société Marocaine des Sciences Médicales et membre du comité technique et scientifique de la vaccination Covid, "le procédé du vaccin Sinopharm est un procédé sûr car il utilise le virus inactivé, le même que celui pour les vaccins des enfants. Ce procédé permet une conservation entre 2 et 8 degrés, ce qui facilite la logistique en termes de chaîne de froid. Le Maroc a l'habitude de gérer ce genre de vaccins donc il n'y aura pas de contrainte à ce niveau".

D'autres vaccins en cours d'élaboration utilisent également le virus lui-même. Ici, il y a une nuance à souligner car le virus utilisé dans la fabrication du vaccin n'est pas tué mais "atténué". En d'autres termes, "il a été transformé de façon à ne pas entraîner la maladie", explique Dr Marhoum El Filali.

Autre technique déjà connue et exploitée dans le cadre d'autres vaccinations: l'utilisation de transporteurs. 

"Depuis qu'il a été identifié en Chine, le SARS CoV-2 a subi des mutations mais elles n'ont pas touché toutes les zones du virus. Une zone en particulier est restée la même chez tous les coronavirus, même ceux qui ont muté plusieurs fois", indique Dr Marhoum El Flali. 

Cette zone est utilisée dans la fabrication du vaccin anti-Covid. "Elle sera collée sur un adénovirus (complètement différent du coronavirus). Il va la transporter vers le système immunitaire de la personne vaccinée qui va élaborer des anticorps contre le coronavirus", explique-t-il.

"Même si ces approches de fabrication ont largement été utilisées, le vaccin anti-Covid est un vaccin nouveau, il faudra donc effectuer un suivi des personnes vaccinées pour s’assurer de l’innocuité du vaccin”, poursuit la même source. 

Un suivi qui devrait être “plus accentué” à l’égard des vaccins dont la fabrication repose sur une technologie nouvelle.

Le vaccin à ADN nécessite une attention particulière

Plus controversée et surtout nouvelle et donc aux risques inconnus, la méthode adoptée par Moderna et Pfizer consiste à utiliser les acides nucléiques (ADN et ARN) qui proviennent du virus

Si Pfizer a déclaré que l'efficacité de son vaccin est de 90%, le fait que sa fabrication repose sur une technique nouvelle soulève des questions sur les risques encourus sur le long terme. Cela ne remet pas en question la sécurité du vaccin qui est testée depuis le lancement des essais cliniques. Cela dit, elle nécessite une attention particulière, compte tenu de son aspect innovant et donc inconnu.  

Par ailleurs, l'utilisation de l'ADN du virus dans la fabrication du vaccin interpelle les plus sceptiques. 

“C’est une technologie nouvelle mais sur le plan théorique elle ne devrait pas poser de problème”, déclare Dr Marhoum El Filali. 

“Tout de suite, les gens s'inquiètent et pensent que cela va entraîner des problèmes, mais il ne faut pas voir les choses sous cet angle. Cette technique consiste à prendre l'ADN du virus, qui contient l'information de fabrication d'une protéine virale du coronavirus et de la coller sur un transporteur inactif pour constituer un matériel génétique. Celui-ci va permettre à l'organisme de fabriquer des anticorps contre le coronavirus, dès qu'il l'aura reconnu comme corps étranger". 

Enfin, la dernière façon de fabriquer le vaccin anti-Covid repose sur l'utilisation des protéines du virus qui sont fabriquées de toutes pièces. Il s'agit de "nanoprotéines" qui seront injectées dans l'organisme en vue d'obtenir le même résultat, à savoir la fabrication des anticorps par le système immunitaire.  

La phrase 3 est loin d'être finie !

Peu importe la méthode utilisée dans le cadre de la fabrication du vaccin, le résultat recherché reste donc la fabrication des anticorps.

Or, selon Dr Marhoum El Filali, “tous les anticorps ne sont pas protecteurs”. C’est pourquoi, ce sont les anticorps neutralisants (capables de neutraliser le virus) qui sont dosés. “C’est ainsi que nous pouvons être sûrs de l’efficacité”, indique-t-il.

Cette opération fait partie de la phase 3, durant laquelle deux groupes de volontaires ont été créés. Les membres du premier groupe vont recevoir un placebo et ne seront donc pas protégés. Les autres recevront le vaccin objet des essais cliniques et ce, sans savoir qui a reçu quoi.

En effet, cette information est ignorée par le volontaire et le médecin investigateur. Par contre, puisque les données sont envoyées vers la Chine en temps réel, “ils sont capables de savoir quelles sont les personnes qui ont reçu le vaccin et celles qui ne l’ont pas reçu. Ainsi, ils avancent au fur et à mesure”. Autrement dit, “si les études sont en cours, les analyses le sont aussi”. 

“Les membres de ces groupes sont suivis de près et à chaque fois que l’un d’eux a des symptômes évocateurs du Covid-19 (toux, mal de tête etc.), il devra effectuer un test PCR. Nous allons voir combien de personnes ont été infectées par le coronavirus dans chacun de ces groupes pour savoir combien nous avons gagné cliniquement. Lorsqu’on dit qu’il y a eu un gain de 90% cela signifie que le nombre de personnes atteintes du Covid dans le groupe ayant reçu le placebo est 90% plus élevé que celui des personnes contaminées et membres du second groupe”.

Cela signifie que la phase 3 ne prend pas fin tout de suite, sachant qu’au Maroc, les prélèvements sanguins, en vue d’analyser les anticorps, ne seront envoyés vers la Chine dans leur intégralité qu’à la fin du mois courant. Cette étape d’observation et de suivi des volontaires ayant reçu le placebo et le vaccin constitue la suite de la phase 3. 

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