Les conséquences humaines de la crise dans le Golfe

Le jeune homme, qui étudie l'ingénierie aéronautique, fait partie de ces milliers de citoyens du Golfe affectés par la crise diplomatique qui a embrasé la région il y a une semaine et qui a de plus en plus de conséquences humaines.

Les conséquences humaines de la crise dans le Golfe

Le 12 juin 2017 à 10h59

Modifié le 12 juin 2017 à 10h59

Le jeune homme, qui étudie l'ingénierie aéronautique, fait partie de ces milliers de citoyens du Golfe affectés par la crise diplomatique qui a embrasé la région il y a une semaine et qui a de plus en plus de conséquences humaines.

"Les gens n'ont rien à voir avec ça, c'est irrationnel", affirme-t-il à l'AFP. "Chez moi, c'est là où mon cœur est, et je pense que c'est le Qatar. C'est ma maison".

Rashed dit avoir visité le royaume de Bahreïn seulement quatre fois dans sa vie. Son père, bahreïni, et sa mère, qatarie, se sont séparés quand il avait six ans. Il vit depuis qu'il est bébé avec sa mère et deux sœurs à Doha, et n'a plus de relation avec son père.

L'étudiant doit maintenant décider s'il retourne dans un pays qu'il connaît à peine ou s'il reste au Qatar avec le risque de perdre la nationalité bahreïnie et de devenir "apatride".

Selon l'ONU, la loi au Qatar ne permet en aucun cas à une mère de donner sa nationalité à ses enfants, "même si cela aboutit à une situation d'apatride".

Le 5 juin, plusieurs pays arabes ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar en l'accusant de "soutenir le terrorisme".

Mais trois d'entre eux - Arabie saoudite, Emirats arabes unis et Bahreïn - sont allés plus loin en fermant leurs frontières et en ordonnant aux Qataris de quitter leurs pays dans un délai de 14 jours et à leurs citoyens de quitter le Qatar dans le même délai.

Vendredi, Amnesty International a averti qu'en appliquant de telles mesures drastiques, Ryad et ses alliés "jouaient" avec la vie de milliers d'habitants du Golfe, séparant des familles et détruisant les moyens de subsistance et d'éducation d'une partie de la population.

Le secrétaire d'Etat américain, Rex Tillerson, s'est également inquiété des "conséquences humanitaires", demandant aux adversaires du Qatar d'alléger le blocus.

"Embargo injuste"

Une femme qatarie a rapporté qu'elle allait peut-être devoir laisser un enfant ayant besoin d'attentions particulières en Arabie saoudite. Il a la nationalité saoudienne, héritée d'un père décédé.

Un Saoudien, qui se trouve au Qatar pour être opéré d'un rein, doit désormais rentrer chez lui.

Une famille saoudienne a été bloquée à la frontière alors qu'elle devait assister à des funérailles familiales au Qatar, selon des images diffusées sur un réseau social.

Le Qatar compte 11.382 résidents d'Arabie saoudite, des Emirats et de Bahreïn, selon la Commission nationale des droits de l'Homme à Doha.

Près de 6.500 Qataris - hommes et femmes - sont mariés à des partenaires de ces trois pays.

Le chef de la Commission, Ali ben Samikh Al-Marri, a dénoncé ce qu'il a qualifié "d'embargo injuste qui viole toutes les conventions internationales sur les droits de l'Homme".

Sous la pression internationale, les protagonistes de la crise ont fait quelques gestes dimanche 11 juin.

Les autorités d'Arabie, des Emirats et de Bahreïn ont légèrement assoupli leur position, ordonnant que soient examinés certains "cas de familles mixtes" susceptibles d'être séparées.

Et le Qatar a donné la liberté aux ressortissants de ces trois pays de rester sur son territoire, en dépit des "campagnes hostiles et tendancieuses" contre lui.

Mais ça ne règle pas le problème de la nationalité de Rashed et les risques qui pèsent sur celle-ci s'il ne retourne pas à Bahreïn. "Je n'ai jamais vu ma mère aussi inquiète".

La crise menace l'expansion de Qatar Airways

En quelques années, Qatar Airways a transformé Doha en un hub mondial, mais l'interdiction faite à ses avions de survoler des pays voisins menace sa position de grand transporteur transcontinental, estiment des experts.

A l'instar des compagnies Emirates de Dubaï et Etihad d'Abou Dhabi, le transporteur national du Qatar a réussi à contrôler une partie de l'activité transit mondiale en capitalisant sur la position géographique de la région du Golfe.

"L'impact est déjà mauvais, car il a augmenté les temps de vol et causé un surcoût", souligne l'expert Addison Schonland du cabinet de consultants AirInsight, basé aux Etats-Unis.

"En termes opérationnels, c'est une contrainte pour la compagnie aérienne qui verra ses bénéfices diminuer grandement", ajoute-t-il.

Le Qatar est encerclé par l'espace aérien de l'archipel de Bahreïn qui couvre une grande partie des eaux du Golfe et ses avions traversaient d'habitude le vaste espace aérien saoudien pour se rendre au Moyen-Orient, en Afrique et en Amérique du Sud.

Aujourd'hui, avec les interdictions en vigueur, le temps de vol pour Sao Paulo au Brésil a augmenté d'environ deux heures, selon des sites de détection aérien.

Les vols de Qatar Airways vers l'Afrique du Nord transitent eux désormais par l'Iran et la Turquie pour atteindre la Méditerranée, au lieu de survoler l'Arabie saoudite et l'Egypte.

Les vols vers l'Europe sont les moins affectés puisqu'ils continuent de passer au-dessus de l'Iran, avec un petit détour pour éviter l'espace aérien de Bahreïn.

Selon des responsables iraniens, une centaine d'avions supplémentaires traversent chaque jour le ciel de leur pays depuis le début de la crise, soit une augmentation de 17% des vols internationaux.

"A l'avenir, les itinéraires des vols et la consommation de carburant vont augmenter" pour Qatar Airways, prédit l'expert en aviation, Kyle Bailey. Or des itinéraires plus longs réduisent le nombre de passagers, explique M. Schonland.

"Les futures réservations pour un long-courrier vont baisser car même avec un bon service et d'excellents moyens, qui veut s'asseoir plus longtemps dans un avion?", demande-t-il.

Or, environ 90% du trafic de Qatar Airways à Doha dépend du transit, selon un rapport de CAPA Centre for Aviation, un groupe de conseil.

L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis représentent aussi les deux plus grands marchés pour Qatar Airways, rappelle Kyle Bailey. Leur perte sera "dévastatrice pour le bilan financier de la compagnie, qui perdra environ 30% de son chiffre d'affaires", prédit-il.

Qatar Airways a toutefois tenu dimanche à afficher sa bonne santé en dévoilant un bénéfice net en hausse de 22% à 482 millions d'euros pour son exercice 2016/2017 clôturé au 31 mars, soit avant l'éclatement de la crise.

Sa concurrente Emirates avait elle subi une chute de 82,5% de son bénéfice net annuel à 303 millions d'euros.

(Avec AFP)

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