Médias24:  Helios Investment Partners est présent au Maroc à travers sa participation dans Vivo Energy. Le fonds ne compte-t-il pas renforcer sa présence dans le royaume? Si oui, à quel horizon et dans quels secteurs en particulier?

Zineb Abbad El Andaloussi: Helios Investment Partners est la plus grande société de capital investissement spécialisée sur l’Afrique depuis 13 ans. Elle est pionnière en ce sens et a été créée en 2004 par les financiers africains réputés Tope Lawani et Babatunde Soyoye.

Nous avons plus de 3 milliards de dollars d’actifs sous gestion; nous avons accompagné jusqu’à présent plus de 20 entreprises dans leur développement et intervenons dans plus de 40 pays en Afrique.

Le Maroc fait bien sûr partie de nos pays cibles en termes d’investissements du fait de son dynamisme, sa forte croissance économique et sa bonne gouvernance. Nous étudions, comme dans les autres pays dans lesquels nous intervenons, toute opportunité d’investissement qui serait intéressante et en ligne avec notre stratégie.

A titre personnel, je garde un fort attachement envers le Maroc, où je suis née et où j’ai fait une partie de mes études.

J’ai toujours gardé des liens étroits avec mon pays, personnels comme professionnels, puisque j’ai créé la franchise de Rothschild au Maroc à partir de 2007 en accompagnant un certain nombre de grands corporates européens qui souhaitaient investir au Maroc.

-  Votre société vient d'acquérir 100% du capital de ‘Fertilizers and Inputs Holding B.V, qui gère les opérations africaines d’engrais et d’intrants de Louis Dreyfus Company. Est-ce que cette entreprise est présente au Maroc? Si oui, comment se positionne-t-elle dans le Royaume? Si non, compte-elle s'y installer, surtout que le Maroc est n°1 des engrais grâce à OCP?

-La plateforme africaine d'engrais et d'intrants agricoles de Louis Dreyfus Company (LDC) qu’Hélios vient de racheter est présente en Angola, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Madagascar, Mali et Sénégal, où elle s’est établie comme l’un des principaux distributeurs.

Sa dimension et sa forte présence sur des marchés clés lui permettent de bénéficier de belles opportunités de croissance. L’expansion géographique de ses activités fait partie des priorités stratégiques que nous étudierons aux côtés du management et des parties prenantes de la société.

Ainsi, si des opportunités de croissance dans d’autres pays africains émergent et se confirment, comme au Maroc par exemple, Hélios étudiera la possibilité d’y développer les activités de la plateforme.

- Comment se positionne cette société dans les pays africains où elle opère? Comment y voit-elle le potentiel de développement?

-Les opérations d'engrais et d'intrants de Louis Dreyfus Company présentent des avantages compétitifs importants, qui répondent à nos critères de sélection et servent notre ambition pour répondre aux différents enjeux du continent africain.

Pendant des années, nous avons cherché la meilleure plateforme nous permettant de répondre à ces problématiques; les activités d’engrais de LDC répondent pleinement à nos critères (leader de marché, fort potentiel de croissance, plateforme internationale, réseau de distribution difficile à réinventer, marque reconnue sur les différents marchés).

Grâce au soutien et aux ressources que nous leur apporterons, ces opérations permettront aux Africains de mieux maîtriser leurs cultures et leurs récoltes, tout en optimisant leur rendement agricole.

Comme vous le savez, le secteur agroalimentaire est vital pour le développement de l’Afrique. De plus, près de la moitié de la population travaille aujourd’hui dans le secteur agricole et en est financièrement dépendante.

Investir dans les engrais et les fertilisants, c’est donc permettre aux Africains de mieux maîtriser leurs cultures et leurs récoltes, d’optimiser leur rendement agricole. D’un point de vue sociétal, c’est aussi répondre à un enjeu d’auto-suffisance alimentaire, préalable au développement économique de l’Afrique. Et nous y arriverons grâce à notre grande expérience dans le développement de ce type de plateforme.

Nous avons par exemple participé à la croissance d’Equity Bank au Kenya, que nous avons accompagnée pendant 8 ans. Cette banque, reconnue depuis près de 10 ans comme l’une des plus profitables au monde, a vu sa part de marché passer de 7% à 50% au Kenya.

