Face aux tensions géopolitiques, les cours pétroliers plongent dans l'incertitude

Devant l'accroissement des tensions entre Israël et l'Iran, le monde s'interroge sur les possibles incidences sur les marchés pétroliers. Médias24, en compagnie de Rebecca Babin, entreprend une analyse exhaustive des multiples scénarios envisageables et de leurs retombées, mettant en lumière les conséquences éventuelles pour le Maroc.

Face aux tensions géopolitiques, les cours pétroliers plongent dans l'incertitude

Le 17 avril 2024 à 15h10

Modifié 17 avril 2024 à 15h58

Devant l'accroissement des tensions entre Israël et l'Iran, le monde s'interroge sur les possibles incidences sur les marchés pétroliers. Médias24, en compagnie de Rebecca Babin, entreprend une analyse exhaustive des multiples scénarios envisageables et de leurs retombées, mettant en lumière les conséquences éventuelles pour le Maroc.

Les craintes de perturbations dans l'approvisionnement en pétrole, entraînant des prix plus élevés en franchissant la barre des 90 $ le baril, se sont atténuées après l’épilogue de l'attaque de l’Iran contre Israël.

Le fait que les investisseurs percevaient moins de risques liés à l'offre du pétrole s'est traduit par une ouverture légèrement à la baisse des prix le 15 avril, où le cours du Brent s’est établi à 89,68 $ à 8h30 du matin, avant de baisser jusqu’à 88,75$ à 15 h. Cette baisse, qui contraste avec les attentes d'une augmentation des prix, pourrait signifier qu'Israël ne ripostera probablement pas et que l'affaire est close.

Cependant, après quelques heures, et comme il n'y a rien d'absolu, le chef d’état-major de l’armée israélienne, le lieutenant-général Herzi Halevi a déclaré que l'attaque de missiles et de drones de l'Iran sur le pays sera "suivie d’une riposte". À la suite de cette "confirmation", les prix ont commencé à remonter, reflétant les craintes des investisseurs, pour s’établir autour de 90,41 $ comme prix de clôture, illustrant ainsi l'effet immédiat et direct des nouvelles sur les prix.

Malgré le fait que les États-Unis qualifient la riposte israélienne de limitée et qu'elle ne ciblera pas directement l'Iran, ce dernier a averti que toute forme d'agression contre ses intérêts sera contrée par une réponse décisive. Si ce scénario se concrétise, et compte tenu du fait que l'Iran est le troisième plus gros producteur de pétrole parmi les pays de l'OPEP, avec plus de 3 millions de barils par jour, ainsi que de la géopolitique de la région, où se trouvent des pays producteurs comme l'Irak et l'Arabie saoudite, cela pourrait créer des tensions et des pressions sur le marché du pétrole. Avec les coupes de production en cours et celles prévues d'ici juin, cela pourrait faire grimper les prix à des niveaux sans précédent.

Pour approfondir l’analyse, Médias24 a fait appel à l'expertise de Rebecca Babin, négociatrice senior spécialisée dans le secteur de l'énergie chez CIBC Private Wealth, et figure de renom dans le secteur de l'énergie, reconnue pour ses contributions sur Bloomberg et d'autres grandes chaînes médiatiques.

Médias24 : Comment analysez-vous la situation actuelle du marché pétrolier, en tenant compte des récentes tensions dans la région MENA, notamment le conflit entre Israël et l'Iran, ainsi que de la possibilité d'une riposte israélienne ?

Rebecca Babin : Ce que je crois que le marché attend actuellement, c'est avant tout la réaction d'Israël. Si celle-ci se limite à des attaques ciblées ou à des opérations discrètes en dehors de l'Iran, il est probable que l'escalade soit évitée.

La raison pour laquelle le marché n'a pas réagi brusquement, après l'attaque iranienne contre Israël, tient à plusieurs facteurs. Tout d'abord, les attaques n'ont pas été efficaces, n'entraînant ni pertes humaines majeures ni dommages significatifs. Deuxièmement, la rhétorique de l'Iran laisse entendre qu'ils ne souhaitent pas une escalade majeure. Ils semblent vouloir répondre sans pour autant rechercher un conflit ouvert. Bien qu'Israël affirme qu'une riposte est nécessaire, il doit également tenir compte des règles dictées par les États-Unis. Je suis convaincue que ces derniers exercent des pressions dans ce sens.

Le marché avait déjà anticipé une certaine prime de risque suite aux événements précédents, notamment l'attaque du 1er avril à Damas. Nous avons observé une forte augmentation du volume des options d'achat, les acteurs du marché se couvrant contre une escalade potentielle. Ainsi, le marché était en quelque sorte préparé à l'attaque iranienne. Maintenant, nous attendons de voir si la situation va s'aggraver, ce qui pourrait entraîner une hausse des prix, selon trois scénarios possibles.

Premièrement, une escalade pourrait être déclenchée si Israël attaque l'intérieur de l'Iran, ce qui provoquerait une réponse de la part de ce dernier. Deuxièmement, le risque principal réside dans la possibilité pour l'Iran de cibler les navires ou les expéditions de pétrole à travers le détroit d'Ormuz, ce qui aurait un impact significatif sur les prix du pétrole. Si l'Iran opte pour une autre stratégie, nous pourrions assister à une augmentation de la prime de risque. Cependant, l'Iran a historiquement perturbé le prix du pétrole principalement à travers le détroit d'Ormuz, qu'ils n'ont jamais officiellement fermé. S'ils le font, cela serait un événement majeur.

Enfin, une augmentation des sanctions des États-Unis et de leurs alliés sur les exportations iraniennes pourrait également influer sur le marché. Bien que des sanctions soient déjà en place, leur application n'est pas toujours stricte. Une intensification de ces sanctions pourrait avoir un impact notable.

Cependant, malgré ces scénarios, le marché semble estimer que les probabilités d'une perturbation majeure de l'offre de pétrole restent faibles, expliquant ainsi la stabilité des prix autour de 90 $, sans une hausse brutale.

Les pays sans raffinage, comme le Maroc, vont subir un impact significatif 

- Comment envisagez-vous l'évolution des prix dans les pays qui ne disposent pas d’un système de raffinage, prenant le Maroc comme exemple, étant donné la persistance des prix élevés du pétrole et les coupes de production déjà mises en œuvre et planifiées ?

- Sans un système de raffinage, je pense que cela serait significatif, et vous allez clairement constater un impact sur la demande des pays comme le Maroc. Vous devez composer non seulement avec les perturbations de l'offre en provenance de la Russie et de l'OPEP+, qui maintiennent des barils hors du marché, ainsi que les primes de risque géopolitiques, mais vous devez également composer avec un dollar fort en ce moment, ce qui nuit considérablement à ce segment de pays. Ce que nous constatons réellement, c'est que si le Brent atteint les 90 $, considérés comme un point d'inflexion, les petits pays importateurs commencent vraiment à modifier leur profil de demande.

Je suis convaincue que ces trois facteurs combinés (la géopolitique, les coupes de l'OPEP et le dollar fort) auront un impact sur ce segment de pays. Ils doivent faire face à de nombreux défis, et le fait qu'ils n'aient pas de raffinerie signifie qu'ils doivent importer les produits finis. De plus, les produits finis ont connu une augmentation significative ; par exemple, le prix de l'essence a augmenté de 30% cette année. En outre, compte tenu des attaques répétées de l'Ukraine contre leurs raffineries, les Russes ont maintenant réduit leurs approvisionnements, entraînant ainsi un impact plus dramatique sur les prix des produits finis.

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