PLF2016: impôts, endettement, recrutement… comprendre les chiffres

Le budget de l’Etat est comme le budget d’un ménage. Il y a les revenus pour le budget qui couvre le quotidien et d'autres pour le budget qui s’engage sur le futur. Mais le jargon n’est pas le même, ni la proportion bien entendu. Comment l’Etat s’endette, recrute et dépense?

PLF2016: impôts, endettement, recrutement… comprendre les chiffres

Le 22 octobre 2015 à 16h28

Modifié 11 avril 2021 à 1h03

Le budget de l’Etat est comme le budget d’un ménage. Il y a les revenus pour le budget qui couvre le quotidien et d'autres pour le budget qui s’engage sur le futur. Mais le jargon n’est pas le même, ni la proportion bien entendu. Comment l’Etat s’endette, recrute et dépense?

La commission des finances de la Chambre des Représentants entame, incessamment, l’analyse du projet de loi de Finances 2016. La commission s’intéresse surtout au jeu des équilibres tout en pointant le viseur sur le développement des finances publiques et de la dette.

Le volet fiscal n’est pas en reste, au même titre que les budgets alloués aux départements sensibles.

Le premier point de l’analyse porte souvent sur la capacité de l’Etat à financer sa politique. Les recettes et les dépenses ordinaires sont donc passées au peigne fin. Rien ne renseigne mieux sur la situation financière d’une institution que sa capacité à générer des revenus constants et surtout son rythme de vie et de fonctionnement par rapport à ses recettes.

Pour 2016, le projet du ministère des Finances table sur une recette ordinaire de 212,4 milliards de DH. La fiscalité rapportera 196,9 milliards de DH dont 86,1 milliards des impôts directs, 85,5 milliards des impôts indirects, 7,9 milliards des droits de douanes et 17,29 milliards des droits d’enregistrement.

Les recettes non fiscales draineront 15,4 milliards de DH en 2016 dont 8,3 milliards de DH en produits de monopole et des participations de l’Etat. C’est dans ce chapitre que sont logés les dividendes que l’OCP verse à l’Etat au même titre que Maroc Telecom ou l’ONDA et autres.

En face du compte "recettes ordinaires" se trouve toujours le compte "dépenses ordinaires". Pour le Budget de l’Etat, ce compte totalise 216,9 milliards de DH. Le budget de fonctionnement à lui seul englouti 188,6 milliards de DH dont 106,7 milliards en salaires.

Les dépenses en intérêts et commission de la dette, elles, s’accaparent 28,2 milliards de DH. Attention, il ne s’agit que des intérêts et des commissions. Ce compte n'inclut pas le remboursement du principal. Celui-là, on le retrouve ailleurs dans le compte amortissement de la dette.

Jusque là, la pilule passe puisque les recettes ordinaires ramenées aux dépenses ordinaires donnent un léger solde négatif de 4,5 milliards de DH. Pour schématiser, ce solde ne dépasse pas ce qu’on peut assimiler à un léger dépassement bancaire chez un couple qui se démène chaque mois pour joindre les deux bouts. Pour se payer une gâterie ou pour investir à long terme, notre couple doit s’endetter. C’est ce que fait l’Etat, mais dans des proportions qui donnent froid dans le dos.

Le budget d’investissement prévu pour 2016 est de 61,4 milliards de DH et l’amortissement de la dette (40,9 milliards de DH) font exploser les comptes de l’Etat. Les besoins de financement -soit l’argent que le gouvernement n’a pas- se chiffrent à 94,5 milliards de DH. Et comme notre couple qui vit au-dessus de ses moyens, l’Etat doit s’endetter. Pour 2016, l’endettement prévu (ligne recette d’emprunt) est de 70,5 milliards de DH dont 25,5 milliards en devises.

C’est une donne structurelle, l’Etat s’endette pour soutenir sa politique. Et il le fait après avoir épuisé toutes les voies possibles (et accessibles) pour améliorer ses recettes. Et tout y passe. L’Etat taxe tout se qui bouge (ou presque), jusqu’à les produits interdits pour les "musulmans".