Nous l’avons également accompagnée dans son expansion géographique puisqu’elle est aujourd’hui présente dans 6 pays africains. C’est ça la contribution et la vision d’Helios Investment Partners: accompagner dans leur développement des entreprises à fort potentiel de croissance, dans des secteurs clés de l’économie africaine pour, in fine, créer des champions panafricains qui participent au rayonnement et au développement de l’Afrique.

- Cette société est-elle en concurrence directe avec OCP dans ces pays africains?

-Nous voyons plutôt OCP comme un partenaire potentiel, puisque la plateforme n’est pas une entreprise de production d’engrais mais de distribution uniquement. La plateforme distribue des engrais, des produits de protection des cultures, des semences, ainsi que des produits chimiques industriels via un réseau de distribution dans l’ensemble des pays qu’elle couvre, principalement en Afrique francophone.

Cette plateforme se concentre sur la formation des paysans, l’étude des sols, la logistique et l’acheminement des produits ainsi que sur la combinaison des intrants pour créer des produits sur-mesure pour avoir des produits agricoles adaptés aux sols et aux cultures et abordables en termes de prix.

- Pourquoi Helios s'est intéressé à présent au secteur agricole et plus précisément les engrais en Afrique? Quelles en sont les perspectives?

-Cette plateforme répond parfaitement aux critères et objectifs d’Helios Investment Partners: donner aux Africains les moyens de maîtriser leur développement en investissant dans des secteurs clés pour l'économie africaine, afin de faire naître des champions panafricains.

Le secteur agroalimentaire est vital pour le développement de l'Afrique. A l’horizon 2050, un quart de la population mondiale sera africaine, l'autosuffisance alimentaire est un enjeu de premier ordre. Il faisait donc, en toute logique, partie de nos priorités.

Helios Investment Partners s’est illustrée par sa capacité à accélérer le développement des entreprises qu’elle accompagne, d’une part en favorisant leur expansion géographique dans divers pays africains, et d’autre part en participant activement à l’optimisation de leur organisation et de leurs processus afin de bénéficier d’économies d’échelle.

La plateforme d’engrais et d’intrants de Louis Dreyfus Company dispose d’ores et déjà de circuits de distribution bien établis. Nous participerons à leur optimisation en travaillant au plus près des agriculteurs et des communautés rurales, mais aussi à leur élargissement à de nouveaux pays africains dans l’optique de faire croître son chiffre d’affaires.

- Un rapprochement n'est-il pas possible entre cette société et OCP?

-L’ambition de Helios, à travers ses différents investissements, est de bâtir les champions panafricains de demain et, à ce titre, la création de valeur, pourrait également passer par des partenariats avec des grands groupes et des opérations de croissance externe.

La question se pose au cas par cas pour chacune de nos sociétés en portefeuille et reste à la discrétion du management de chacune de ces sociétés.  

Dans le cas précis, nous souhaitons travailler sur deux axes prioritaires: d’une part, rapprocher la plateforme d’engrais de ses clients finaux, notamment en proposant des produits mieux adaptés à leurs besoins et plus abordables et d’autre part, mettre à disposition de cette plateforme les ressources nécessaires à son développement y compris géographique.

Zineb Abbad El Andaloussi, une spécialiste en fusions acquisitions

Mme Abbad El Andaloussi a rejoint Helios en 2017 pour prendre en charge le développement des investissements du fonds en Afrique Francophone, forte d’une expérience de 17 ans dans le conseil en fusions acquisitions à la Banque Rothschild en Europe et en Afrique.

Après un début de carrière chez Arthur Andersen en 1997, elle a rejoint en 1999 les équipes de fusions et acquisitions de Rothschild à Paris, intervenant en particulier dans les secteurs des services financiers, des télécommunications et des biens de consommation.

De 2006 à 2013, elle a créée et développée la franchise de Rothschild en fusions et acquisitions au Maroc et en Afrique francophone ou la Banque est devenue leader. Elle a été nommée Gérant en 2011 et elle a pris la responsabilité de la Zone Afrique pour le Groupe en 2013.

Elle a quitté la banque en 2014 pour développer sa propre activité de fusions acquisitions, restant en parallèle Senior Advisor de la Banque Rothschild.

Elle est en outre membre de plusieurs conseils d’administration dont celui de CACEIS (Groupe Crédit Agricole), celui de la Banque Centrale Populaire et celui d’Ipemed (Institut de prospective économique pour le monde méditerranéen).

Elle est ingénieur, diplômée de l’École Centrale Paris. Bilingue français et arabe, elle a la double nationalité française et marocaine.