Maxwell J. Mehlman

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Réglementation sur le patrimoine génétique

Le 15 avril 2013 à 12h38

Modifié 11 avril 2021 à 2h34

CLEVELAND, 1er avril 2013 – Depuis des milliers d'années, les humains utilisent la génétique pour contrôler l'évolution des plantes et des animaux. Il est donc inévitable que nous l'utilisions pour façonner notre propre évolution. Nos efforts ont jusqu'à présent été modestes : certains sites de rencontres en ligne ont commencé à associer leurs abonnés en fonction de leur compatibilité génétique. Les parents passent de plus en plus au crible les embryons et les fœtus, et ne laissent naître que ceux qui ont les gènes les plus sains. Les généticiens n'améliorent que lentement leur capacité à manipuler directement l'ADN et personne n'essaie d'apporter de modifications à la lignée germinale chez les humains, qui seraient alors transmises aux générations suivantes.

La technologie complète du génie l'ingénierie de l'évolution humaine est encore loin d'être atteinte, mais elle peut devenir courante. Le défi pour l'humanité est double : survivre assez longtemps pour atteindre cette étape, et causer le moindre mal possible en y arrivant.

Les personnes les plus à risque dans l'immédiat sont les enfants, qui sont en danger de voir leur matériel génétique manipulé d'une manière préjudiciable. Le préjudice peut être physique (mort-nés, malformations et maladiesgénétiques). Mais même le génie génétique techniquement réussi peut causer des souffrances psychosociales à des enfants qui risquent d'être rejetés par leurs pairs, comme étant « bizarres » ou simplement « différents ».

Sur le plan sociétal, le génie génétique que seuls les riches peuvent s'offrir risque de mettre en péril la cohésion sociale en écartant l'égalité des chances. Les nantis et les pauvres génétiques pourraient former des castes séparées, et l'isolement reproducteur va probablement causer des changements physiques qui rendront impossible la procréation inter-castes. Cela pourrait conduire en fin de compte à l'émergence d'espèces humaines distinctes.

Étant donné qu'aucune espèce humaine autre que la nôtre n'a survécu (l'Homo floresiensis a disparu il y a environ 18 000 ans), les perspectives d'une coexistence harmonieuse entre les futures espèces humaines ne sont pas rassurantes. Dans le pire des cas, la lignée génétique de l'homme pourrait elle-même être anéantie par des conflits inter-espèces.

Même sans spéciation, les mêmes résultats pourraient se produire par une perte de diversité génétique : si tout le monde choisit les mêmes traits pour sa progéniture, les descendants seront incapables de survivre à un défi inattendu de l'environnement.

Les généticiens expriment souvent leur scepticisme à propos de telles prévisions. Par exemple, un critique de mon dernier livre, publié dans le magazine Science, a soulevé le peu d'impact de « quelques individus génétiquement modifiés » sur le patrimoine héréditaire humain. Mais même s'il est vrai qu'une catastrophe du génie génétique ne rattrapera pas sous peu les espèces humaines entières, les technologies existantes du génie génétique peuvent déjà peuvent nuire à certains enfants : considérez l'augmentation des naissances prématurées et les faibles poids à la naissance liés à la fécondation in vitro. Et les décisions en matière de reproduction qui reflètent une préférence culturelle pour les garçons commencent à causer des problèmes sociaux dans des pays comme la Chine et l'Inde.

Autrement dit, en l'absence d'obstacles techniques inconnus et imprévisibles, l'ingénierie de l'évolution humaine est susceptible de devenir suffisamment répandue à l'avenir pour causer des menaces à l'échelle de l'espèce. Ainsi bien qu'il ne soit pas nécessaire de recourir maintenant à des mesures pour prévenir des dangers futurs, il est logique d'identifier les mesures qui pourraient être nécessaires, ainsi que les changements des normes sociales et des comportements qu'il faudrait mettre en œuvre.

De nombreux risques de l'ingénierie de l'évolution humaine résultent des mauvaises décisions des parents. Désireux de donner à leurs enfants des avantages sociaux, les parents peuvent prendre des décisions en matière de reproduction fondées sur une information génétique erronée ou incomplète, ou demander la modification génétique de leurs enfants avant d'effectuer des tests de sécurité adéquats.

Déterminer le moment où il est permis de s'immiscer dans le choix des parents est difficile, compte tenu des égards dont jouissent en général les parents. La plupart des pays ont des lois visant à protéger les enfants contre les mauvais traitements et contre la négligence. Mais la législation pour protéger le bien-être des enfants ne répond pas adéquatement aux préjudices produits ou mis en œuvre avant la naissance, ni à établir quels types d'ingénierie de l'évolution sont acceptables.

La plupart des décisions de reproduction des parents ne peuvent pas être prises sans l'aide de professionnels de santé, de sorte qu'il pourrait être nécessaire de réglementer aussi le comportement professionnel. Tandis qu'une partie de l'infrastructure, comme les autorisations d'exercer des médecins est déjà en place, des étapes supplémentaires peuvent être nécessaires, comme le règlement intensifié des cliniques de fertilité, où beaucoup d'interventions de génie génétique vont se dérouler. En outre, il faut établir des règles pour évaluer l'innocuité et l'efficacité des nouvelles technologies en ce qui concerne à la fois les bénéficiaires et leurs descendants immédiats.

Certaines formes d'ingénierie de l'évolution qui ne portent pas directement préjudice aux personnes et ne seront donc pas soumises à de telles réglementations, comme les décisions de tous les parents de procéder aux mêmes modifications génétiques sur leur descendance, pourraient menacer la survie de la lignée humaine. Les systèmes de santé publique doivent se prononcer sur ce problème. Pourtant, compte tenu des efforts faits dans la passé par des responsables publics pour employer la génétique pour améliorer la santé publique, en particulier, le mouvement eugéniste du début du XXème siècle, avec ses terribles campagnes de stérilisation forcée, il est important de s'assurer que ce pouvoir soit exercé judicieusement et sur la base de données scientifiques solides.

Enfin si trop peu de membres de la société ont un avantage génétique trop grand, la cohésion sociale et les institutions démocratiques pourraient être menacées même en l'absence d'une souffrance physique directe. Si la génétique que nous permettons doit bénéficier à nos descendants, elle doit être aussi largement disponible que possible.

Traduit de l'anglais par Stéphan Garnier.


 

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