Aussi, la taxe sur les vins et des alcools contribuera au budget à hauteur de 538 millions de DH, peut-être davantage, en fonction de la consommation. La taxe de la bière, elle, drainera 760 millions de DH en 2016. Les deux taxes sont en légère progression par rapport à l’année dernière. La limonade n’échappe pas à la taxe non plus: 291 millions de DH de recette en 2016.

Le tabac manufacturé engendrera une recette de 9,05 milliards de DH, soit quatre fois les dividendes que l’OCP doit verser à l’Etat en 2016. Les passeports, eux aussi, drainent de l’argent: 218 millions de DH en 2016. Quant aux vignettes automobiles, les prévisions donnent une cagnotte de 2,13 milliards de DH. Et en tablant sur l’insoutenable légèreté de l’être, l’Etat budgétise les pénalités de retard de paiement des impôts; pour 2016, elles seront de 2,3 milliards de DH.

Investissement: pratiquement les mêmes montants reconduits

La quête de l’augmentation des recettes est donc légitime et justifie le renforcement du dispositif de contrôle prévu par le PLF2016. Cela est d’autant plus important qu’il est capital que le gouvernement stimule l’économie pour générer plus de recettes, chose qui semble difficile à réaliser.

Et en attendant que les plans sectoriels génèrent une croissance soutenue, le gouvernement garde l’œil sur le passif social, surtout à la veille d’une année électorale. L’idéal est que l’exécutif mette le paquet dans les domaines sociaux. A commencer par les ministères dits sensibles (justice, éducation nationale, enseignement supérieur et santé).

Au titre des dépenses de fonctionnements (dont les salaires), le projet de loi des Finances attribue 43 milliards de DH au ministère de l’Education nationale. C'est presque le même niveau que celui qu'on trouvait dans le budget 2015. Les trois autres ministères sont dans la même tendance. Le ministère de la Justice et des libertés reste dans la fourchette des 4,1 milliards de DH; celui de l’enseignement dépasse 8,9 milliards; quant à la santé, elle atteint 11,7 milliards.

Côté budget d’investissement, ou ce qu’on appelle dans le jargon de la loi de Finances les crédits ouverts au titre des dépenses d’investissement, force est de constater que les budgets ont été légèrement revus à la baisse. Ainsi, le budget de l’Education nationale sera en 2016 de 3,82 milliards de DH.

A préciser aussi que dans le jargon de la loi de Finances, l’investissement peut être fragmenté en deux postes: les crédits de paiement et les crédits d’engagement. Les premiers portent sur l’année-même de la loi de Finances alors que les seconds ne sont que des engagements pris sur le budget de l’année suivante. Aussi, le budget d’investissement du ministère de l’Education nationale prévoit-il un crédit de paiement pour 2016 de 2,7 milliards de DH, le reste étant sous forme d’engagement sur 2017.

La même chose pour la santé. Le budget d’investissement 2016 de ce département est de 5 milliards de DH, dont 2,5 milliards en paiement pour 2016. Pris dans son ensemble, ce budget a été revu à la baisse par rapport à 2015 (6,5 milliards de DH).

L’emploi: création, remplacement et promotion

Même les chiffres sur l’emploi, il faut les lire avec prudence. Le gouvernement s’engage, dans le PLF2016, à créer presque 25.998 postes budgétaires. Dans le jargon de l’Etat, le mot création peut ne pas avoir la même signification que celle reconnu sur le marché de l’emploi.

Pour 2016, 16.990 départs à la retraite sont prévus.

Ceci étant, dans la tradition budgétaire administrative, la création de poste budgétaire ne veut pas dire embauche. C’est un jargon comptable usité chez la Trésorerie générale du royaume, l’administration qui gère les salaires, connue sous l’appellation affective de "le somme".

Une création de poste budgétaire peut correspondre à une promotion interne. La TGR crée un poste budgétaire correspondant au salaire d’un grade administratif et l’attribue à un fonctionnaire qui a obtenu une promotion. Le PLF2016 ne précise pas cette distinction. Comme d’autres (surtout les comptes d'affectation spéciales) qui seront sur la table de la commission des finances de la Chambre des Représentants.

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