Des mesures pour relancer l'économie ukrainienne

Le 10 mars 2014 à 11h35

Modifié 11 avril 2021 à 2h35

L'Ukraine est parvenue brusquement à une percée démocratique. Après le bain de sang provoqué par l'ancien président, bon nombre de ses députés ont rejoint l'opposition, ce qui a permis à une large majorité de se constituer.

Pour consolider son autorité, le nouveau gouvernement devra agir rapidement et résolument et recevoir une aide internationale considérable afin de réformer l'économie en crise du pays.

 

WASHINGTON, DC –  L'Ukraine souffre de trois grands problèmes économiques. D'abord, ses paiements internationaux ne peuvent être maintenus à long terme. Son déficit du compte courant de l'année dernière était estimé à 8,3% du PIB et ses réserves en devises étrangères sont rapidement en train de s'épuiser, couvrant un peu plus de deux mois d'importations. Deuxièmement, les finances publiques ne peuvent pas non plus être maintenues à long terme. Le déficit budgétaire atteignant près de 8% du PIB et les taux des obligations d'Etat montent en flèche. Troisièmement, l'économie est en récession sur cinq trimestres depuis juin 2012.

Ces problèmes reflètent la politique économique de Viktor Ianoukovytch, qui n'avait qu'un seul objectif : s'enrichir lui et sa famille, ainsi que quelques-uns de ses amis. Au cours des quatre dernières années, l'Ukraine a connu des détournements de fonds sans précédent par ses dirigeants. Certaines estimations sur la richesse de la famille Ianoukovytch s'élèvent à près de 12 milliards de dollars. Là encore, le nouveau gouvernement aura besoin de l'aide internationale s'il espère récupérer au moins une partie de ce butin.

Les premières mesures à prendre

Maintenant qu’Ianoukovytch est mis à l'écart, les extorsions de fonds par les dirigeants ukrainiens devraient cesser et l'économie devrait se rétablir. En fait, le PIB de l'Ukraine a augmenté de 3,3% au dernier trimestre de 2013, parce que le népotisme a été réprimé par les manifestations publiques. Pourtant de nombreuses mesures peuvent et doivent être prises très rapidement, parce que l'Ukraine est à court d'argent.

Tout d'abord, la nouvelle majorité parlementaire doit nommer un nouveau gouvernement, afin de lancer un nouvel ordre du jour politico-économique. Un nouveau gouverneur de la Banque centrale doit également être nommé : le premier ordre du jour consistera à laisser flotter le taux de change. Cela devrait conduire à une importante dévaluation de peut-être 10% et mettre ainsi fin au cours actuel de la hryvnia, en éliminant le déficit du compte courant et en permettant une réduction des taux d'intérêt extrêmement élevés en Ukraine, ce qui devrait stimuler les investissements.

Dès que le gouvernement sera nommé, le Fonds monétaire international devrait dépêcher une mission en Ukraine. Dans les deux semaines, la mission du FMI pourrait conclure un nouveau programme de stabilisation financière avec la nouvelle administration. Le FMI travaille vite et pourrait faire un premier grand décaissement pour la fin du mois de mars.

Le FMI pourrait prêter à l'Ukraine 10 à 12 milliards de dollars pour un programme de stabilisation d'un an, dans lequel l'Union européenne utiliserait 3 à 5 milliards de sa balance des paiements pour cofinancer un programme de veille du FMI. Ces deux sources à elles seules pourraient couvrir une grande partie des 35 milliards de financement externe dont le pays pourrait avoir besoin au cours des deux prochaines années, d'après les déclarations de Yuriy Kolobov, le ministre des Finances en fonction de l'Ukraine. En outre, les prêts du FMI sont soumis à un taux d'intérêt plus bas et à une durée plus longue que les emprunts russes sur lesquels le gouvernement Ianoukovytch s'est appuyé (et qui sont peu susceptibles de continuer).

Arrêter la corruption

Les conditions du FMI sur ses prêts peuvent aider l'Ukraine à annuler les mesures vénales de Ianoukovytch. Avant toute chose, l'Ukraine devra fortement réduire son déficit budgétaire, ce qui compte tenu des recettes fiscales importantes doit être accompli par des réductions de dépenses et par des gels. D'importantes subventions en faveur de l'industrie (par exemple celle du charbon) ne sont rien d'autre que des cadeaux faits à des partisans d’Ianoukovytch et doivent être supprimées immédiatement. De même, il faut libéraliser les prix du gaz pour stopper l'enrichissement de la corruption par un arbitrage réglementaire. Ce sont les consommateurs dans le besoin qui doivent recevoir une aide, pas les riches producteurs.

De même le FMI insiste sur la réintroduction des appels d'offre. Depuis 2010, les marchés publics sont fermés et Ianoukovytch distribue tout simplement les contrats publics à ses amis et à ses acolytes à deux fois le prix du marché. Naturellement les ventes des entreprises d'Etat à des loyalistes, en général à des prix défiant toute concurrence, doivent aussi prendre fin.

Une autre source de corruption a consisté en des remboursements de TVA pour les exportateurs, pour lesquels les fonctionnaires du fisc imposent une commission. Mettre un terme à cela devrait stimuler les exportations.

En outre, l'Ukraine devrait réintroduire le code fiscal simplifié pour les petites entreprises, aboli par Ianoukovytch. Deux millions de petites entreprises ont été anéanties par ce changement : bon nombre d'entre elles pourrait être relancées si les procédures fiscales ne sont plus prohibitives.

L'Ukraine doit également travailler avec l'UE. D'ici une semaine, le nouveau gouvernement peut remplir les conditions de l'UE pour la signature de l'Accord d'association conclu de longue date. Ceci devrait être mis à l'ordre du jour du sommet UE-Ukraine du mois de mars. Le Parlement a déjà prévu de nouvelles élections et l'ancienne Premier ministre Yuliya Tymoshenko a été libérée de prison. La seule condition restante pour l'UE, la législation visant à réformer le ministère public, peut être adoptée rapidement.

Le rôle de l’UE et des Etats-Unis

L'accord d'association UE-Ukraine va grandement bénéficier à l'Ukraine. Il revient à un programme de réforme global de l'appareil d'Etat ukrainien, y compris de ses organes répressifs. Soixante agences gouvernementales dans différents pays de l'UE ont déjà conclu des accords avec leurs homologues ukrainiens sur les réformes nécessaires.

L'accord contient également une Zone de libre-échange approfondie et complète qui ouvrira le vaste marché européen aux exportateurs ukrainiens et va ainsi attirer davantage d'investissements directs étrangers vers l'Ukraine. Cela aidera également à protéger le pays contre d'éventuelles sanctions commerciales russes.

La diplomatie va jouer à ce titre un rôle important. Les États-Unis et l'UE doivent convaincre le président russe Vladimir Poutine de parvenir à un accord avec les nouveaux dirigeants de l'Ukraine, plutôt que de donner suite à sa menace d'imposer des sanctions. La coexistence pacifique est le meilleur choix pour les deux pays, plutôt que la tension bilatérale croissante.

© Project Syndicate 1995–2014

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