Quand on demande les chiffres, chacun y va de ses propres estimations. Officiellement, le ministère des Marocains résidant à l'étranger et des affaires de la migration avance le nombre de 4.713 Syriens qui ont reçu un avis favorable pour leur demande de régularisation, soit 90% du total des demandes. Un simple calcul permet donc d'établir que le nombre de résidents syriens au Maroc qui ont procédé à la demande de régularisation dépasse les 5.200 personnes.

La même source nous indique qu'au 21 avril 2015, 406 cas ont été auditionnés par la commission ad hoc qui statue sur les demandes d'asile. Ces chiffres ne prennent donc en compte que les Syriens qui ont demandé à être régularisés ou à avoir le statut d'exilé. Le ministère des Affaires de la migration ne dispose pas de chiffres concernant les autres.

A la maigreur de ces statistiques s'ajoute l'absence d'un réseau associatif capable d'absorber, d'accompagner et de prendre en charge le nombre croissant de Syriens qui affluent au Maroc. Nos recherches ont montré qu'il n'existe, aujourd'hui, aucune association spécialement dédiée au cas des réfugiés Syriens au Maroc. Seules existent quelques initiatives éclatées, dans le cadre de collectifs ou de coordinations qui permettent de maintenir un minimum de solidarité entre les individus. Pire encore, les quelques associations de protection des droits de l'homme ou des migrants existantes avouent n'accorder qu'un intérêt relatif au cas des Syriens se trouvant au Maroc... Une importance justifiée par les caractéristiques de leur mobilité?

Les Syriens veulent surtout rejoindre l’Europe

"En général, les Syriens utilisent le Maroc comme point de passage vers l'Europe. Mais il y en a quelques uns qui ont décidé de s'y installer avec leurs familles", nous déclare Jihad Pharaon, coordinateur de la ligue des Syriens au Maghreb lors d'un entretien accordé à Médias 24.

"Les Syriens arrivent au Maroc, pour la plupart, via les frontières terrestres algériennes, aidés par des passeurs. C'est d'ailleurs ce qui explique la grande concentration de Syriens à Oujda. Mais pas seulement, autour de Melilia et de Sebta, ils deviennent de plus en plus nombreux, attendant l'occasion de fouler le sol espagnol", ajoute-t-il.

Et pour cause, au Maroc, la situation des réfugiés syriens n'est pas à envier. Economiquement, les Syriens du Maroc sont condamnés à la mendicité ou au travail précaire ou non déclaré, car malgré la régularisation d'un grand nombre de demandeurs, et l'octroi d'une carte de séjour, l'accès à l'emploi reste tributaire d'un certain nombre de conditions souvent difficile à remplir.

"En pratique, il est difficile pour un ressortissant syrien d'obtenir un certificat de résidence, nécessaire pour demander un emploi. Il y a également en matière d'accès au travail le principe de préférence nationale, qui oblige l'employeur à motiver son choix du travailleur étranger, en justifiant d'une compétence que les Marocains ne maîtrisent pas", constate notre interlocuteur.

En matière d'accès à l'éducation en revanche, les règles sont beaucoup moins rigides. Jihad Pharaon constate qu'"il n'existe pas de réelles difficultés pour inscrire son fils ou sa fille à l'école, il suffit de disposer d'une titre de séjour valide."

Les discours officiels (sans doute pleins de bonnes volontés) doivent se traduire par une amélioration des conditions de vie des Syriens vivants au Maroc. Une amélioration qui passe nécessairement par un meilleur accès au logement et à l'emploi.