Pandémie et violences faites aux femmes: Bilan et recommandations des ONG

Multipliées par la pandémie, les violences faites aux femmes ont pris de nouvelles formes et créé de nouveaux défis. L'association MRA a publié ses observations et recommandations ce 1er juillet 2020, avec la contribution de 16 ONG.

Pandémie et violences faites aux femmes: Bilan et recommandations des ONG

Le 1 juillet 2020 à 15h52

Modifié 11 avril 2021 à 2h47

Multipliées par la pandémie, les violences faites aux femmes ont pris de nouvelles formes et créé de nouveaux défis. L'association MRA a publié ses observations et recommandations ce 1er juillet 2020, avec la contribution de 16 ONG.

La pandémie du coronavirus a conduit le gouvernement marocain à déclarer l’état d’urgence sanitaire et appliquer le confinement obligatoire dans toutes les régions du Royaume.

Durant cette période, de nouvelles formes de violences faites aux femmes ont vu le jour. Les ONG qui accompagnent les victimes ont dû faire face à de nouveaux défis, notamment en termes de suivi, d’accompagnement mais aussi de coopération avec les autorités publiques.

L’association MRA a publié un rapport ce 1er juillet, dans lequel elle a présenté un bilan de la situation, accompagné de recommandations à appliquer en période de confinement.

Ses observations, basées sur les données recueillies auprès de 16 ONG portent sur l’impact de la pandémie sur la nature des violences faites aux femmes, les ressources et moyens des ONG et sur l'implication des autorités.

Confinées, sans ressources et sous pression

"76,47% des répondants en ligne ont déclaré avoir remarqué des changements qualitatifs dans la nature des violences faites aux femmes, commises pendant la période de l’état d’urgence sanitaire".

Plusieurs facteurs, directement liés à la pandémie, ont engendré de nouvelles formes et/ou participé à l’augmentation des violences faites aux femmes.

Il s’agit entre autres des licenciements dus à la crise économique, de la fermeture des espaces publics, de la réduction du personnel sur les lieux du travail ou encore, et c’est le facteur le plus évident: le confinement obligatoire.

En effet, en étant continuellement confrontées à leurs agresseurs, les femmes victimes de violences ont non seulement aucune alternative de logement mais aussi beaucoup de difficultés à communiquer leur détresse.

Cela s’explique en partie par le fait que les associations ont dû digitaliser leurs services d’accompagnement, ce qui constitue un obstacle pour certaines qui ne disposent pas de smartphones ni même de téléphones, ou qui ne sont pas en mesure d’appeler discrètement à l’aide, alors qu’elles sont confinées dans le même espace que leurs agresseurs.

"91,67 % des répondants en ligne ont déclaré être confrontés à de nouveaux défis pour servir les femmes victimes de violence pendant l’état d’urgence sanitaire", lit-on dans le rapport.

En perdant leurs emplois, les femmes violentées se sont retrouvées sans ressources financières et donc, dépendantes de conjoints violents.

De plus, comme le précise le rapport de l’association, les femmes sont plus amenées à travailler dans le secteur informel. Beaucoup ne peuvent donc pas bénéficier des indemnités octroyées par la CNSS.

Quant aux indemnités versées aux personnes disposant d’une carte RAMED, l’association MRA rappelle qu’elles sont généralement délivrées aux pères de familles.

Ces derniers n’utilisent pas forcément ces ressources à bon escient et la situation de dépendance et d’impuissance de leurs épouses reste inchangée.

Parmi les femmes qui ont réussi à conserver leurs emplois, certaines ont été confrontées à d’autres formes d’agressions. Que ce soit sur leur trajet désert vers le lieu du travail, ou dans les locaux quasi vides, compte tenu de la réduction du personnel durant la période de confinement, certaines femmes ont été victimes de violences et de harcèlement sexuels.

L’association MRA a cité d’autres formes de violences subies par les femmes durant cette période de crise. Il s’agit entre autres des menaces, insultes, chantage, vol etc.

 "Augmentation significative des demandes d'assistance"

"Le nombre de femmes contactant les ONG a augmenté de manière significative. Une organisation a déclaré que les demandes d’assistance liées à la violence avaient augmenté de 30%, une autre estime que leur nombre avait doublé, tandis qu’une troisième a indiqué qu'il avait triplé par rapport à la même période l’année dernière".

Pourtant, le ministère public avait publié un communiqué en date du 30 avril 2020, dans lequel il dévoile que le nombre de plaintes pour violences faites aux femmes entre le 30 mars et le 30 avril avait fortement baissé.

Cela dit, la réduction de plaintes ne traduit pas le nombre réel des agressions subies. Cela s’explique notamment par les restrictions de déplacements imposées aux citoyens durant l’état d’urgence sanitaire.

L’association MRA évoque dans son rapport quelques exemples où des femmes violentées ont dû fuir le logement familial et violer l’état d’urgence sanitaire pour pouvoir solliciter l’intervention des autorités.

"Dans une zone rurale, un homme a expulsé son épouse et ses enfants du domicile conjugal […] Une patrouille de gendarmes les a arrêtés pour violation de l’état d’urgence sanitaire". Le mari a été hébergé par une association pour permettre à la femme et aux enfants de regagner leur logement.  

Réactivité des autorités: entre bonnes pratiques et défaillances

L’association MRA a relevé dans son rapport divers points positifs quant à l’implication des autorités publiques dans la lutte contre les violences faites aux femmes, pendant la période de confinement.

En effet, MRA précise que certains acteurs publics se sont mobilisés en créant des vidéos de sensibilisation ainsi que des groupes "WhatsApp" réunissant procureurs, forces de l’ordre, responsables de la santé et ONG, afin d'être à l'écoute des femmes victimes de violences.

Cela dit, certaines défaillances et lacunes persistent et ont été mises en exergue par l’association qui a également formulé quelques propositions de réformes spécifiques au confinement.

"En l’absence d’un cadre juridique solide établissant les rôles, obligations, pouvoirs et devoirs clairs des acteurs étatiques, la réponse aux violences faites aux femmes pendant l’état d’urgence sanitaire, comme en temps normal, restera insuffisante pour prévenir les violences et protéger les femmes", précise l'association.

Dans ce sens, MRA présente plusieurs propositions, destinées au parquet, tribunaux, forces de l'ordre, services de santé et autorités administratives. Parmi lesquelles :

-la simplification les procédures de signalement ;

-l'interdiction aux forces de l'ordre de suggérer la réconciliation dans les cas de violence domestique ;

-l'émission systématique des ordonnances de protection dès réception d’une plainte relative à la violence faites aux femmes ;

-retirer immédiatement l’agresseur violent du domicile afin que les femmes et les enfants puissent y rester ;

-le maintien des audiences relatives aux affaires familiales pendant l'état d'urgence sanitaire;

-fournir aux femmes séparées de leurs maris une carte RAMED même en l’absence d’un jugement de divorce;

-préciser que les déplacements vers des audiences, postes de police et autres services liés à une agression, constituent des raisons urgentes justifiant le déplacement exceptionnel; 

-assurer les services de santé 7j/7 et à toute heure, pour les femmes victimes de violences, afin qu'elles puissent recevoir un traitement et obtenir les certificats médicaux nécessaires pour porter plainte en cas de besoin.

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