L’inflation est trop faible, faut-il oser une baisse du taux directeur ?
La variation des prix est inférieure à 1% cette année, reflétant une croissance atone. Un niveau anormalement bas pour un pays comme le Maroc. Il n’est pas sans conséquences sur les agents économiques. Faut-il injecter des liquidités pour relancer la machine ?
L’inflation est trop faible, faut-il oser une baisse du taux directeur ?
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Souhail Nhaili
Le 22 septembre 2019 à 17h42
Modifié 11 avril 2021 à 2h43La variation des prix est inférieure à 1% cette année, reflétant une croissance atone. Un niveau anormalement bas pour un pays comme le Maroc. Il n’est pas sans conséquences sur les agents économiques. Faut-il injecter des liquidités pour relancer la machine ?
Bank Al-Maghrib tiendra la troisième réunion du conseil de politique monétaire de l’année, ce mardi 24 septembre. Cela fait trois ans et demi que ce conseil n’a pas agi sur le taux d’intérêt directeur, fixé à 2,25% depuis mars 2016. Cette réunion sera-t-elle différente ?
L’une des principales missions de BAM est d’assurer la stabilité des prix en agissant notamment sur son principal instrument de politique monétaire : le coût de l’argent. Stabilité des prix ne signifie pas leur stagnation mais une évolution raisonnable qui tient compte du profil et des fondamentaux économiques du pays.
Sauf qu’au cours de ces dernières années, les prix au Maroc ont évolué plus que raisonnablement. Leur variation est très faible, comme l’indique l’évolution du prix implicite du PIB calculé par le HCP.
En 2019, l’inflation devrait s’établir à 0,8% contre 1,1% en 2018. A fin août 2019, l’indice des prix à la consommation a quasiment fait du surplace (0,2%) par rapport à la même période en 2018.
Une inflation anormalement basse, selon le HCP
En 2020, l’inflation devrait rester limitée à 1%. C’est en dessous de 2%, niveau que les pays développés prennent comme objectif de stabilité des prix. Pour les pays en voie de développement, l’objectif d’inflation doit être bien supérieur.
Ahmed Lahlimi, Haut-commissaire au plan, ne rate aucune occasion pour dénoncer cette situation qu’il trouve anormale.
Lors de la présentation du budget économique exploratoire 2020 en juillet dernier, il avait déclaré : "J’ai fait un benchmark et il n’y a pas un seul pays comparable qui réalise une inflation inférieure à 2%. Ils sont tous à 7 ou 8%. C’est un scandale".
Lahlimi appelle tout le temps à ouvrir le robinet du crédit et à lâcher l’inflation pour relancer la croissance.
Car une inflation basse est synonyme de croissance atone. Et les chiffres le prouvent : en 2019, la croissance du PIB devrait se limiter à 2,7%, reflétant certes un effet de base négatif pour le secteur agricole, mais surtout une croissance non agricole toujours faible. Du côté de la demande, l’investissement est en berne et la consommation des ménages en ralentissement.
Un impact négatif sur les ménages, les entreprises et l'Etat
Ce qu’il faut savoir c’est qu’une inflation faible a des conséquences négatives sur tous les agents économiques. Les économistes sont unanimes à l’affirmer.
Pour l’Etat, des prix qui stagnent sont synonymes de faible évolution des recettes fiscales, notamment celles de la TVA. En parallèle, si efforts de rationalisation des dépenses il y a, ils sont annihilés car une économie de 1.000 quand l’inflation est de 3%, n’a pas la même valeur que quand cette dernière est de 0,5%.
Pour les entreprises, une inflation faible ralentit l’évolution du chiffre d’affaires et rend les patrons peu motivés à investir et à embaucher. Celles qui sont endettées sont encore plus pénalisées, surtout quand le taux d’inflation est inférieur à celui des taux d’intérêts.
Pour les ménages, des prix stables peuvent être bénéfiques en termes de pouvoir d’achat, mais seulement à court terme.
Car cette situation induit à moyen terme de faibles augmentations de salaires et une hausse du chômage (du fait de la croissance atone). Et comme pour les entreprises, une inflation basse est pénalisante pour les ménages endettés.
Selon Lahlimi, le Maroc a besoin de plus d’inflation pour relancer la machine économique. Cela permettrait même à l’Etat de rembourser plus rapidement sa dette intérieure qui représente l’essentiel de l’endettement global.
Une baisse de quelle ampleur ?
Il précise que c’est d’une "bonne inflation" dont le Maroc a besoin, autrement dit d’une création monétaire à orienter vers les investissements productifs, créateurs de valeur (exportations, substitution des importations par la production locale…) et d’emplois (amélioration des revenus des ménages) et contribuant au développement humain (éducation, santé…).
Pour lui, au lieu de lâcher l’inflation, Bank Al-Maghrib maintient inchangé le taux directeur et le gouvernement marocain privatise des entreprises pour réduire son déficit budgétaire.
Cela dit, BAM a baissé son taux directeur 2 fois consécutivement en 2014 (de 3% à 2,5%) et une fois en 2016. L’effet sur la croissance et l’inflation a pour le moins été très faible, voire inexistant.
Si elle décide de passer à l’acte ce mois de septembre, doit-on s’attendre à la même absence d’effet ?
Pour beaucoup d’observateurs, pour qu’elle soit efficace, une baisse du taux directeur doit être conséquente, transmise par les banques aux agents économiques (ce qui n’est pas systématique) et accompagnée de mesures concrètes d’amélioration du climat des affaires pour les entreprises locales pour leur donner un véritable signal positif de relance (régler le problème des délais de paiement, des autorisations administratives…).
>>Lire aussi: Les annonces de Abdellatif Jouahri après le conseil de BAM
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